MaxMara, jubilant jubilaire.

Fleuron de la mode italienne, le méga-label MaxMara s’apprête à fêter ses 50 ans d’existence. Et si la griffe affiche un demi-siècle au compteur, son style, lui, n’a pas pris une ride.

En l’an de grâce 2001, le label MaxMara cornaqué par la famille Maramotti souffle ses 50 bougies. Et célèbre, dans la foulée, le succès de ses nombreux  » bambini « . Car la griffe italienne a engendré plus de 25 collections. Hormis sa première ligne éponyme qui sert aussi d’exemple à toutes les autres, on épingle, entre autres Sportmax et Weekend by MaxMara, les deux  » soeurs cadettes  » de MaxMara, les jeunettes Max & Co, SportMax Code et Pennyblack, la sage Marella, les basiques I Blues et Blues Club, la féminissime Pianoforte, la sporty chic ‘S MaxMara, les accessoires, les lunettes, les parfums, etc.

Bref, MaxMara est une belle  » quinqua  » qui ne fait vraiment pas son âge. Pensée pour toutes celles qui privilégient le souci d’élégance à la fashion-victimisation – une attitude résolument italienne -, MaxMara propose une mode davantage en évolution qu’en révolution mais qui, cependant,  » colle  » à l’actualité sans s’y engluer. Luigi Maramotti, actuel dirigeant du groupe, a d’ailleurs coutume de dire que  » Un vêtement MaxMara ne domine jamais la personnalité qui le porte  » et il ajoute que  » c’est la femme de tous les jours qui fait ma meilleure publicité « . Dont acte, une fois de plus, dans les créations du printemps-été 2001: chez MaxMara, les tenues estivales, qui picorent gentiment au ratelier des uniformes (robes-chemisiers à pattes d’épaules, vestes militaro-chics à ceinture-baudrier, blouses aux boutons métalliques très réglementaires, festival de kaki, de blanc et de beige, etc.), rattrapent cette rigueur somme toute très sexy par un envol de tissus légers (lin, soie, coton, jersey, voiles, cool wool…), de rayures bayadères et d’imprimés fleuris. En résumé, comme l’écrit Suzy Menkes dans  » The Herald Tribune  » (1),  » cette collection qui oscille entre le hard et le tendre est concevable à la fois dans la vie de tous les jours et l’espace d’un instant, sur le podium et sur le dos des top models. Quant à la ligne Sportmax, très proche de son aînée dans son allure générale et même en détails, elle troque le côté  » Madame la Générale  » contre un panaché des eighties (pantalons droits et serrants ou jumpsuits, tops en filet ou en maille un peu lâche, maxi-polo qui mute en robe, tissus zippés ou traversés d’estafilades, sur l’arrière, impressions  » zèbre  » et jungle, manches chauve-souris, métissage de dentelles et de denim, etc.) qui vont de « Dallas » à « Dynastie » en passant par Blondie et Madonna période  » Like a Virgin « .

La nonna et la donna S’il fallait dégager quelques épisodes clés de la saga MaxMara, on pourrait, par exemple, raconter les aventures d’un manteau qui n’était pas manchot. Créé en 1982, le 101801, un long pardessus croisé en cachemire et laine de couleur camel, est en effet devenu la pièce emblématique de la marque (2), même si chaque automne-hiver, MaxMara propose plus de 50 déclinaisons différentes dudit produit. On pourrait également souligner la pertinence d’un style qui sut et sait toujours surfer sur la vague des tendances et les humeurs de la mode sans y laisser sa crédibilité, sa qualité ou une partie de sa (très vaste) clientèle. Mais, surtout, on évoquerait l’histoire d’une entreprise 100% familiale qui commença à tisser la trame de son succès voici presque un siècle et demi. Vers le milieu du XIXe siècle, à Reggio Emilia, (NDLR: située en Emilie-Romagne, cette belle cité est la capitale du parmesan) Marina Rinaldi, l’arrière-grand-mère du Dottore Achille Maramotti, fondateur du groupe MaxMara, se piqua en effet de développer son petit atelier de couture. Outre le fait que la  » nonna  » ait donné son nom à l’une des lignes de MaxMara (NDLR: les collections Marina Rinaldi s’adressent aux jolies rondes), cette initiative, d’abord modeste, prendra rapidement du galon. Après la Seconde Guerre mondiale, Achille Maramotti, son diplôme de droit en poche, décide de passer à la vitesse supérieure. S’inspirant des méthodes américaines, il confère à sa  » petite entreprise qui ne craint pas la crise  » une dimension industrielle, anticipant astucieusement le boom du prêt-à-porter qui, au XXe siècle, va complètement bouleverser un univers de mode jusque-là régi en amont par les grands couturiers et en aval, par les petites cousettes. En 1951, l’entreprise MaxMara naît donc, présentant simultanément une première collection homonyme. Là, Achille Maramotti a une fois de plus le nez fin. Au lieu de suivre au fil près la mode parisienne qui, à l’époque, sert de référence ultime, il réinvente les tendances de la saison et les ressert à la sauce italienne avec, cerises sur le gâteau, la qualité et les finitions caractérisant le savoir-faire transalpin et un éventail de prix plutôt moelleux. Ce précurseur qui ne manquait pas d’audace fut en fait l’un des premiers à poser les fondations du style  » made in Italy « . Au tournant des sixties, Maramotti saisit l’importance de cibler un marché  » jeune  » (18-30 ans) et trendy fortement influencé par les icônes du Swinging London. En 1969, il lancera, avec un égal brio, la ligne Sportmax tandis qu’une succession de stylistes talentueux (NDLR: il y eut notamment des pointures comme Karl Lagerfeld, Emmanuelle Kahn, Luciano Soprani, Jean-Charles de Castelbajac…) bien que jamais portés au-devant de la scène par l’entreprise, veilleront à donner à MaxMara une image de mode globale et cohérente.Griffe à succès, groupe discret  » Le secret du succès de MaxMara, transmis dès la première collection lancée par Achille Maramotti il y a cinquante ans, et composée d’un manteau et d’un tailleur, repose sur un processus de création fort, explique Giorgio Guidotti, responsable de la communication. Ce processus, qui subit une évolution permanente, ne se base pas uniquement sur l’aura d’un styliste parce que nous pensons que la créativité des grands stylistes possède un cycle à court ou moyen terme alors que nous, nous visons des projets à long terme. Voilà pourquoi nous préférons miser sur une créativité présente à chaque étape de l’élaboration du produit: de la fabrication du tissu à la production et à la distribution du vêtement en passant par la communication et, naturellement, le style.  » Au fil de ces cinq décennies, le groupe MaxMara qui débuta jadis avec une petite centaine d’employés à Reggio Emilia, a pris non seulement de l’étoffe mais aussi du galon: aujourd’hui, il affiche un chiffre d’affaires d’environ 39 milliards de nos francs et compte 1 100 boutiques réparties dans 90 pays. Ce nombre de points de vente, déjà impressionnant, va encore s’étoffer. MaxMara s’apprête en effet à ouvrir à Munich, Copenhague et Pékin, après avoir  » cartonné  » à Tokyo et, surtout, à Saint-Pétersbourg, la nouvelle  » place to be  » du prêt-à-porter haut de gamme (NDLR: il s’agit de la 6e implantation du groupe sur le marché russe). Pour célébrer son jubilé, MaxMara, qui pratique la réserve comme un art – les têtes pensantes et agissantes du groupe observent la plus grande discrétion sur les plans professionnels et privés -, n’a guère l’intention de noyer l’Italie sous des flots de confettis, de champagne et de  » happy few « . Cependant, la griffe au double M planche sur l’installation de son QG dans un bâtiment flambant neuf réalisé par les architectes John Mc Aslan et Peter Walker. Le siège historique de la compagnie, lui, va servir de musée d’Art moderne où le public pourra admirer, d’ici trois ans, les collections privées du clan Maramotti. Gageons que Luigi et ses frère et soeur Ignazio et Ludovica Maramotti auront encore de belles histoires à raconter à leur descendance vu que, dans cette tribu où la passion de l’élégance et du travail bien fait a valeur d’hérédité, on n’a pas l’habitude de perdre le fil de son histoire.

(1) Edition du 3 octobre 2000.

(2) Le manteau  » 101801  » appartient aux collections permanentes du Victoria & Albert Museum (Londres) et du Palais Galliera (Paris).

Marianne Hublet

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