Les diamants de labo sont-ils de vrais diamants ?

© Getty Images/iStockphoto
Wim Denolf Journaliste Knack Weekend

Les diamants qui ne proviennent pas des profondeurs de la terre, mais d’un labo, ont le vent en poupe. Sont-ils aussi beaux que leur équivalent naturel, ont-ils un impact positif sur l’environnement et constituent-ils un bon investissement? Tentative de réponses.

Juna Fae, Idyl, Kimaï, N-ue: ces dernières années, de nombreuses marques de bijoux ont fait leurs débuts en Belgique en utilisant uniquement des diamants produits en laboratoire. Le principe derrière ces pierres précieuses est simple. Dans la nature, des molécules de carbone situées à des centaines de kilomètres sous la surface de la terre mettent des millions d’années à se cristalliser en diamants sous l’effet d’une pression et d’une chaleur énormes. Des spécialistes qui imitent ce processus accomplissent, eux, le travail en quelques semaines, voire quelques jours. Un produit de niche? Loin de là. Le plus grand fournisseur au monde de ces gemmes naturelles, De Beers, mise sur les diamants de laboratoire depuis 2018 avec sa marque de bijoux Lightbox, tandis qu’après Swarovski, le plus grand fabricant de bijoux de la planète, Pandora, se concentre désormais aussi sur ce secteur en ébullition.

Qualités semblables

Pourtant, le sérail dénonce encore souvent que les pierres développées en laboratoire ne sont pas des vraies. Mais scientifiquement, cette affirmation ne tient pas la route. «Ils ont la même composition chimique et les mêmes propriétés optiques et physiques que les naturels, explique Ellen Joncheere, CEO du certificateur de diamants HRD Antwerp. Ils sont tout aussi durs et brillent tout autant. Leur origine est différente, bien sûr, mais il faut des scanners spécialisés comme les nôtres pour le savoir, car même un expert avec un microscope n’y verra que du feu.»

Il n’y a également aucune différence de classification en ce qui concerne le poids, la couleur, la clarté et la taille, souligne Ellen Joncheere: «Nos certificats indiquent si elles sont naturelles ou de laboratoire, mais deux pierres qui ont été créées d’une manière totalement différente peuvent être parfaitement de la même qualité.» Cela explique pourquoi la Federal Trade Commission des Etats-Unis a supprimé le mot «naturel» de sa définition des diamants en 2018 et argue qu’il est trompeur de suggérer que ceux de laboratoire sont des faux. Pourtant, c’est exactement ce que les adeptes des diamants naturels font sur leur site Web sous prétexte qu’ils fournissent des «informations correctes». Synthétiques, artificiels, industriels ou d’imitation: les mots ne manquent pas pour discréditer ces nouveaux venus.

Conscience écologique

Aujourd’hui, 3 à 5% des diamants vendus dans le monde proviennent d’un fabricant. Cela peut sembler peu, mais si seulement 2 millions de carats ou 0,4 tonne de diamants ont été produits en 2018, en 2020, le secteur a atteint 7 millions de carats ou 1,4 tonne. Selon Ellen Joncheere, cette croissance spectaculaire se poursuivra au cours de la prochaine décennie. «Après les Millennials, la génération Z commence maintenant à avoir du pouvoir d’achat, et ce sont précisément ces générations qui montrent beaucoup d’intérêt pour les produits de laboratoire. D’abord pour l’accessibilité financière: le coût de production est bien inférieur à celui de l’extraction traditionnelle, de sorte que le prix des diamants cultivés est 60 à 80% inférieur à celui des naturels de qualité comparable. Ensuite, cette génération est sensible à l’impact sur les personnes et l’environnement. Les entreprises prétendent savoir d’où viennent leurs pierres et si elles ont été extraites de manière écologiquement et socialement responsable, mais elles passent en réalité par trop d’étapes intermédiaires. La chaîne est beaucoup plus longue qu’en labo, et donc plus difficile à contrôler.»

Malgré toutes les initiatives en matière de responsabilité et de transparence, les organisations de défense de l’environnement et des droits de l’homme restent critiques vis-à-vis du secteur. Au cours des dernières décennies, l’industrie a fait disparaître les diamants de sang – ceux dont la vente finançait les mouvements rebelles dans les zones de conflit – mais d’autres points problématiques comme la déforestation, le gaspillage de l’eau, les émissions de CO2, les conditions de travail misérables et les violations des droits humains sont toujours bien d’actualité.

Collier Irene Charm, N-Ue, 2 500 euros, n-ue.com

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Bague The Billie Pavé, Kimaï, 2 185 euros, kimai.com

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Bague Alliance Square, Kubini, dès 1 545 euros, kubini.be

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Piercing White Diamond, Imagin, 179 euros, imaginjewels.com

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Boucle d’oreille Audrey, Idyl,  dès 700 euros, idyl.com

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Collier Irene Charm, N-Ue, 2 500 euros, n-ue.com

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Bague Alliance Square, Kubini, dès 1 545 euros, kubini.be

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Boucle d’oreille Audrey, Idyl,  dès 700 euros, idyl.com

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Contre-arguments

Toutefois, les détracteurs suggèrent, eux, que les diamants produits par l’homme coûtent certes moins cher, mais constituent un mauvais investissement. Sur son site Web, le bijoutier anversois Di Amore prétend même qu’en acheter revient à jeter de l’argent par les fenêtres, car les prix des diamants 2.0 ne cessent de chuter. En termes de valeur de revente, les différences sont énormes: alors que ces derniers sont susceptibles de perdre encore de leur valeur grâce à l’offre sans cesse croissante et à des méthodes de production moins coûteuses, le prix des diamants naturels est en hausse, car les mines s’épuisent et la matière première devient plus rare.

L’argument éthique est également contré par les sociétés minières: elles affirment que non seulement elles créent des emplois dans les pays concernés, mais qu’elles investissent également dans des hôpitaux et des écoles. Selon le World Diamond Council, l’organisation qui chapeaute cette industrie, la disparition de l’extraction plongerait des communautés entières dans la pauvreté et la violence. En outre, plus de la moitié de ces nouveaux diamants sont fabriqués en Chine, ce qui signifie que la production n’est probablement pas plus humaine ou respectueuse de l’environnement.

«En outre, la production consomme également beaucoup d’énergie, ajoute Kaat De Groef, du label Kubini, basée à Anvers. La technologie qui se cache derrière est épatante et pour nous, en tant que marque innovante, c’était un argument important pour travailler principalement avec des diamants de labo, mais on ne peut pas les qualifier d’écologiques par définition. Tout dépend du producteur auprès duquel une marque de bijoux se procure les pierres et de ses efforts pour réduire son empreinte carbone. Nous avons trouvé un fournisseur qui s’engage explicitement en faveur de l’énergie verte, du recyclage de l’eau et de la neutralité carbone, mais je conseille toujours aux consommateurs de se renseigner à ce sujet lorsqu’ils achètent des articles. Cependant, restons honnêtes: il sera toujours plus durable de réutiliser des pierres existantes, et non d’en fabriquer de nouvelles.»

La fin du romantisme?

Enfin, l’argument le plus avancé par le secteur traditionnel, point central des campagnes promotionnelles, met l’accent sur l’aspect symbolique. L’entreprise belge Baunat, entre autres, souligne sur son site Internet que les diamants de laboratoire ne posséderont jamais la valeur émotionnelle des naturels. L’orfèvre et créateur de bijoux anversois Wim Meeussen les évite également pour cette raison et souligne le côté romantique des joyaux extraits: «Vous portez un produit naturel rare qui a eu besoin de millions d’années pour voir le jour.» Le message est clair: l’amour éternel ne s’exprime pas avec un matériau créé en un claquement de doigts. Les consommateurs semblent suivre ce raisonnement et, dans les enquêtes, qualifient ces nouveaux venus de moins magiques et authentiques. «La différence de perception est énorme, confirme Ellen Joncheere. Et à raison. Si vous recevez une bague avec un diamant de labo lors de vos fiançailles, mais que vous ne le découvrez qu’au moment du divorce, ne vous sentirez-vous pas trompé? Les diamants naturels ont un ADN plus unique que les lots cultivés qui ont tous été créés selon les mêmes paramètres. Les Millennials ne pensent toutefois pas que ces gemmes sont uniquement réservées aux bagues de fiançailles et aux alliances, et ils en achètent de plus en plus souvent pour eux-mêmes. J’imagine que l’aspect symbolique et émotionnel compte alors moins.»

Dans tous les cas, le consommateur n’achète jamais seulement un diamant, mais un bijou, clame-t-on chez Kubini. «Celui-ci acquiert sa signification grâce à l’histoire qui est derrière, explique Kaat De Groef. L’occasion, les souvenirs qu’il évoque, la personne qui nous l’offre: c’est ce qui lui donne une valeur personnelle et émotionnelle.»

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