Trop aigue, trop nasillarde. Trop mielleuse ou trop téléphone rose. Jamais assez grave ou trop douce. La voix des femmes et les inflexions qu’elle revêt peinent à se faire entendre. C’est qu’elles sont nombreuses à avoir avoué s’être déjà senties «mal dans leur voix».
Dont acte. Afin de rentrer dans les codes d’audibilité, les timbres féminins changent de fréquence. Ils sont mis sous contrôle, manipulés et transformés. Ainsi, plus de 60% des Américaines de 18 à 25 ont adopté le fameux vocal fry de la Valley Girl, comprendre une compression des cordes vocales pour adopter une tessiture plus grave, à la sonorité grésillante. Une tendance dommageable car une étude menée par l’université Duke a mis en lumière que les personnes utilisant le vocal fry ont toutes été jugées «moins dignes de confiance et moins instruites» dans le cadre d’un entretien d’embauche par exemple.
Si on s’intéresse au phénomène dans ces pages, c’est qu’au final cette préférence d’écoute révèle de nos sociétés une vision binaire et genrée de nos registres vocaux où les voix d’hommes font la loi et celles des femmes portent à peine. Et de cette vision dichotomique découle une réalité inégalitaire. Où l’un est au-dessus, et l’autre en dessous. Où l’un a droit à la parole et l’autre au silence, ou à l’écoute, au «care».
Mais pour que dialogue il y ait, alternance entre parole et silence doit se faire. Peut-être serait-il temps de la mettre en sourdine pour laisser d’autres fréquences nous parvenir.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici