Edito | « L’art du voyageur véritable n’est-il pas de faire de chaque endroit, aussi proche soit-il, une aventure ? »

A quoi mesure-t-on le dépaysement? Si l’on s’en réfère au dictionnaire, il s’agit d’un état qu’on atteint dans un pays ou une région «très différents de ceux où l’on habite par le décor, le climat, les habitudes». Mais faut-il forcément franchir des frontières pour se trouver ainsi transporté?

Certes, on n’y trouve ni camélidés, ni Bédouins, mais par un jour de grand soleil, les dunes du Sahara de Lommel n’ont (presque) rien à envier à celles du désert, tandis qu’avec son eau émeraude bordée de conifères, le lac de Nisramont ressemble à s’y méprendre à ces paysages qui donnent envie de prendre un billet pour le Canada sur-le-champ.

Nul n’est prophète en son pays, on le sait, mais il est parfois dommage de constater à quel point la réputation de la Belgique en tant que destination touristique trouve un écho plus retentissant à l’étranger. On se presse des quatre coins du monde pour venir admirer Bruxelles, Bruges ou encore Gand, tandis que les sujets de ce royaume rempli de richesses architecturales, eux, préfèrent sauter dans un vol bon marché vers l’une ou l’autre ville peut-être tout aussi jolie, mais où les gaufres sont moins moelleuses, c’est garanti. 

C’est bien connu, le journalisme mène à tout, même, dans le cas d’une ancienne collègue française, de la Bretagne à une antenne locale de La Meuse. Et tandis que les gratte-papiers liégeois qui l’entouraient passaient leurs week-ends dans un périmètre réduit autour de leur domicile, elle en profitait pour explorer la Belgique. Et partager chaque lundi matin à la machine à café des récits de destinations d’autant plus incroyables que certaines, pourtant jamais visitées par ses interlocuteurs, ne se trouvaient qu’à un jet de pierres de la Principauté.

Partir loin, mais sans enquiller les kilomètres pour autant, n’est-ce point là l’évasion suprême? N’importe qui peut changer de décor en s’envolant à l’autre bout du monde, mais l’art du voyageur véritable n’est-il pas de faire de chaque endroit, aussi proche soit-il, une aventure? Dieu sait que notre pays, bien que petit, ne manque pas de diversité ni de possibilités d’alterner entre villes, plages et forêts, avec, au gré des frontières linguistiques, l’opportunité de se croire d’autant plus loin que les bribes de conversation qui nous parviennent sont dans une autre langue que la nôtre. 

Et si, d’aventure, quitter le pays vous démangeait vraiment, il y a fort à parier que vous trouverez votre prochaine destination plus ou moins lointaine dans les pages qui suivent. Entre volontourisme aux Îles Féroé, safari en Afrique ou déconnexion totale dans les Alpes, ce numéro spécial, rassemblant 15 expériences inoubliables, testées (et approuvées) par nos journalistes, est une invitation à l’évasion, mais aussi au rêve. Celui d’un ailleurs imaginaire ou réel, loin, très loin du quotidien et de son rythme effréné. Bons voyages!