poverty play
La mode et le jeu dangereux du poverty play - Getty Images

Le poverty play, quand la mode exploite la pauvreté à prix d’or

Kathleen Wuyard
Kathleen Wuyard Journaliste & Coordinatrice web

Cela faisait longtemps que la colère grondait en sourdine, mais un TikTok devenu viral a mis le feu aux poudres et fait exploser la tendance poverty play en ligne.

Soit, littéralement, le jeu de la pauvreté, ou la propension de jeunes mordus de mode aux comptes en banque généreusement garnis de s’habiller de vêtements usés jusqu’à la corde, voire même sciemment salis. Exemple parfait du poverty play? La sneaker en piètre état vendue pas moins de 1 450 euros l’année dernière par Balenciaga.

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Sauf qu’ainsi que le rappellent les (nombreux) détracteurs du phénomène, être pauvre n’est pas un parti pris stylistique, et le poverty play rappelle que tout le monde n’a pas conscience de jouer avec des cartes (Platinum) plus avantageuses que les autres.

Pauvres petits riches

Ainsi que le dénonce la jeune TikTokeuse à l’origine du compte H4ck.mag, dédié à décoder « le monde 3.0 de Berlin », la capitale allemande, souvent qualifiée de « pauvre mais sexy », est un des épicentres du jeu dangereux du poverty play. Lequel s’y présente sous la forme de « personnes privilégiées qui donnent l’impression d’être pauvres pour avoir l’air plus cool », la tendance adoptée par Balenciaga se retrouvant « partout à Neukölln et à Kreuzberg », deux des quartiers berlinois les plus branchés du moment, le plus souvent désignés du surnom portemanteau de Kreuzkölln.

@h4ck.mag

Famously, Berlin is ‘poor but sexy’ 😏 #berlintok #berlintechno #clubbing #berlin #armabersexy #anticapitalism

♬ original sound – H4CK
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D’après la TikTokeuse, ces quartiers de la capitale grouilleraient de « personnes en vêtements usés, qui boivent des bières bon marché en se plaignant des prix de l’énergie et de la hausse des loyers, ce qui est notre lot à tous, sauf que quand on voit leur Instagram, on réalise tout à coup qu’ils sont extrêmement aisés ».

Et de pointer à quel point l’esthétisation des classes inférieures, qui répond au nom de poverty play mais qui est également identifiée comme « recession core » ou « poor look », est problématique. C’est qu’au lieu de faire changer les choses, et de bousculer le status quo défavorable aux personnes agrippées aux échelons inférieurs des revenus, cette tendance à prétendre être pauvre le maintient et ne fait de bien à personne. Sauf aux marques qui vendent les incontournables de l’uniforme du faux working class hero? Théorisé par Stratégies en 2017 déjà, le concept de premium mediocre et son esthétique décrite par nos confrères de Libération comme étant « à base de streetwear nul siglé des marques les plus prestigieuses » permettrait « d’infuser le luxe, le vrai, celui qui fait rêver les classes moyennes sur Instagram… Tout est bon pour s’encanailler ». Mais aussi pour parvenir à vendre plus de 1.000 euros des baskets qui semblent tout juste bonnes pour la poubelle…

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