Ménopausées: pour briser l’ultime sujet tabou lié à la féminité

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Aurélie Wehrlin Journaliste

Ces dernières années, le voile s’est levé sur le désir féminin, les règles, la grossesse, la maternité, la non-maternité. Même les violences faites aux femmes sont enfin au coeur des enjeux de société. Un seul tabou lié à la féminité semble persister, celui de la ménopause et de la révolution qu’elle provoque et signifie chez chaque femme. Un documentaire propose de « libérer la parole », comme on dit beaucoup en ce moment, pour que le sentiment de fatalité et de honte qu’elle génère le plus souvent chez les femmes, la moitié de l’humanité, ne soit plus.

Surnaturel, panique, perte de contrôle, colère, honte… les mots sont forts pour qualifier cet état transitoire vécu par chaque femme au moment de la ménopause. Car celui-ci n’est pas seulement celui de l’arrêt de l’activité des ovaires et donc des règles. Il signifie bien plus. Et symboliquement et physiquement. C’est à propos de tout cela que Blandine Grosjean – autrice notamment en 2018 d’un documentaire sur la zone grise, cette zone entre viol et relation consentie – a voulu faire parler ces sept intervenantes, âgées de 51 à 63 ans, toutes désormais ménopausées.

Chacune revient sur le traumatisme qu’a été ce moment, mais aussi sur le basculement vers l’invisibilité, du côté des vieilles, de la non-séduction, et non plus des femmes

Chacune revient sur le traumatisme qu’a été ce moment, mais aussi sur le basculement vers l’invisibilité, du côté des vieilles, de la non-séduction, et non plus des femmes. Le décalage entre la plénitude intellectuelle que la femme peut atteindre à cette période de sa vie, et le déclin physique qui s’amorce. Et comme ça semble en être fini du physique et de son pouvoir, la tête à tête avec ce qui reste, à savoir ce que l’on est vraiment.

Mais pour certaines femmes c’est aussi un soulagement que d’être enfin débarassée de ses règles, une renaissance, et l’entrée dans un âge où on peut faire de nouvelles expériences, s’épanouir, rencontrer l’homme de sa vie. La découverte d’une liberté où elles n’ont plus rien à prouver. Un moment pour vivre pleinement.

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Ces confidences filmées par Joëlle Oosterlinck – autrice de documentaire sur Claire Bretécher, sur la bande dessinée érotique ou encore sur le mythique cinéma Action – dans la nature, au bord de la mer, dans un sous-bois. À l’écart de la société, de tous regards inhibiteurs.

Des témoignages francs, émouvants, mais aussi révoltants, notamment vis à vis de la société et son déni de ce moment crucial que vivent les femmes

Des témoignages francs, émouvants, mais aussi révoltants, notamment vis à vis de la société et son déni de ce moment crucial que vivent les femmes. Un documentaire à l’adresse des femmes, de celles qui s’apprêtent à travers cette épreuve, celles qui l’ont traversé et qui trouveront sans doute un écho à leur propre expérience souvent vécue dans un repli gêné, voire honteux. Mais aussi aux femmes beaucoup plus jeunes, pour savoir. Et peut-être encore plus à l’entourage, la famille, les employeurs, tout le monde, en somme, pour mieux comprendre. Alors que la nostalgie d’un titre délicat d’Albin de la Simone ouvre ces 52 minutes, un sifflement guilleret le clôture, comme un soupir de soulagement d’avoir ouvert son coeur, un retour à la légèreté.

Ménopausées, de Blandine Grosjean et Joëlle Oosterlinck, jeudi 6 mars 2020 à 22h30, puis sur la plateforme Auvio >>> www.rtbf.be/auvio/emissions/detail_doc-shot

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