Comment l’apparence physique est devenue le sujet à éviter (et c’est tant mieux)
« On ne peut plus rien dire », grommellent en choeur les racistes, les misogynes… Et vos proches, pourtant bien intentionnés? C’est qu’à l’aube de 2024, les commentaires sur l’apparence ne passent plus. Et c’est tant mieux.
« Oulala, t’as des petits yeux toi, t’as bien dormi? », « Mais dis, tu as fondu, c’est dingue! », voire même, « Attention, tu as une grosse tache sur l’arrière de ton pantalon »: le temps d’une journée, sans y penser et le plus souvent de manière bien intentionnée, les occasions de commenter l’apparence des gens qui nous entourent ne manquent pas. Et pourquoi s’en priver: après tout, quand vous faites remarquer à quelqu’un que vous savez au régime que ses efforts paient, c’est gentil, non? Et si votre mère (toujours elle) vous dit que vous avez une petite mine, c’est parce qu’elle vous aime et qu’elle s’inquiète, n’est-ce pas? Probablement. Certainement, même. Reste que pour les personnes qui reçoivent ces remarques, elles ont le plus souvent tout sauf l’effet escompté, voire même, dans certains cas, ce qui se veut être un compliment peut s’avérer extrêmement blessant. À commencer par les commentaires sur une éventuelle perte de poids.
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Un problème de taille
Lesquels sont toujours plus décriés, un chorus de nutritionnistes, spécialistes des troubles du comportement alimentaire (TCA), thérapeutes et autres influenceurs répétant à l’envi les raisons de s’abstenir à tout prix de faire remarquer à quelqu’un qu’il ou elle a minci. D’abord parce que complimenter une perte de poids contribue à renforcer la conviction que plus un corps est svelte, mieux c’est. « Cela conditionne notre valeur en tant qu’humains à la taille qu’indiquent les étiquettes de nos vêtements » regrette la spécialiste en TCA Shira Rosenbluth. Qui rappelle également que les kilos en moins en question peuvent être dûs à un événement traumatique, une maladie ou encore anorexie, boulimie et autres troubles.
« Une amie plutôt ronde a fait une rechute anorexique récemment. En peu de temps, elle est passée d’une silhouette considérée comme en surpoids à un corps correspondant plus aux standards de beauté. Chez des personnes fortes, on ne soupçonne jamais l’anorexie, mais les gens qui la complimentent sur ses efforts renforcent sans le savoir sa relation toxique à la nourriture »
Shira Rosenbluth
Parmi les raisons de s’abstenir, Lauren Cadillac, alias « La diététicienne feel good » sur Instagram, pointe également le fait que ces compliments contribuent à la propagation de la grossophobie, tout en suggérant de manière indirecte que la personne était moins belle avant d’avoir perdu du poids. « Certaines personnes lorsqu’elles subissent un stress psychologique important (deuil, perte d’emploi, traumatisme…) perdent du poids.
Elles rencontrent des difficultés à s’alimenter dues à leur mal-être. Il est surement probable qu’elles n’aient pas envie de recevoir des remarques sur leur poids qui vont faire écho avec leur souffrance » recommande encore l’équipe de la plateforme Nutrisimple. Qui recommande plutôt de valoriser les qualités humaines de la personne que vous souhaitez complimenter.
« Avec un peu d’entrainement, vous vous rendrez compte que des louanges type ‘tu es drôle, à l’écoute,…’ sont plus gratifiantes que les commentaires sur l’apparence physique ».
Et ce changement de perspective vaut certainement aussi pour la litanie de commentaires relatifs à toute forme de fatigue visible.
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Apparences trompeuses
Si, en cas de bâillements à répétition, celle-ci peut sembler évidente, la plupart du temps, ces remarques se concentrent plutôt sur l’apparence, qu’il s’agisse du teint, des cernes, ou autres caractéristiques physiques. Dans la majorité des cas, la personne à qui on fait la remarque n’a d’ailleurs même pas eu le temps d’ouvrir la bouche, les « tu as une petite mine » faisant souvent suite aux salutations. Résultat? Même si cela part d’un bon sentiment et d’une inquiétude réelle, l’effet s’apparente à dire à l’autre qu’il y a un souci avec son apparence, voire même, qu’il ou elle est laid·e. « Personne n’a bel air en étant fatigué, donc si vous dites à quelqu’un qu’il l’est, cela équivaut à dire que la personne ne présente pas bien » pointe la créatrice de la plateforme Pursuit of Life, Jackie. Qui souligne également qu’a-delà de l’aspect esthétique, la remarque en elle-même n’a aucun sens.
« Personne ne peut se transformer en quelqu’un de frais et dispo en 30 secondes chrono. Si la personne a l’air fatiguée, c’est qu’elle l’est, et il lui faudra au minimum une bonne nuit de sommeil, sans compter de l’exercice, un bain chaud et moins de stress pour avoir l’air plus reposée »
Jackie.
Raison pour laquelle il vaut mieux s’abstenir – et pas seulement en cas de cernes visibles.
15 secondes chrono
Invitant ses centaines de milliers de followers à « être plus conscients » et « éviter de juger les autres sur leur apparence », l’équipe de Psychologue.net invoque la « loi des 15 secondes » pour cadrer les commentaires relatifs au physique, à l’habillement ou autres.
Le principe? Si vous comptez faire un commentaire à quelqu’un sur son physique mais que la personne ne peut pas changer ce sur quoi vous comptez commenter endéans les 15 secondes, abstenez-vous. S’il s’agit d’un peu de rouge à lèvres sur la canine, par exemple, ou d’une tache de stylo sur la main, la personne peut rapidement y remédier – et vous sera probablement très reconnaissante de l’avoir souligné.
S’il s’agit d’une prise de poids ou d’une perte de cheveux, par exemple, non seulement l’autre ne pourra pas y remédier dans l’instant (voire même, du tout) mais en prime, vous risquez de causer de la souffrance inutile.
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