La musculation, un moyen pour les femmes de trouver l’équilibre: « la salle est mon échappatoire »

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La musculation s’est fortement démocratisée auprès des femmes depuis quelques années. Les motivations sont variées, allant de l’esthétique à l’amélioration des performances en passant par la recherche du bien-être, parfois non sans obstacles.

« La salle de sport, c’est mon échappatoire », confie Nell, 23 ans. Pratiquante depuis trois ans, elle a commencé la musculation dans le but de perdre du poids. « Et depuis, je n’ai plus vraiment arrêté. Ça m’apporte du bien-être et ça me permet de lâcher prise car mon travail me procure une lourde charge mentale. Je me libère comme cela. »

Se reconnecter à soi et à son corps après le travail, c’est aussi un incontournable pour Sandra, 54 ans, qui a découvert le monde de la musculation il y a quinze ans, en vacances. A son retour, elle a installé petit à petit une salle de sport à domicile. Aujourd’hui, elle alterne cardio et musculation, indissociables selon elle. « La musculation est nécessaire pour enrayer la fonte musculaire due à l’âge et cela me permet de compenser la sédentarité imposée par le travail et l’évolution de notre société en général, observe-t-elle. Le mouvement c’est la vie ! »

Pour elle, la musculation est une excellente discipline pour connaître son corps, son anatomie et son fonctionnement. « C’est très instructif de savoir quel muscle travaille, quel mouvement entraîne quels effets positifs ou négatifs. L’expérience amène un côté créatif, car on cherche de nouveaux exercices, de nouvelles sensations.»

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Des bienfaits que confirme Anne-Françoise Lambrecht, coach sportive depuis deux ans, notamment au Basic Fit Jourdan à Etterbeek et à Waer Waters: « La musculation peut apporter une meilleure conscience du corps et une meilleure estime de soi.»

Dans un même ordre d’idée, Philippe Godin, professeur émérite à l’UCL et psychologue du sport souligne également l’importance de la motivation dans ce genre d’activité. « Il y a cette motivation d’appartenir à une communauté. On peut être motivée parce que les copines le font aussi. Cela a un impact sur l’estime de soi, parce qu’on fait partie de la norme. »

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Des réticences entretenues par des stéréotypes de genres

Les stéréotypes ont néanmoins la vie dure du côté de la musculation. Dans un monde où cette discipline a longtemps été (et reste encore parfois) considérée comme « un sport de mec », « de la gonflette », voire « une pratique dangereuse », il y a de quoi tourner les talons quand on est une femme. Les coachs sont d’ailleurs unanimes : leurs clientes ont peur de perdre leur féminité et craignent de ne pas en faire assez.

Un manque de confiance et de connaissances que regrette Anne-Françoise : « Je trouve que souvent, on ne pousse pas les femmes à croire en leurs capacités physiques. Quand je propose un exercice et que je demande à ma cliente d’estimer le nombre de répétitions qu’elle pourra faire, elle se sous-estime toujours, contrairement à un homme. »

Cela a été le cas pour Nell : « Au début, j’étais assez mal à l’aise parce que je voyais les gens autour de moi qui avaient beaucoup plus de facilités. Je ne savais pas spécialement ce que je devais faire, par où commencer. Je n’étais pas très à l’aise avec mon corps donc c’était difficile de voir des personnes plus fit. Aujourd’hui, je suis super contente de la silhouette que j’ai et je me rends compte que je viens de loin.»

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Faire le premier pas dans une salle de sport

Se lancer peut dès lors s’avérer un vrai challenge : affronter un environnement nouveau dans lequel il faudra s’y faire sa place, faire le tri de toutes ces informations parfois contradictoires et se forger une carapace afin de ne pas se comparer.

« Certaines me disent qu’elles se sentent plus mamans ou plus femmes, plus fortes aussi. Elles portent plus facilement leur enfant et se sentent mieux dans leur peau.»

Parfois, il faut juste « oser » rassure Florian Fischbach, coach sportif depuis sept ans travaillant entre autres au Basic Fit Jourdan à Etterbeek et au centre sportif de l’OTAN. Et d’insister sur l’importance de se renseigner. Si notre psychologue reste réticent quant aux informations trouvées sur Internet – car très généralistes, elles ne tiennent pas compte de l’originalité et l’unicité de chaque individu -, il partage également cet avis. Comme dans tout domaine, pour le maîtriser et bénéficier de tous ses effets, la sensibilisation, l’éducation et l’expérimentation sont les clés du succès.

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Et cette réussite est bénéfique tant pour le corps que l’esprit, c’est la magie du sport. Anne-Françoise le constate parmi ses clientes : « Certaines me disent qu’elles se sentent plus mamans ou plus femmes, plus fortes aussi. Elles portent plus facilement leur enfant et se sentent mieux dans leur peau.»

Et loin des clichés, Sandra remarque que, même si la salle de sport reste un endroit très masculin et qu’il y a un certain scepticisme de la part des hommes, « rapidement, le respect mutuel s’installe » : « Entre sportifs, nous sommes tous égaux. On s’entraîne, donc on partage des choses. Hommes et femmes, de toutes origines et professions. Toutes ces distinctions disparaissent, tout est laissé au vestiaire. »

Selon Anne-Françoise, les dérives sont liées aux clichés qui persistent dû à une grande ignorance sur ce qu’est la musculation. Comme dans tous les sports, certains pratiquants font des compétitions, s’entraînent beaucoup et sont susceptibles de prendre des produits. « Pourtant rares sont ceux qui diabolisent le cyclisme, alors que certains cyclistes se dopent. On diabolise plus facilement la musculation. Peut-être parce que c’est une pratique populaire »

L’excès nuit en tout

Mais comme dans tous sports, la ligne entre recherche du bien-être et obsession malsaine peut être fine. Certaines peuvent alors utiliser tous les moyens pour parvenir à leur objectif.

Florian met en garde sur cette obsession du « jamais assez » : « Il ne s’agit pas uniquement de se dépenser à la salle, mais également de changer ses habitudes quotidiennes. C’est un réel travail sur soi. »

Philippe Godin remarque lui, bien qu’il n’y soit pas souvent confronté, une augmentation des cas d’addictions : « La musculation c’est le sport qui permet de travailler l’image du corps et on peut lier cela à l’envie de correspondre à certains critères de la société. » Et au vu des canons de beauté que notre monde véhicule encore trop envers la gent féminine, cette dérive peut être rapidement présente chez les femmes.

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Un constat très paradoxal quand on sait que ce culte du corps s’inscrit dans une société qui fonce vers l’obésité. Et le terrain de jeu préféré des paradoxes, c’est les réseaux sociaux. La musculation, de par son côté esthétique y est énormément relayée. Physiques entretenus, hors-normes et (parfois) retouchés, c’est la porte ouverte aux frustrations et à la culpabilité lorsqu’on débute.

Pour Florian, il est important de prendre conscience de la tendance à embellir les choses en ligne : « Si l’on se base uniquement sur les écrans, on peut imaginer que la norme est nettement supérieure à soi. Il s’agit de confiance en soi et de perception erronée de la réalité, les deux étant étroitement liées. »

Être bienveillant avec soi-même et se respecter, c’est ce qu’il prône : « Finalement nous n’avons pas tous le même parcours. J’encourage donc chaque personne pratiquant de la musculation ou non, à faire ce travail sur soi au quotidien, car une personne consciente de soi et en bonne santé mentale, pourra atteindre ses objectifs plus aisément et peut-être réalisera qu’en fin de compte, elle était dans une obsession malsaine. Dans cette réalisation, on cherche finalement à se plaire à soi-même avant de plaire aux autres donc on se détache de cette obsession. »

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Comment bien s’encadrer ?
Philippe Godin constate un manquement dans la profession de coach sportif, de par le statut non protégé en Belgique et de par la démocratisation de la pratique sur les réseaux sociaux : « Tout le monde peut s’auto-baptiser coach, donc c’est la porte ouverte aux mauvaises pratiques. » Trouver un bon coach, comme pour toutes les branches médicales peut donc prendre du temps. Certains ont des spécificités, des méthodes qui conviennent à l’un et pas à l’autre. Un bon coach est avant tout une personne passionnée, qui s’informe et qui aime transmettre et se remettre en question. Le coach a étudié la théorie pour la mettre en pratique, mais celle-ci n’est pas à 100% fiable, car elle va dépendre de l’unicité de chaque personne. Des détails peuvent l’impacter. C’est le rôle du professionnel de trouver des ajustements. Il est donc important de se renseigner, notamment auprès du corps médical, afin de nous guider. La plupart des salles, comme chez Basic Fit notamment, propose aussi des fiches signalétiques reprenant notamment les diplômes de leurs collaborateurs.

Quid des compléments alimentaires ?
Parmi les stéréotypes liés à la musculation, les compléments alimentaires détiennent surement la palme d’or. Et cela englobe un problème plus important selon nos coachs. «De nos jours, on ne sait plus ce qui est bon ou pas pour notre organisme, en termes de nutriments, pour être en bonne santé et éviter les carences, analyse Florian. On vit dans une société de surconsommation liée à une obésité grandissante, alors forcément, on trouve beaucoup de marketing autour de la perte de poids ou du gain musculaire. Il faut donc faire attention à la publicité mensongère de certains compléments ». Si les compléments restent, comme leur nom l’indique, secondaires d’un point de vue santé, ils peuvent aider. « Dans l’optique de performance, quand on brûle énormément de calories, il se peut que manger ne soit pas suffisant pour apporter au corps ce dont il a besoin pour la récupération et donc l’optimisation des entrainements, poursuit notre interlocuteur. C’est là qu’ils peuvent intervenir. » Et de recommander également de lire les dernières études et de s’informer auprès de personnes compétentes dans la nutrition et diététique.

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