Règles: que faire en cas de fortes douleurs (et sans congé menstruel) ?

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Eva Kestemont
Eva Kestemont Journaliste Knack Weekend

Pour les femmes belges, il n’y a, pour l’instant et contrairement à d’autres pays d’Europe, pas la possibilité d’avoir un « congé menstruel ». Mais que peuvent-elles faire si leurs règles les mettent dans un tel état qu’elles ne peuvent pas aller travailler ? Cinq questions à Lieselot Theys, ostéopathe spécialisée dans le domaine gynécologique.

Les femmes belges doivent-elles envier leurs homologues espagnoles, qui auront bientôt droit à trois jours de congé menstruel, ou ce congé est-il inutile ? Nous avons posé la question à Lieselot Theys, ostéopathe spécialisée dans les problèmes tels que l’endométriose et le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK). Et en bonus, voici aussi quelques bons conseils.

Quelles plaintes liées aux menstruations sont normales et lesquelles ne le sont pas ?

Vos règles devraient être indolores et régulières, ne pas causer de fatigue supplémentaire ni déséquilibre émotionnel avant ou pendant les saignements. Une légère douleur au niveau du bas-ventre ou du bas du dos peut survenir, mais elle ne doit pas être fonctionnelle ou socialement contraignante et doit être résolue avec un analgésique léger. Si la douleur s’aggrave avec l’âge, ou si elle est si forte que les analgésiques ne font pas effet et que vous ne pouvez pas aller travailler, c’est qu’il a quelque chose qui ne va pas. Cette douleur peut indiquer une infection sous-jacente ou une endométriose. Des symptômes tels que des saignements abondants, des caillots de sang dans le liquide menstruel, du sang de couleur trop foncée, un cycle irrégulier et des périodes de saignement très longues devraient aussi être surveillés et peuvent indiquer un déséquilibre hormonal ou une réponse inflammatoire aux fluctuations hormonales. Dans la même catégorie, on trouve également le fameux syndrome prémenstruel (SPM), c’est-à-dire le large éventail de troubles qui apparaissent avant les règles proprement dites : maux de tête, acné, rétention d’eau, seins sensibles, fatigue, irritabilité, troubles intestinaux, douleurs dans le bas du dos, etc.

Combien de femmes en Belgique souffrent de troubles menstruels au point de ne pas pouvoir travailler ?

On estime qu’une femme sur trois ne peut pas travailler pendant un certain laps de temps chaque mois en raison des douleurs menstruelles. Mais pour moi et en me basant sur mon expérience pratique, ce chiffre est sérieusement sous-estimé et peut s’expliquer, d’une part, par le tabou qui entoure le sujet – qui parle de son cycle avec son médecin traitant, son gynécologue, son partenaire ou ses amis ? – et d’autre part parce que ces plaintes sont énormément banalisées. Combien de fois n’entend-on pas le prestataire de soins (ou la mère, la tante, le père, l’ami) disant quelque chose du genre « ça doit être les hormones ». Mais ce que les gens oublient trop souvent, c’est qu’il s’agit non pas d’hormones, mais d’un problème hormonal, tout comme l’est une thyroïde qui fonctionne lentement ou une déficience en testostérone chez les hommes.

Les femmes qui se sentent malades peuvent-elles demander un certificat de maladie à leur médecin ?

C’est certainement une option, car les troubles menstruels peuvent cacher quelque chose de plus sérieux que ce que l’on considère encore trop souvent comme une « petite douleur ». Mais il faut aussi aller plus loin que ces quelques jours de repos. Si pendant une certaine période de votre cycle vous êtes percluses de douleurs, vous devez en chercher la cause. Et c’est là que le bât blesse aujourd’hui. Je ne jette pas la pierre à ces femmes qui sont sorties confuses ou frustrées de la salle de consultation, avec le sentiment de ne pas être entendues ou incomprises. Les médecins ne sont généralement contraires et veulent aider, mais ils ne comprennent pas toujours ce que vous voulez vraiment dire ou demander. Les douleurs ou les plaintes menstruelles sont des termes très vagues aux oreilles d’un professionnel de la santé. Il peut donc être utile de bien préparer la communication et de parler en termes très concrets. Par exemple, en disant des choses très concrètes comme « Je perds … ml de liquide pendant mes règles, ce qui est bien supérieur à la moyenne », ou « J’ai d’énormes douleurs pendant mes règles et quatre Dafalgans par jour ne m’aident pas suffisamment pour pouvoir faire mon travail », ou « Serais-je atteinte d’endométriose, car mes symptômes de douleur s’aggravent progressivement ? Pouvons-nous chercher cela ensemble ? Pouvez-vous me recommander ?

Avez-vous des conseils pour mieux supporter la douleur et les autres symptômes ?

Mon meilleur conseil est de jouer au détective. Pendant un certain temps, observez votre cycle et découvrez ce qu’il a à vous dire. Tenez un registre des menstruations pendant environ trois mois. Plus vous en direz sur votre cycle, plus vite votre médecin sera en mesure de poser un diagnostic correct.

Ensuite, de manière plus générale, voici quelques conseils qui peuvent aider à soulager les douleurs menstruelles :

– Contactez un médecin spécialisé ou un ostéopathe. Ensemble, ils peuvent rechercher la cause sous-jacente. L’ostéopathe peut également vous aider à communiquer avec votre médecin ou votre employeur.

– Prenez quotidiennement un supplément contenant du curcuma ou des oméga 3. Celle-ci a un effet anti-inflammatoire, et donc indirectement analgésique.

– Adaptez vos activités quotidiennes à votre cycle : dans la deuxième partie du cycle, privilégiez les activités calmes comme le yoga, la natation, la marche ou le Pilate. La première partie de votre cycle est par contre idéale pour l’entraînement musculaire.

– Mangez des aliments anti-inflammatoires et essayez en même temps d’éliminer les facteurs déclenchants de votre régime alimentaire. L’alcool, les sucres rapides, le gluten et le lactose peuvent être des coupables. L’ail, l’oignon, le gingembre, les noix, le poisson, les légumes verts sont par contre de précieux alliés.

– Les thés tels que le thé à la feuille de framboise, le thé à l’achillée ou le thé à l’ortie aident à réguler le cycle hormonal de la femme.

– Prenez un bain chaud ou placez une bouillotte chaude sur le bas-ventre. Plus la circulation sanguine est bonne dans le bas-ventre, plus les déchets sont évacués rapidement, ce qui fait disparaître plus rapidement la douleur.

– Dormez suffisamment. Lorsque le sommeil est de qualité, cela améliore la résistance aux stimuli externes ou à la douleur.

– Ne soyez pas trop stricte avec vous-même et prenez éventuellement du repos supplémentaire pendant la période menstruelle. Une femme passe par des montagnes russes hormonales à plusieurs reprises au cours du mois. Cela demande de l’énergie.

– Faites confiance à votre corps : votre corps veut être en bonne santé. Si ce n’est pas le cas, cela signifie quelque chose. Choisissez un plan de traitement auquel vous faites confiance et restez-y fidèle. Soyez patient.

Le  congé menstruel une bonne idée ?

Je ne suis ni totalement pour, ni complètement contre. Vos règles ne sont pas seulement des règles. Elles sont le reflet de votre santé. Si vos hormones sont équilibrées, vous aurez des règles normales et régulières. À l’inverse, si vous avez des règles abondantes, vos hormones essaient de vous dire quelque chose. Lorsque la santé d’une femme décline pendant un certain temps, elle le remarque dans son cycle menstruel. La cause peut être un problème temporaire (pensez à une période de stress au travail, un régime alimentaire strict ou une grippe) et ne reflète pas nécessairement un problème majeur. Mais il peut aussi signaler que vous souffrez de stress chronique, d’une maladie de la thyroïde, d’une réponse immunitaire défectueuse (maladies auto-immunes, endométriose, etc.), de problèmes de coagulation, d’infections ou de problèmes digestifs avancés.

Plus important que la prise d’un congé menstruel, il s’agit de ne plus banaliser la douleur et les autres plaintes, et de ne pas les attribuer simplement aux « hormones ». Il existe suffisamment de méthodes de recherche pour étudier un problème de santé de manière plus approfondie et le traiter correctement. Si tel était le cas, beaucoup plus de femmes travailleraient activement sur leur santé, auraient moins de plaintes et auraient donc moins besoin de congés menstruels.

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