Edgar Kosma

Syndrome de vibration fantôme pour malades imaginaires 2.0

Edgar Kosma linktr.ee/edgarkosma

Au royaume des réseaux sociaux, les jours passent et ne se ressemblent pas. Entre les buzz et les likes, le vrai et le fake, Edgar Kosma scrolle le fil d’actu d’un siècle décidément étrange. Hashtag sans filtre.

Cela vous est sûrement déjà arrivé pour la simple raison que près de 90% d’entre nous sont touchés, à des degrés divers, du moins ceux et celles qui possèdent un téléphone portable et qui l’utilisent fréquemment en mode vibreur, ce qui fait peut-être un peu moins, mais finalement pas tant que ça. Je fais bien sûr référence au «syndrome de vibration fantôme» que l’on pourrait définir comme la perception que son smartphone vibre, alors que non, on a beau vérifier: aucune notification d’appel, ni de message, rien.

Si le terme d’hallucination peut nous angoisser, on ne peut pourtant nier qu’il est ici question d’une forme légère d’hallucination tactile, puisque le cerveau perçoit une sensation qui n’est pas réelle et donc imaginée. La plupart du temps, ce phénomène se produit quand on marche dans la rue, en regardant la télévision ou en utilisant un appareil bruyant comme un mixer, un marteau-piqueur ou les deux, ce qui est plus rare, je l’admets.

En toute logique, la première observation de ce «syndrome de vibration fantôme» a été faite au début des années 2000, alors que les Nokia et autres Motorola commençaient à pulluler et faire corps avec les néo-utilisateurs que nous étions. L’expression trouve sa première occurrence en 2003, dans un article de Robert D. Jones publié dans le New Pittsburgh Courier qui se concluait ainsi: «Ce phénomène croissant semble indiquer que nous avons peut-être franchi une limite dans cette société du toujours en marche.»

Vingt ans plus tard, notre société n’a jamais cessé d’avancer et le phénomène, qui ne s’est clairement pas estompé, n’est toujours pas complètement connu. Mais les recherches pointent trois facteurs psychologiques.

1. Le conditionnement: à force de recevoir des appels ou des notifications, notre cerveau primaire, tel le chien de Pavlov, associe le concept même de vibration à la réception d’un message et cette association, renforcée par la répétition incessante, conduit notre cerveau à être trompé par tout type de vibration.

2. La peur de manquer un appel ou un message qui amène notre cerveau à être plus attentif aux sensations de vibration, même lorsqu’elles sont imaginaires. Le phénomène toucherait donc plus les gens anxieux qui ont l’habitude de sauter sur leur téléphone dès qu’ils reçoivent un message souvent peu important d’un groupe WhatsApp.

3. L’attention sélective: lorsque nous nous concentrons sur un stimulus comme la sensation de vibration de notre téléphone, notre cerveau a tendance à privilégier les informations qui correspondent à cette attente. Une sensation de froid ou de pression sur la peau pourrait être interprétée à tort comme une vibration du téléphone.

Il reste une chose aussi étrange que le phénomène en lui-même: selon différentes études, 90% des personnes qui en ressentent affirment que ces vibrations imaginaires ne les dérangent pas ou peu. Un résultat qui peut être interprété de deux façons: soit ce syndrome n’est pas plus grave que le fait de se demander où sont nos lunettes alors qu’elles sont sur notre nez, soit on est tellement accro à nos notifications qu’on est prêt à s’acclimater des petits dégâts collatéraux, tel un toxicomane qui ne ferait pas toute une histoire d’une petite veine endommagée.

Quant à moi qui veille à votre bien-être, je ne me pardonnerais pas de vous dire au revoir sans vous prodiguer trois menus conseils.

1. Familiarisez-vous avec les différents sons de votre smartphone pour mieux les distinguer et permettre à votre cerveau d’éviter les confusions.

2. Réduisez le nombre de vos notifications: il y a là un vrai travail de désactivation des notifications inutiles et d’activation de celles qui vous semblent réellement pertinentes.

3. Instaurez des périodes de la journée où vous le mettez en mode silencieux, éteignez-le la nuit et ne le laissez pas venir dormir dans votre chambre comme un chat ou un chien.

Si vous m’avez lu jusqu’ici sans avoir été déconcentré par une notification, bravo, vous êtes sur la voie de la guérison!

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