Nicolas Balmet

Chronique: « Dans Le Silence des Agneaux, Anthony Hopkins n’apparaît que 16 minutes à l’écran »

Nicolas Balmet Journaliste

Dans cette chronique, rien n’est en toc. Chaque vérité, cocasse ou sidérante, est décortiquée par un journaliste fouineur et (très) tatillon qui voit la curiosité comme un précieux défaut.

Dans la nuit du 10 au 11 mars, aura lieu la 96e cérémonie des Oscars, cet événement scintillant où l’on distribue à la fois des statuettes et des gifles aux stars du septième art. Bien sûr, la majorité des Européens que nous sommes seront dans les bras de Morphée au moment des fameux « and the Oscar goes to… », mais ce n’est pas grave : on se rattrapera sur les réseaux sociaux en disant que la victoire d’Oppenheimer était prévisible, que Barbie aurait quand même mérité mieux, qu’on s’intéresse ENFIN aux réalisatrices féminines grâce à Anatomie d’une chute, que l’absence du film Super Mario Bros au palmarès est scandaleuse, et qu’Emma Stone a des yeux aussi beaux que son jeu, ces deux derniers avis étant plus personnels qu’universels.  

Question aux cinéphiles ici présents : qui donc peut me citer le nom du tout premier film récompensé par l’Academy of Motion Picture Arts and Sciences lors d’un dîner privé qui s’est déroulé dans un hôtel d’Hollywood le 16 mai 1929 ? Pas grand-monde, et je ne suis pas surpris. D’abord parce que la remise des prix ne dura pas plus d’une quinzaine de minutes, les 250 convives du dîner ayant préféré se concentrer sur le champagne et les petits-fours. Ensuite parce que cette cérémonie fut la seule, dans toute l’histoire des Oscars, à n’avoir été retransmise ni en radio ni en télé. Ceux qui ont répondu Les Ailes (Wings) ont donc tout mon respect, et je les invite à ma prochaine soirée « raclette et Trivial Pursuit ». 

Puisque je sens que vous aimez jouer, poursuivons ce petit entraînement en vue de ma soirée aux invités triés sur le volet (sorry, mais au prix où coûte le fromage à raclette, hein). Attention, question piège : Les Ailes fut à la fois le premier et le dernier film muet à être récompensé aux Oscars, vrai ou faux ? Roulement de tambour, musique de suspense hitchcockien… Et c’est faux ! Certes, dès la deuxième édition, le cinéma parlant a déboulonné le muet, et la cérémonie n’a plus jamais cessé de s’intéresser aux œuvres douées de parole. Sauf une fois ! C’était en 2012, et il s’agissait du film The Artist, qui a reçu la statuette du Meilleur film, tandis que Jean Dujardin est reparti avec celle du Meilleur acteur, prouvant qu’il y avait encore moyen de gagner des prix sans devoir apprendre le moindre texte. 

Traduction : quand on fait du cinoche, la paresse peut payer. Judi Dench l’avait déjà prouvé quelques années plus tôt en récoltant gracieusement l’Oscar de la Meilleure actrice dans un second rôle pour avoir incarné la reine de Shakespeare in Love… alors qu’elle n’apparaissait, en tout et pour tout, que 5 minutes et 52 secondes à l’écran ! Comme quoi, quand des parents répondent à leur môme rêvant de devenir comédien qu’il ferait mieux « de se trouver un vrai métier », ce n’est pas complètement absurde. Et ce n’est pas Anthony Hopkins qui me dira le contraire, puisqu’en 1991, le gaillard remportait le trophée du Meilleur acteur pour Le Silence des Agneaux alors qu’il n’était visible à l’écran que durant 16 minutes chrono… Perso, je m’inscris demain au cours Florent. 

Autre question, tiens, à propos de fainéantise : d’après vous, pendant combien de temps les acteurs oscarisés ont-ils le droit de s’exprimer lorsqu’ils vont chercher leur statuette sur scène ? Asseyez-vous : après 45 secondes à peine, l’orchestre se met à jouer et le micro est mis en OFF. Impossible, dès lors, de remercier plein de gens tout en dénonçant le réchauffement climatique, une guerre ou l’autre, et le prix exorbitant des places de concert de Beyoncé. Loin de moi l’idée de polémiquer, bien sûr, mais bon, écrire un discours de 45 secondes, c’est même à la portée de Jean-Michel (c’est mon poisson rouge) (et il est mort). Bref ! Maintenant que ce petit préambule est terminé, je vous laisse aller sur Vinted pour dégotter vos plus beaux habits dans l’éventualité où vous seriez invités à ma fête glamour (pas la guerre). Vous voulez un scoop ? La première question, juste après la raclette, sera celle-ci : pourquoi donc parle-t-on des « Oscars » du cinéma ? Et j’épouserai celui ou celle qui me donne une réponse irréfutable.

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