5 raisons de découvrir Malte

La Valette, ville fortifiée au riche passé culturel et aux quartiers populaires foisonnant de vestiges médiévaux. © DR
Philippe Berkenbaum
Philippe Berkenbaum Journaliste

Capitale européenne de la culture en 2018, La Valette est devenue la vitrine d’un archipel qui maîtrise l’art d’éblouir ses visiteurs. Ce n’est pas seulement la patrie de Corto Maltese, mais aussi une terre marquée par de nombreuses conquêtes à travers l’histoire qui lui ont forgé une identité unique.

Malte, c’est d’abord une situation géographique excep- tionnelle que peu de gens situent avec précision, avons-nous con-staté. Commençons donc par remettre ses églises ancestrales au milieu du village européen. Cet archipel de huit îles forme, sur 316 km2, le plus petit Etat membre de l’Union européenne – et le plus dense, avec 450 000 habitants. Situé à une centaine de kilomètres au sud de la Sicile en pleine Méditerranée, il partage la latitude de Monastir en Tunisie et s’enorgueillit du coup d’un ensoleillement exceptionnel de plus de 300 jours par an. C’est déjà une raison suffisante pour justifier deux heures et demie de vol quand la grisaille nationale donne des envies d’évasion.

Des ruelles taillées en escaliers, des façades en pierre calcaire jaune du pays où les volets et oriels colorés débordent de tous côtés.
Des ruelles taillées en escaliers, des façades en pierre calcaire jaune du pays où les volets et oriels colorés débordent de tous côtés.

Mais à Malte, même en plein coeur de l’été, lorsque le mercure menace l’intégrité des thermomètres, il souffle toujours une brise assez rafraîchissante pour qu’on ne se cantonne pas à profiter des seuls plaisirs de la mer ni à s’étaler comme des crêpes sur les plages rocailleuses. L’île est un musée à ciel ouvert dont on ne se lasse pas d’arpenter les villes et les villages, même en plein cagnard. La conception en damier de sa capitale n’y est pas étrangère : la perpendicularité parfaite des rues de La Valette permet au vent de s’y engouffrer sans obstacle pour réguler naturellement les températures. Il y fait donc agréable toute l’année. Pour le corps et surtout pour les yeux.

La co-cathédrale Saint-Jean, chef-d'oeuvre du baroque flamboyant.
La co-cathédrale Saint-Jean, chef-d’oeuvre du baroque flamboyant.

1. Visiter La Valette, capitale historique et culturelle

Construite au xvie siècle sur une presqu’île rocheuse, ceinturée par d’imprenables fortifications, La Valette doit son nom au Grand Maître de l’Ordre hospitalier de Saint-Jean de Jérusalem (connu comme l’Ordre de Malte) qui conduisit vaillamment la résistance face à l’envahisseur turc en 1565. Une originale expérience en 5D (la 3D + le mouvement des sièges + la brumisation, ne manque que l’odeur de la poudre – malta5d.com ) retrace l’histoire épique de cette île offerte à l’ordre par Charles Quint pour récompenser la protection armée qu’il accordait aux pèlerins en Terre sainte.

 » Une ville splendide sortie tout droit d’un rêve « , écrivait Walter Scott. Inscrite dès 1980 au Patrimoine mondial de l’humanité, cette petite cité d’à peine 7 000 habitants affiche la plus forte concentration mondiale de monuments historiques. On en recense plus de 320 et la plupart valent vraiment le détour. Citons la co-cathédrale Saint-Jean, premier édifice majeur construit par les Hospitaliers, chef-d’oeuvre du baroque flamboyant d’une richesse étourdissante dissimulé derrière une façade austère à deux clochers et qui abrite deux oeuvres célèbres du Caravage. Parlons des fameuses  » auberges  » censées accueillir à l’époque les chevaliers issus des grandes familles d’Europe selon leur origine (de France, de Bavière, d’Italie, d’Aragon…), disséminées dans la ville et affectées à des tâches plus contemporaines aujourd’hui mais qui illustrent bien les fastes des temps anciens – certaines se visitent toujours, d’autres s’admirent de l’extérieur. Evoquons encore le fort Saint-Elme, les magnifiques jardins de l’Upper Barrakka, le Palais des Grands Maîtres, le Teatru Manoel et bien sûr le port, le légendaire Grand Harbour et son Waterfront joliment rénové. Sans oublier le nouveau parlement moderne pensé par l’architecte Renzo Piano.

Les Trois Cités (ici Vittoriosa) formaient jadis la capitale avant son déplacement sur un rocher moins exposé.
Les Trois Cités (ici Vittoriosa) formaient jadis la capitale avant son déplacement sur un rocher moins exposé.

Mais ce qu’on aime surtout à La Valette, c’est se promener sans but à travers les ruelles, certaines taillées en escaliers, d’autres piétonnes et commerçantes, pour en admirer l’exceptionnelle architecture. Façades en pierre calcaire jaune du pays, volets et oriels colorés (ces fenêtres en baie cousines des bow windows anglais et situées aux étages) qui débordent de tous côtés, statues de saints nichées à chaque coin de rue, cabines téléphoniques so british – la Couronne a régné ici un siècle et demi durant, on roule d’ailleurs toujours à gauche… Et puis, il y a les terrasses des cafés et les restaurants typiques, où il fait bon siroter un vin du cru avant de passer à table pour un festival de produits de la mer ou d’autres spécialités locales, comme le légendaire ragoût de lapin à l’ail.

Une côte rocheuse qui cache une multitude de criques paradisiaques, qu'on n'atteint parfois qu'à pied ou par la mer.
Une côte rocheuse qui cache une multitude de criques paradisiaques, qu’on n’atteint parfois qu’à pied ou par la mer.

2. Arpenter les Trois Cités en voiturette électrique

De l’autre côté du Grand Harbour, les remparts de La Valette offrent un splendide panorama sur les Trois Cités médiévales d’en face, Senglea, Vittoriosa et Cospicua, qui formaient jadis la capitale avant son déplacement sur un rocher plus inexpugnable. Ces vieilles pierres parfois délaissées par les visiteurs abritent pourtant une vie locale aussi intense qu’attachante dans un véritable écrin architectural. Mais elles s’étendent sur un territoire trop grand pour en faire le tour à pied, d’où le dédain manifesté par les touristes pressés. Ils ont bien tort.

Un Belge, l’Anversois Kris Rycken, l’a compris et s’est associé avec une Maltaise qui a étudié en Belgique pour proposer une balade originale : le tour des Trois Cités en voiturette électrique, guidé par un iPad qui ne se contente pas d’indiquer le chemin mais délivre une foule d’informations audio et visuelles à chacune de 50 étapes du parcours (www.rolling-geeks.com). On fait le circuit à son rythme, en couple, en famille, entre amis ou en groupe (quatre places par véhicule), on s’arrête où et quand on veut, et on pénètre dans le coeur historique de Malte comme si on suivait un parcours de golf. C’est terriblement fun.

Au passage, on en profite pour faire une halte aux studios de cinéma en plein air pour découvrir, ébahi, la liste des blockbusters qui ont été tournés dans l’archipel, d’ Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre à Gladiator, en passant par Midnight Express, Munich, Da Vinci Code ou Pirates. Deux bassins géants creusés en bord de mer permettent de reproduire les pires conditions maritimes comme si les navires de pacotille étaient en plein océan.

Certaines salines de Gozo ou de Malte sont toujours utilisées pour récolter le sel par évaporation de l'eau de mer.
Certaines salines de Gozo ou de Malte sont toujours utilisées pour récolter le sel par évaporation de l’eau de mer.

3. Admirer les églises et les feux d’artifices

La Valette (et donc Malte) a été désignée capitale culturelle européenne 2018. Plus de 400 événements sont programmés durant toute l’année, dont plusieurs expos et festivals de musique, des concerts et toutes sortes de spectacles, mais aussi un concours de feux d’artifices, dont c’est une spécialité locale. Pas un soir sans que le ciel ne soit troué de dizaines de fusées colorées, aux quatre coins de l’île – spectacle haut en couleurs, si l’on ose écrire, à admirer si possible depuis le toit d’un immeuble des quartiers excentrés de la ville comme Sliema ou le très branché San Giljan.

Le plus souvent, ces étincelles ne sont en fait que l’apothéose d’une célébration religieuse quelconque dans l’une des paroisses de l’île. Fervents catholiques, les Maltais ne manquent pas une occasion de fêter l’un de leurs nombreux saints, par ailleurs statufiés à tous les coins de rue. Messes, processions, fanfares, décorum d’un kitsch assumé… Ambiance certes spirituelle, mais toujours joyeuse et animée, il ne faut pas hésiter à s’y mêler.

A faire aussi : pousser la porte d’une des innombrables églises, basiliques, abbatiales et autres lieux de culte qui jalonnent le moindre recoin de l’archipel. Malte en compte autant que de jours dans l’année, dit-on. La plupart sont des monuments à part entière, témoins des fastes d’un ordre religieux dont la puissance et la richesse ne se sont jamais démenties jusqu’à sa disparition, sous le règne de Napoléon. Parmi les plus remarquables, épinglons la Rotonde Sainte-Marie à Mosta, dont le dôme figure parmi les plus grands du globe. Transpercé par un obus allemand pendant la Seconde Guerre mondiale – qui fit de douloureux ravages à Malte -, il n’a pas explosé, épargnant miraculeusement les centaines de vies réfugiées dans l’église.

Les artistes de rue sont nombreux dans la vieille ville de La Valette.
Les artistes de rue sont nombreux dans la vieille ville de La Valette.

4. S’évader à Gozo et dans les criques paradisiaques

Azur Window, qui s’est brutalement effondrée en mars 2017, était l’une des arches de pierre naturelle les plus célèbres du monde, arcboutée à la falaise pour plonger dans la mer, au bout d’un paysage apocalyptique de roche calcaire rongée par l’érosion. C’était aussi le symbole de Gozo, la seconde île de l’archipel plus verte et sauvage que sa grande soeur, à l’atmosphère comme figée dans le temps. On l’atteint en une demi-heure de ferry depuis le nord de Malte pour un aller-retour dans la journée ou étalé sur deux jours – à moins d’y séjourner.

L’occasion de préciser qu’à Malte, les distances sont courtes et la circulation est dense, un réseau de bus très bien organisé dessert toutes les destinations intéressantes. Mais l’idéal est de se déplacer à scooter, pour se jouer des embouteillages tout en s’aérant aux heures chaudes. Depuis La Valette ou ses environs, l’excursion à Gozo ne prend pas plus d’une bonne heure, traversée comprise.

Revenons-en à l’îlot, à sa capitale Victoria au charme suranné, à sa citadelle rénovée offrant une vue imprenable sur Gozo, Malte et la minuscule Comino entre les deux, à sa basilique qui n’a rien à envier à celle de Koekelberg… et surtout à ses criques aussi paradisiaques que confidentielles, où l’on arrive à pied. L’île se prête aussi aux randonnées le long des falaises, avant un bain rafraîchissant.

Malte (l’île principale) n’est pas en reste au niveau des criques et des plages, surtout dans le sud, mais aussi des petits ports de pêche où la vie locale coule paisiblement à l’écart du tourisme de masse. Mention spéciale à celui de Marsaxlokk et sa baie, ou aux hautes falaises de Zurrieq, près desquelles on admirera au passage les plus anciens vestiges mégalithiques de la planète : plusieurs temples préhistoriques de la région ont été datés à plus de 5 000 ans avant J.-C., un millénaire de plus que le site de Carnac en Bretagne. On y a retrouvé de magnifiques sculptures à figure humaine exposées pour la plupart au musée archéologique de La Valette.

5. Plonger au coeur de dizaines d’épaves

Si la Méditerranée ne présente pas des fonds marins aussi riches que la mer Rouge ou l’océan Indien, Malte offre une spécificité qui attire les plongeurs de partout : ses épaves ! Entre Orient et Occident, l’archipel a toujours été le théâtre d’intenses échanges maritimes. Il a joué un rôle stratégique pendant la Seconde Guerre mondiale et a conservé de cette période une remarquable collection d’épaves : destroyers, cargos, sous-marins et même un bombardier qui s’est abîmé au large des côtes de Marsaxlokk.

Comme l’accès à certaines d’entre elles, échouées à plus de 60 mètres de profondeur, est réservé aux plongeurs confirmés, l’office de tourisme a volontairement sabordé d’autres bateaux – dont un pétrolier de 110 m que l’on peut visiter à loisir – pour servir de récifs artificiels, positionnés pour pouvoir être explorés par les débutants. Résultat : les eaux translucides de Malte sont le paradis incontesté de la plongée sur épaves, avec une visibilité rarement atteinte ailleurs en Méditerranée !

Mais il y a aussi des grottes, des canyons, des labyrinthes, des platiers… Et partout, on croise le meilleur de la faune méditerranéenne, entre barracudas, mérous, langoustes, pieuvres, murènes ou rascasses. Idéal pour un baptême – et plus si affinités.

En pratique

Se renseigner

Un site : www.visitmalta.com/fr/

Y aller

Air Malta propose des vols directs quotidiens à partir de 97 euros A/R. Environ 2 h 45 de vol. www.airmalta.com

Se loger

À Sliema

The Victoria Hotel. Façade victorienne, piscine sur le toit, déco stylée et situation parfaite : un écrin de charme à prix abordable. Le restaurant TemptAsian est une véritable tuerie. victoriahotel.com

À La Valette

Palazzo Prince d’Orange. Le faste à la maltaise, c’est ici. Un palais baroque du xviie siècle tapissé de marbre et meublé à l’ancienne, en plein coeur de la ville. www.palazzoprincemalta.com

Se restaurer

À La Valette

Caffe Cordina. A deux pas de la co-cathédrale, cette institution presque bicentenaire a gardé sa décoration d’époque. A l’heure du goûter ou de l’apéro, on y déguste une pâtisserie ou une glace sur sa terrasse ombragée. www.caffecordina.com

Guzé Bistrot. Sous une cave voûtée dans une ruelle tranquille, l’adresse familiale incontournable pour découvrir le meilleur de la cuisine locale et du poisson tout juste sorti de l’eau. www.guzevalletta.com

À Marsaxlokk

Terrone. A l’entrée du port, l’une des tables les plus savoureuses de Malte. On doit sa qualité et son originalité au chef Adrian. terrone.com.mt

Plonger

Ultramarina organise des séjours 100 % plongée ou mixtes plongée + découverte de l’archipel à partir de 1 164 euros par personne pour une semaine, vols et hébergement compris. www.ultramarina.com

Le port de pêche de Marsaxlokk, où la vie locale coule à l'abri du tourisme de masse.
Le port de pêche de Marsaxlokk, où la vie locale coule à l’abri du tourisme de masse.

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