En images: les derniers troglodytes du royaume du Lesotho, descendants des rescapés des cannibales

troglodytes lesotho
Malefakome, 54 ans, habitante du Kome Caves

Les grottes de Kome ont abrité plusieurs centaines d’occupants depuis le début du XIXe siècle et quelques familles y vivent encore, des descendants directs des tribus qui se sont battues pour instaurer les frontières de l’ancien protectorat britannique, indépendant depuis 1966.

Dans la pénombre de la grotte, Mamotonosi Ntefane, 67 ans, secoue une peau de bête: elle fait partie des derniers troglodytes du Lesotho dont l’histoire raconte qu’ils s’étaient réfugiés ici, il y a près de deux siècles, pour fuir les cannibales.

A plus de 1.800 mètres d’altitude dans les montagnes du petit royaume d’Afrique australe, encore noyées dans la brume au petit matin, seuls quelques bergers drapés dans de longues couvertures en laine sont visibles aux alentours.

Les grottes de Kome ont abrité plusieurs centaines d’occupants depuis le début du XIXe siècle et quelques familles y vivent encore, des descendants directs des tribus qui se sont battues pour instaurer les frontières de l’ancien protectorat britannique, indépendant depuis 1966.

Makoenweo (L), 60, and Mamtsaseng Khutsoane (2nd L), 66, residents of the Kome Caves site, sit with other women in front of dwellings, in the district of Berea, Lesotho, on October 9, 2022. – The caves are a mud dwelling, classified as a National Heritage Site, originally served as hideout for the Basia and a Bataung clan during the 18th century Lifaqane Wars (Mfecane Wars) and cannibalism. (Photo by Marco Longari / AFP)

Une fine fumée blanche s’échappe curieusement d’un aplomb rocheux à l’heure du petit-déjeuner: la cachette, à une cinquantaine de kilomètres de la capitale Maseru, est bien gardée.

Ndlovu (R), 40-years-old, a resident of the Kome Caves site in the district of Berea, Lesotho, squats to pass through a straw doorframe to access one of the dwellings on October 9, 2022.. – The caves are a mud dwelling, classified as a National Heritage Site, originally served as hideout for the Basia and a Bataung clan during the 18th century Lifaqane Wars (Mfecane Wars) and cannibalism. (Photo by Marco Longari / AFP)

A l’extérieur, une marmite de fonte noire bouillonne. Le traditionnel « papa », porridge de maïs, cuit sur un feu de bois.

Makoenweo 60 ans et Mamtsaseng Khutsoane, 66 ans

« Je suis bien ici. On cultive nos légumes et je peux prier autant que je veux », dit à l’AFP Mamotonosi Ntefane, un chapelet autour du cou. Depuis la porte ouverte de sa caverne, juste assez haute pour ne pas avoir à se courber, la femme aux pommette saillantes et aux dents jaunies regarde au loin les coteaux pelés.

Dans le pays rural, la majorité des 2,2 millions d’habitants vit encore de l’agriculture vivrière. Ici on cultive le maïs, le sorgho, des haricots. Il y a aussi des volailles et du bétail. Certains reçoivent une aide de l’Etat aux personnes âgées, d’autres gagnent un peu d’argent en ouvrant leur maison aux rares touristes de passage.

Colons, Zoulous et calamités

La caverne classée est divisée en plusieurs maisonnettes rondes adossées à la roche basaltique. Les parois et les sols sont faits d’un mélange de boue et d’excrément d’animaux qui doit être régulièrement restauré. 

Le mobilier est sommaire: une peau de vache étendue sur le sol faisant office de lit, des casseroles et des réserves d’eau dans des seaux en plastique. L’eau est puisée dans le village voisin. 

Mamotonosi Ntefane fait sa toilette grâce à un petit bout de savon qu’elle conserve dans une boîte en métal et chaque jour, elle frotte sa peau avec une pâte à base de camphre.

« Ici, il n’y a ni électricité, ni frigo mais c’est chez nous, c’est notre histoire », explique à l’AFP Kabelo Kome, 44 ans, descendant du premier occupant qui a donné son nom aux lieux.

A l’époque, l’Afrique australe est frappée par une sécheresse calamiteuse, qui anéantit les troupeaux et épuise les réserves de céréales. Des récits contant les ravages des cannibales ont été retranscrits par les missionnaires qui ont largement christianisé le pays.

L’arrivée par la suite des colons européens déterminés à établir leurs fermes sur des terres fertiles ainsi que les raids des guerriers zoulous d’Afrique du Sud pour se procurer du bétail et de la nourriture, finissent par pousser les Sotho, principale ethnie du pays, à s’unir. C’est ainsi que s’est formé le Lesotho.

Ndlovu, 40 ans

Mamatsaseng Khutsoane, 66 ans, a enseigné toute sa vie dans l’école la plus proche, à environ une heure de marche. Ce travail lui a permis de construire une maison dans le village sis sur la montagne au-dessus de la grotte. 

« Mais je viens ici pour manger ou avec mes petits-enfants », dit l’ancienne institutrice qui porte des mocassins troués. 

Les gens d’ici sont reliés au reste du monde par le téléphone mais pas d’internet. Mamotonosi Ntefane secoue la tête d’un air renfrogné, « pas de ça ici ». Au loin, le son des cloches du bétail qui paît rebondit sur les grosses pierres.

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