Le Costa Rica, un paradis végétal bien protégé

Le cône de l'Arenal, un volcan à l'humeur capricieuse. © PASCALE SURY

Le Costa Rica, un territoire couvert de forêts tropicales, protégé par une politique écologique exemplaire. Dans ce pays d’Amérique centrale en forme de temple naturel, la richesse du décor n’a rien d’un hasard. Une beauté menacée, mais aux défenses tenaces.

Bienvenue au pays de la « pura vida ». Bien plus qu’une devise marketing, l’expression résume un véritable mode de vie et se pose sur toutes les lèvres: on l’emploie pour dire bonjour ou merci, pour répondre « ça va » ou même pour crier « bonne chance ». Classé régulièrement « pays le plus heureux du monde » par le fameux Happy Planet Index (qui établit sa liste selon l’espérance de vie, l’empreinte écologique, le degré de bien-être et même l’égalité des revenus), le Costa Rica maîtrise l’art de recevoir. Rien d’étonnant au fait que, chaque année, il batte des records de fréquentation: en 2018, il attirait plus de 3 millions de visiteurs. Pas seulement en raison de la sympathie de ses habitants, mais aussi grâce à son rôle de pionnie-r – et de modèle – en matière de protection de l’environnement. C’est bien simple: l’écotourisme est aujourd’hui devenu la première source de revenus du pays.

L’appel de la forêt

Gardien de 6% de la biodiversité mondiale alors que son territoire couvre à peine 0,03% du globe, le Costa Rica est unique. L’un des temples naturels les plus visités se situe à Monteverde et porte le doux nom de « forêt de nuages ». Une rareté sur notre planète, typique des décors montagneux tropicaux ou subtropicaux. Un endroit magique, humide, dense et vierge de toute activité humaine. C’est le propre des forêts primaires, jamais détruites, exploitées ou manifestement influencées par l’homme. Des lieux pourtant fragiles et menacés: l’an dernier, les régions tropicales ont perdu 3,6 millions d’hectares de forêts dites « primaires », celles qui abritent le plus de biodiversité au monde et qui absorbent le plus de CO2.

La forêt de nuages de Monteverde, un paradis vert où le brouillard adore venir se lover.
La forêt de nuages de Monteverde, un paradis vert où le brouillard adore venir se lover.© PASCALE SURY

Zone privée, la forêt de nuages de Monteverde est ultraprotégée. Tout comme une bonne partie du pays, puisque près de 26% du territoire est classé parc national ou réserve écologique, tandis que la moitié des terres reste couverte de forêts malgré la déforestation du passé. Pas de doute: on est bien dans l’une des nations les plus vertes du monde. D’ailleurs, ici, le « droit à un environnement sain et écologiquement équilibré » est inscrit noir sur blanc dans la Constitution. Dans ce pays qui a supprimé son armée en 1948, le gouvernement se concentre sur les politiques vertes. Il s’est même fixé un objectif: devenir « zéro carbone » en 2021. A côté de cela, un mécanisme fiscal redistribue le gain de certaines taxes aux propriétaires qui protègent les forêts, en récompense des services rendus à l’écosystème. Au niveau énergétique, près de 100% de l’électricité est produite à partir de l’hydraulique, l’éolien et la géothermie des volcans. Il faut dire que le paysage costaricain est dessiné par 200 sites volcaniques, dont 112 montrent des signes de mouvement et cinq sont considérés comme actifs. A ne pas manquer: le magnifique cône de l’Arenal, dont chacun surveille les humeurs capricieuses…

Le droit à un environnement sain est inscrit dans la Constitution.

Des femmes pionnières

Grâce à ses richesses naturelles, le Costa Rica est également parvenu à se placer sur la carte du monde des exportations de produits naturels: la banane, l’ananas et le café. Dans le sud du pays, un groupe de trente-sept femmes exceptionnelles a révolutionné la vie de la petite communauté de montagnes de Biolley. Osant dépasser leur condition de « femmes au foyer » dans une société encore machiste, elles ont créé une association de production de café local et durable: Asomobi. Une petite entreprise florissante, qui unit et dynamise tous les producteurs de café du coin.

Laura, l'une des femmes d'Asomobi, en train de sécher les grains de café.
Laura, l’une des femmes d’Asomobi, en train de sécher les grains de café.© PASCALE SURY

En plein travail de séchage, Laura nous explique que « la plus importante mission d’Asomobi, c’est de générer des ressources plus grandes pour que les femmes et leurs familles puissent vivre dans de meilleures conditions ici à Biolley. Autrefois, nous avions une faible estime de nous-mêmes. Ce projet a tout changé en termes de confiance en nous. Nous savons désormais que si nous avons des rêves, nous pouvons aussi les réaliser. Et cela, nous l’avons transmis à nos filles! » Vingt-deux ans plus tard, l’enseigne produit et commercialise six tonnes de café par an. Les femmes ont gagné le respect de toute la région, et quelques hommes leur prêtent désormais main forte, en tant qu’ouvriers: « Au début, nos époux ne voulaient pas nous soutenir, ni travailler avec nous. Et puis, le temps a passé, on a vu qu’on commençait à les impressionner et ils ont accepté de nous aider. »

Les champs d'ananas de la multinationale Del Monte.
Les champs d’ananas de la multinationale Del Monte.© PASCALE SURY

Un étrange paradoxe

Le voisinage direct de l’entreprise Asomobi témoigne d’un des grands paradoxes costaricains: des milliers d’hectares de champs d’ananas, cultivés par le géant américain Del Monte. Déforestation, cultures intensives, accaparement et appauvrissement des sols… Bien que bénéfique à la santé économique du pays, le statut de « premier exportateur mondial d’ananas » a un coût environnemental certain. Pour répondre à la demande des consommateurs nord-américains et européens, il faut parfois accepter quelques concessions. Selon l’Organisation mondiale pour l’alimentation (FAO), le Costa Rica est même le champion imbattable de l’usage des pesticides par hectare, devant la Chine.

Pour soigner ces contradictions, les Costaricains possèdent néanmoins des moyens de défense aussi précieux que solides. Car ils savent pertinemment que leurs terres abritent des richesses aussi belles que fragiles. Ainsi, pour protéger sa nature somptueuse et ses lois vertes, le Costa Rica est l’un des rares pays au monde à disposer, depuis plus de vingt ans, d’un tribunal de l’environnement. Objectif de celui-ci: gérer les conflits entre les logiques économique et écologique. Une cohabitation clairement indispensable pour conserver le titre de pays le plus écolo du globe.

Un autre monde

Le pays vert attire forcément les beaux projets. Dans le nord du Costa Rica, isolés dans une nature incroyable, deux jeunes Belges, Fahimeh et Adrien, sont venus créer « leur petit monde » bien différent de nos sociétés occidentales. Un rêve qui ne pouvait se réaliser que dans « un pays modèle de politique visionnaire et durable », affirme Adrien. « L’idée a germé après avoir vu le documentaire Le Monde selon Monsanto. On a été dévastés par cette vision de la planète, et il fallait réagir, poursuit Fahimeh. On a pensé à se lancer en politique ou à rejoindre une ONG, mais ce n’était pas pour nous. Alors on est partis et on a trouvé cet endroit pour créer un monde qui correspond à nos idéaux et nos objectifs. »

Fahimeh, Adrien, Flor et Alexandre: une famille belge en osmose avec la nature.
Fahimeh, Adrien, Flor et Alexandre: une famille belge en osmose avec la nature.© PASCALE SURY

Vivre sobrement, construire tout de leurs mains, travailler la terre, reboiser, se nourrir de leurs cultures organiques, minimiser leur empreinte écologique grâce à un mode de vie durable et des énergies renouvelables: aujourd’hui, Flor et Alexandre partagent cette belle aventure avec leurs enfants. Fahimeh est leur institutrice avec les autres bambins du voisinage et ceux de leur cousin François, également partie prenante de cette nouvelle vie. Leur objectif commun: rester connectés au monde et transmettre leur expérience, ce qu’ils font notamment grâce à leur Tierra Madre Eco Lodge, entièrement construit de leurs mains: « Je ne sais pas si on fait partie des solutions, mais en tout cas, on ne fait plus partie du problème de notre planète. C’était essentiel… »

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