La Provence réfléchit à un tourisme plus économe en eau
Dans le sud de la France, dans une Provence prisée des touristes mais où l’eau se raréfie en raison du changement climatique, hôtels et campings tentent de trouver des solutions pour moins consommer la précieuse ressource.
« Nous avons refait l’intégralité des sanitaires, changé la robinetterie et mis des économiseurs d’eau partout. On pratique l’arrosage raisonné et on diversifie la végétation avec des espèces plus économes en eau », raconte ainsi à l’AFP Lionel Davin qui dirige le camping intercommunal du Brégoux, dans le département du Vaucluse. « La consommation d’eau a pu diminuer d’environ 30% », se réjouit-il.
Un résultat important dans un département de Provence où les premières restrictions d’usage de l’eau ont été imposées cette année dès la mi-avril, et qui attire nombre de touristes l’été avec des « marques » comme le festival d’Avignon, le Luberon et ses villages régulièrement dans les classements des « plus beaux » au monde, à l’image de Gordes.
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Rien que de l’eau?
Célébrée dans le best-seller mondial Une année en Provence, la région est aussi récemment apparue dans la dernière saison de la série Netflix à succès Emily in Paris. Le tourisme y est donc un secteur économique d’importance: plus de 1,3 milliard d’euros de chiffre d’affaires annuel et 8,5% du produit intérieur brut départemental, selon une étude de 2020.
En 2022, on y a ainsi enregistré 23,3 millions de nuitées touristiques, selon l’agence départementale publique-privée Vaucluse Provence Attractivité (VPA).
Projet pilote
Mais le secteur pèse lourd sur les ressources naturelles, dont l’eau. Selon l’Agence française de la transition écologique (Ademe), les territoires très touristiques peuvent voir leur consommation d’eau par tête tripler en été.
Pour favoriser un tourisme plus « durable », un projet pilote avec des professionnels volontaires fait un état des lieux des infrastructures et pratiques, pour proposer des améliorations. VPA et ses partenaires (offices du tourisme, organisations professionnelles…) mènent déjà les premières visites tests dans une trentaine d’établissements.
Il s’agit d' »accompagner les acteurs pour que leur offre change », explique Emilie André, chargée de mission à VPA. En proposant un inventaire détaillé d' »écosolutions » possibles. Mais aussi en « apportant de l’ingénierie financière », comme les fonds fléchés par l’Ademe vers le secteur du tourisme (plus de 30 millions d’euros sur 2023-24).
La Provence donne l’exemple
C’est ce qui pourrait intéresser Lionel Davin. La facture d’eau de son camping de 153 emplacements atteint toujours environ 20.000 euros l’an, même si la piscine, construite il y a quelques années pour attirer une clientèle plus familiale, n’est pas vidée hors saison, mais mise en « hivernage » pour économiser l’eau.
Pour réduire encore la consommation, le directeur envisage un système de bracelets électroniques, permettant d’offrir aux clients un volume de base et facturer au-delà. Ou une nouvelle robinetterie à détection d’usage infrarouge. Reste que des financements seraient bienvenus, même si « le retour sur investissement peut être deux à trois fois plus important » en factures contenues, dit-il.
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Gravier plutôt que pelouse
Propriétaire du Mas des Grès, niché à Lagnes, dans l’est du Luberon, Emilie Brès abonde. « On a passé la canicule de l’été dernier à refaire le niveau de la piscine », dit-elle, assise à l’ombre de platanes centenaires dans la cour de cet hôtel de 14 chambres.
Depuis, l’établissement a investi 11.000 euros dans une couverture de piscine isolante, pilotée à l’énergie solaire, qui limite l’évaporation. Et l’ancien jacuzzi a également été changé, avec une aide globale de 10.000 euros de l’Ademe. Des investissements « qui nous ont permis d’économiser l’eau sur un plan écologique, mais aussi des économies financières, puisque nos factures ont baissé ».
Les salles de bains, quant à elles, ont été équipées de « mousseurs » réduisant la consommation au robinet. Et la pelouse de la cour a été remplacée par un élégant gravier blanc, réduisant d’autant l’arrosage. « Les gens sont plus conscients de la place que doit avoir l’écologie dans le tourisme », affirme Emilie Brès.
Plusieurs « collectifs » locaux en doutent et se sont créés ces derniers mois, notamment contre des projets d’hôtels qu’ils jugent trop consommateurs de ressources. L’association France Nature Environnement (FNE) les soutient. « Les ressources sont insuffisantes par rapport aux besoins », souligne Patrick Faure, membre du bureau de FNE-Vaucluse. Et de pointer « une économie pas compatible avec ce que la nature a à nous donner. Et qui va encore diminuer avec le changement climatique ».
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