Petits (et grands) voyages entre filles

Image extraite du film Thelma et Louise, le road movie féminin par excellence © DR
Philippe Berkenbaum
Philippe Berkenbaum Journaliste

Outre-Atlantique, c’est la grande mode. Chez nous, ce n’est encore qu’un frémissement. Mais on sent venir le vent : des vacances où ces dames se retrouvent entre elles, loin des soucis et contingences familiales, proches des populations locales. Féminines, s’entend.

Bernadette Lefebvre dirige l’agence de voyages Itinérance, à Ecaussinnes, dans le Hainaut. Il y a vingt ans, elle a organisé un petit périple entre amies pour en rejoindre une autre dans le sud tunisien.  » Le séjour s’est bien passé, l’ambiance était tellement sympa et différente que j’ai eu envie de remettre ça « , évoque-t-elle. Ce qu’elle a fait. Depuis, l’idée a pris de l’ampleur et la voyagiste a fini par créer une succursale intitulée Voyage des femmes. Ses circuits unisexes ont de plus en plus de succès. Inde, Afrique, Amérique latine, Asie… Après le désert de Gobi l’an dernier, trois destinations sont au menu de 2015 : Oman, le Burundi et la Cappadoce.  » Ce type de vacances répond aux souhaits réels mais pas toujours avoués de personnes, qu’elles soient mariées, mamans, célibataires, veuves ou divorcées, témoigne la directrice de l’agence. La demande augmente d’année en année. Mais cela reste un créneau assez confidentiel : peu de gens savent que ça existe. Contrairement aux Etats-Unis, où c’est très tendance. « 

Là-bas, des dizaines de tour-opérateurs sont positionnés dans ce secteur. Périples d’aventure ou de ressourcement, circuits culturels… Un sondage récent montrait que 77 % des Québécoises ont déjà entrepris ce type d’escapade et que 56 % des Canadiennes en avaient l’intention. Copines qui souhaitent se rapprocher, jeunes diplômées qui célèbrent la fin de leurs études, mères et filles, collègues de bureau… L’augmentation du nombre de célibataires favorise aussi ces vacances d’un genre nouveau. Une mode appelée à s’imposer chez nous ? Plusieurs TO français proposent d’adapter aux groupes féminins certains de leurs circuits classiques. C’est le cas d’Atalante, spécialiste du voyage à pied, qui a absorbé la petite agence spécialisée Femmes du monde. Ou encore de Cheval d’Aventures qui organise une randonnée équestre  » entre copines  » en Islande. La Parisienne Voyages commercialise, elle, des séjours à l’occasion de compétitions sportives féminines ou des stages de running. Dans un autre genre, Crazy-Voyages vend des trips dédiés aux enterrements de vie de jeunes filles…

Mais pourquoi partir entre femmes, au fond, qu’est-ce que cela change ?  » Je suis mariée et mère de trois enfants et, chaque année, je pars une semaine en randonnée dans le désert avec des potes, témoigne Caroline, 46 ans. Hommes interdits. Une fois, on s’est même offert une semaine de farniente en Turquie. Une belle occasion de déconnecter, de vivre une aventure plus intimiste et sans tabous, où l’on peut être totalement soi-même sans devoir faire attention à tout : aux mômes, à la cuisine, à toujours tout anticiper… Et puis, cela fait du bien à mes gosses de se retrouver de temps en temps seuls avec leur père.  »  » Etre entre femmes, ça signifie partage de problèmes, écoute de l’autre, enrichissement mutuel…, ajoute Bernadette Lefebvre. Dans beaucoup de pays, c’est aussi un bon moyen pour approcher plus facilement les cultures locales. Le contact avec les familles autochtones est souvent plus difficile quand il y a des hommes.  » Il y a aussi beaucoup de touristes célibataires qui adorent découvrir de nouveaux horizons mais se retrouvent isolées au milieu des couples. Les voyages en groupe s’adressent davantage à ces derniers, ne fut-ce que pour partager la chambre double et éviter les suppléments single.  » Les globe-trotteuses n’osent pas tenter l’aventure seules, souligne Bernadette Lefebvre. Mais quand elles sont entre elles, elles partagent tout sans difficulté. Y compris la chambre.  » Certains hôtels ont d’ailleurs flairé la mine d’or, comme le Lady’s First, à Zurich : exclusivement réservés à ces dames, ils proposent menus spéciaux, spas, fitness et magazines adaptés. Et un personnel exclusivement féminin. Mais là, ça devient un brin sexiste, non ?

par Philippe Berkenbaum

plus d’infos : www.voyagesdesfemmes.be

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