Certains l’aiment Supersec

Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

Après avoir imaginé le Café des Spores, un restaurant dédié aux seuls champignons, Philippe Emanuelli s’est envolé vers de nouvelles aventures culinaires. Direction la Macédoine Occidentale et la Bretagne, super-sites où il s’est affranchi de la « dictature du frais ». Objectif ? Renouer avec le sec, paradigme alimentaire à vaste potentiel. Explications.

A l’heure où le monde entier est en attente d’un « New Deal » capable de refonder l’économie et le politique, il est clair que devant la raréfaction des ressources, la gastronomie, elle aussi, se doit d’être réinventée. En bon fils de son temps, c’est donc sur le mode « L’avenir m’intéresse car je compte bien y passer les prochaines années » – la citation est de Woody Allen – que Philippe Emanuelli a imaginé reprendre du service après avoir cédé le restaurant qu’il avait créé en compagnie de Pierre Lefèvre du Bozarshop.

La reconversion s’est imposée naturellement dans la mesure où l’épisode « Café des Spores » l’a confronté à une problématique bien tangible : « j’ai constaté que même sur les marchés de gros, la variété des champignons proposés, et bien souvent leur qualité, est en nette régression (contrairement à leur prix). Ce, sous l’effet conjoint et supposé de la pollution et de la gestion parfois contestable des espaces forestiers ».

Tous au sec

De façon plutôt inattendue, c’est en se tournant vers la tradition que Philippe Emanuelli va mettre le doigt sur une alternative. Avant ce qu’il appelle la « dictature du frais », les produits particulièrement périssables et saisonniers « faisaient l’objet de traitements mis à disposition par l’environnement, la tradition, et les avancées techniques: la cendre, le sel, la fumée, le soleil, le vent, le froid, la conserve ». C’est le séchage, procédé redoutablement économique, qui va retenir toute l’attention de ce grand cueilleur devant l’éternel. Normal quand on sait les bénéfices de cette opération appliquée aux champignons.

Le chevalier du déshydraté explique : « Il faut entre 12 et 20 kilo de champignon frais pour faire 1 kilo de champignon séché. Le coût énergétique lié à leur transport est donc substantiellement diminué. De plus, les champignons frais contiennent entre 80 et 95% d’eau, diluant à la fois leur saveur et leur potentiel nutritif. En éliminant cette eau, les valeurs gustatives et nutritionnelles se concentrent formidablement ».

Tandis qu’il mène cette réflexion, il découvre un paradis naturel en Macédoine Occidental, entre autre le parc naturel de Pindos qui abrite un ensemble d’écosystèmes extrêmement riches, sauvages et prodigue (on y trouve essences endémiques, pins noirs, ours brun, loup, aigle royal, champignons…). Cette vaste zone, protégée en tant que « biogenetic reserve », au tissu industriel inexistant, exempte de cultures intensives, préservées des pluies acides, montre un niveau de pollution quasiment nul, soit une opportunité de champignons à la pureté incroyable.

Philippe imagine alors la marque « Supersec » pour proposer « une expérience gastronomique inédite et originale » qui fait sens. Une fois le doigt mis dans l’engrenage, c’est un vaste éventail de possibilité qui s’ouvre, allant bien au-delà du seul champignon. Emanuelli s’intéresse à certains produits de la mer, glanés du côté de la Bretagne : ormeau, crevette bouquet, galathée, algue… Et ce n’est pas fini, le sec a de beaux jours devant lui.

www.supersec.com

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