Guide Michelin 2014 : à quoi s’attendre?

Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

Le 19 novembre sera présenté le guide Michelin Belgique & Luxembourg 2013. Roulements de tambour pour un non-suspens. Ça frétille dans les cuisines du Royaume… comme toujours à l’approche du nouveau Michelin.

Certains chefs marinent à la façon de poissons crus, tandis que d’autres suent comme des oignons. Les commentateurs, quant à eux, se perdent en pronostics. Pas de doute, même critiquée jusqu’à la moelle, l’institution que représente le Michelin, vieux pachyderme encombrant, pèse encore de tout son poids sur la gastronomie nationale.

Pas de doute non plus, l’étoile reste une promesse de fréquentation assidue de la part d’un public largement conservateur. Même les critiques les plus résistants aux macarons, dont on fait partie, se surprennent à évoquer les fameuses étoiles quand il s’agit de défendre une table qui en est pourvue.

Que reproche-t-on exactement au Michelin ? Essentiellement trois choses :

– son conformisme gastronomique – si le Michelin régnait sans partage sur terre, jamais un restaurant en forme d’expérience comme le Noma n’aurait vu le jour

– sa méconnaissance d’un pan de la gastronomie nationale

– et ses rouages « humains, trop humains » comme l’écrivait un certain philosophe allemand.

On ne reviendra pas sur l’immobilisme du Michelin tant de fois évoqué par les commentateurs. Quant à la méconnaissance d’une partie de la gastronomie belge, on citera l’absence de mention d’une adresse comme Le Neptune – aujourd’hui, c’est trop tard, l’adresse ayant fermé – qui comptait sans hésiter parmi ce que Bruxelles proposait de mieux – notons, qu’il s’agit d’un exemple parmi beaucoup d’autres*.

Pour ce qui est du facteur « humain, trop humain », s’il est invisible aux yeux du grand public, il est un secret de polichinelle pour les professionnels de la profession. Il n’y a pas que l’assiette, le décor, le service,… qui comptent dans l’appréciation des inspecteurs Michelin, il y a aussi des considérations qui relèvent d’un jeu d’échecs gastronomique. Comme nous l’affirmait récemment un chef interviewé dont le travail avait tardé à être récompensé : « On s’est posé beaucoup de questions pour se rendre compte qu’il y avait un facteur humain qui bloquait derrière, des personnes précises faisaient obstacle ».

Qu’attendre dès lors du nouveau palmarès ? Honnêtement : rien. Bien sûr, les landernau culinaire et médiatique vont commenter en boucle ce non-évènement mais qu’on ne s’y trompe pas, les chefs ne seront pas meilleurs parce qu’ils auront pris une étoile ou moins bons parce qu’ils auront perdu un macaron. Surtout que la récente parution des BIB Gourmand 2014 souligne déjà l’électro-encéphalogramme plat du guide à venir.

Au rayon des nouvelles entrées, on trouve… le Noï à Linkebeek. Loin de nous l’idée de critiquer cette vénérable adresse dont la cuisine thaïe n’a rien à se reprocher, mais n’y avait-il pas moyen de proposer un restaurant davantage en phase avec le goût du jour ?

Pourquoi une adresse comme la Bottega della Pizza, à Saint-Gilles, qui réinvente avec brio un genre mineur, n’a aucune chance de recevoir un jour un BIB Gourmand. Justement car c’est un genre mineur et que l’on suppose que le décor un peu rock’n’roll doit effrayer l’inspecteur du guide dont les ans ont bien mérité un peu de confort…

On se gardera donc bien de faire quelque prédiction que ce soit. Il reste que l’on reste convaincu d’une chose: la gastronomie vivante se tient loin des étoiles taxidermisées du Michelin – qui transforment les chefs en statue de sel – et c’est un bien.

* On pourrait également citer, au nord du pays, l’unique étoile de ce qui est sans doute la meilleure table du pays, In de Wulf, le restaurant de Kobe Desramaults.

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