Le Frank, quand la gastronomie s’invite au musée

Pour Le Frank, le restaurant de la Fondation Louis Vuitton, à Paris, le chef étoilé Jean-Louis Nomicos a imaginé un concept culinaire unique. Il nous présente ici trois de ses créations muséales.

Le Frank, quand la gastronomie s'invite au musée
© Kris Vlegels

Installée depuis fin 2014 dans un somptueux bâtiment ultracontemporain, la Fondation Vuitton, qui accueille la collection d’art du groupe de luxe LVMH et de son PDG Bernard Arnault, ainsi que des expos temporaires (*), se devait d’offrir également un espace gastronomique hors normes. L’exploitation du Frank – une allusion à l’architecte de l’édifice, Frank Gehry – fut donc confiée au chef parisien étoilé Jean-Louis Nomicos.

Le Frank, quand la gastronomie s'invite au musée
© Kris Vlegels

Aujourd’hui âgé de 49 ans, l’homme a grandi dans le petit village d’Allauch, entre Aubagne et Aix-en-Provence. Attiré très tôt par la cuisine provençale, il suit une formation professionnelle à Marseille avant de rejoindre à 18 ans la brigade d’Alain Ducasse. Il est impliqué dans une série de projets du grand restaurateur (La Terrasse à Juan-les-Pins, L’Horloge et l’Hôtel de Paris à Monaco…) et fait avec lui le tour du monde. De 2001 à 2010, il est aux fourneaux du fameux restaurant Lasserre, dans la capitale française, et y décroche deux étoiles au Michelin. Lorsqu’en 2010, Joël Robuchon quitte son enseigne de l’avenue Bugeaud, il saisit l’occasion pour y ouvrir sa propre maison de bouche, baptisée Les Tablettes. Les macaronis à la truffe noire et au foie d’oie sont depuis 1997 son plus célèbre plat signature.

Le Frank, quand la gastronomie s'invite au musée
© Kris Vlegels

« L’architecture spectaculaire de la Fondation m’attirait beaucoup, avoue-t-il. J’ai donc soumis un dossier et j’ai eu la chance d’être retenu par le jury. Je suis vraiment aux anges de pouvoir travailler ici, au coeur du bois de Boulogne. C’est la terrasse la moins polluée et la plus calme de la capitale. » Dans ce véritable « havre de paix », comme il aime le souligner, il propose une cuisine française sincère, pétillante et accessible, mâtinée d’influences étrangères. « Je prends toujours plaisir à jouer avec les saveurs, par exemple en mariant des chanterelles agrémentées d’un zeste d’orange et accompagnées de quinoa cuit au jus de citron et de pulpe de citron confit », confie-t-il.

Le Frank, quand la gastronomie s'invite au musée
© Kris Vlegels

Tout de blanc vêtu, le restaurant est surmonté d’une coupole de verre qui laisse entrer la lumière à flots tout au long de la journée. Sous l’oeil attentif de poissons suspendus au plafond de ce temple de l’art, les convives y dégustent une cuisine qui ne succombe pas aux tendances, ni au surfait, l’addition sur place s’élevant en moyenne à une trentaine d’euros en journée et une cinquantaine le soir – un prix franchement démocratique pour une métropole internationale. « J’ai grandi avec les traditions culinaires du sud de la France et de l’Italie, brutes et centrées sur l’essentiel, insiste le cuisinier. C’est beaucoup plus difficile qu’il n’y paraît. Mon père m’a par exemple appris l’art de cuire une daurade de 2,5 kg sur les braises. Il faut une grande précision pour éviter que la chair ne dessèche. Une telle cuisine n’est donc absolument pas synonyme de facilité. » Et d’évoquer encore les aubergines brûlées, une préparation héritée de sa grand-mère qu’il a modernisée : « Je mélange la peau noircie et la chair du fruit au Thermomix avec des anchois pour obtenir une purée qui se marie merveilleusement bien avec l’agneau. Je pars souvent d’une préparation classique que j’essaie d’actualiser. » Démonstration dans ces pages avec entre autres la tarte au citron, rehaussée d’une touche de fruit de la passion et cuite comme une pizza, avec très peu de pâte.

(*) A voir : Bentu, des artistes chinois dans la turbulence des mutations, www.fondationlouisvuitton.fr Jusqu’au 2 mai prochain.

PAR PIETER VAN DOVEREN / PHOTOS : KRIS VLEGELS

Le Frank, quand la gastronomie s'invite au musée
© Kris Vlegels

Filet de saumon, bar aux algues et agrumes, crevettes en tempura et légumes de saison

Pour 4 personnes

Pour le bar :

  • 500 g de filet de bar,
  • 100 g de wakame,
  • 80 g de quinoa blanc,
  • 80 g de quinoa rouge,
  • 1 tomate,
  • 1 concombre,
  • sel, poivre,
  • piment d’Espelette,
  • 1 tranche de citron,
  • zeste de citron,
  • huile d’olive,
  • tiges de basilic.

Pour le saumon :

  • 400 g de filet de saumon,
  • 250 g de gros sel,
  • 25 g de sucre,
  • 2 g de graines de fenouil,
  • 2 g de graines d’anis,
  • 1 g de coriandre,
  • zestes d’orange, de citron, et de citron vert,
  • 1/2 bouquet d’aneth.

Pour les crevettes :

  • 16 belles crevettes,
  • 1 sachet de pâte à tempura,
  • chapelure japonaise (panko).

Pour la bisque de crabe nageur : 500 g de crabes nageurs, 1 fenouil, 1 oignon, 1 carotte, 1 pincée de thym, 1 feuille de laurier, 5 g de poudre de curry, 1 c à c de purée de tomates, 25 cl de vin blanc, 500 g de crème, 2 tomates, huile d’olive.

Pour la sauce au poivre et aux agrumes :

2 g de poivre blanc, 2 g de poivre noir, 10 cl d’huile d’olive, 1 orange, 1 cl de sauce soja, le jus d’un yuzu (agrume oriental), sucre.

  • Faire mariner le filet de saumon 12 heures dans un mélange de sel, sucre, herbes, zestes et épices. Rincer puis sécher en tamponnant. – Décortiquer les crevettes et les enrober de pâte à tempura, puis de panko.
  • Préparer la bisque. Faire cuire les crabes à feu vif dans l’huile d’olive. Ajouter le fenouil, l’oignon et la carotte coupés en morceaux ainsi que le bouquet garni. Laisser cuire un instant, ajouter la purée de tomates et le curry et laisser cuire encore quelques minutes. Déglacer au vin blanc et ajouter les tomates fraîches coupées en morceaux ainsi que la crème. Ajouter de l’eau jusqu’à ce que les ingrédients soient entièrement couverts et laisser mijoter pendant 30 minutes. Filtrer.
  • Préparer la sauce. Faire griller le poivre dans une poêle sèche, retirer du feu et ajouter l’huile d’olive, les tranches d’orange, le sucre et la sauce soja. Mixer et assaisonner de yuzu.
  • Couper le bar en quatre morceaux, l’assaisonner de sel, poivre et piment d’Espelette et le faire cuire à la vapeur avec une tranche de citron.
  • Placer séparément les deux sortes de quinoa dans l’eau froide et les faire cuire à point. Égoutter et assaisonner de poivre, d’huile d’olive et de zeste de citron. Transférer dans un bol avec le concombre, la chair de la tomate coupée en dés et les germes de basilic.
  • Disposer le wakame et le bar sur une assiette, napper de sauce aux agrumes. Faire frire les crevettes jusqu’à ce qu’elles soient dorées. Découper et présenter le saumon. Décorer de quelques brins de basilic.
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© Kris Vlegels

Daurade et carottes marinées

Pour 4 personnes

  • 1 carotte orange,
  • 1 carotte jaune,
  • 80 g de miel de citronnier,
  • 120 g de vinaigre balsamique blanc,
  • 250 g d’eau,
  • 1 éclat d’ail sans la base,
  • thym citronné,
  • gros sel,
  • poivre noir écrasé,
  • 2 daurades de 500 g filetées,
  • 1 citron, citron caviar (facultatif),
  • quelques tiges de basilic,
  • 20 g de caviar impérial (facultatif),
  • poivre noir,
  • fleur de sel,
  • piment d’Espelette,
  • huile d’olive.
  • A l’aide d’un coupe-fromage ou d’une mandoline, prélever dans les carottes des rubans d’un millimètre d’épaisseur. Réserver.
  • Tout en fouettant, réchauffer le miel avec l’ail écrasé, une branche de thym, du sel et du poivre. Déglacer au vinaigre balsamique et ajouter un peu d’eau. Porter à ébullition sans cesser de mélanger puis verser ce mélange sur les rubans de carotte et laisser mariner au frais pendant au moins douze heures.
  • A l’aide d’un couteau bien tranchant, couper les filets de poisson en carpaccio et étaler sur des assiettes très froides. Assaisonner de fleur de sel, poivre, piment d’Espelette et d’une vinaigrette préparée à base d’huile d’olive et de jus de citron. Parsemer de zeste.
  • Disposer artistiquement les rubans de carottes, les grains de citron caviar, le caviar et le basilic sur le carpaccio.
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© Kris Vlegels

Tarte fine au citron

Pour la pâte sablée au citron :

  • 270 g de beurre mou,
  • 130 g de sucre impalpable,
  • 3 g de zeste de citron,
  • 45 g de jaune d’oeuf,
  • 155 g de poudre de noisettes,
  • 285 g de farine,
  • 13 g de poudre à lever.

Pour la crème au citron :

  • 210 g de jus de citron frais,
  • 60 g de beurre,
  • 180 g d’oeufs,
  • 170 g de sucre en poudre,
  • 5 g de gélatine en feuilles,
  • 5 g de zeste de citron.

Pour le crémeux au citron et à la mangue :

  • 2 g de zeste de citron,
  • 50 g de purée de mangue,
  • 300 g de jus de citron frais,
  • 50 g de jaune d’oeuf,
  • 90 g de sucre en poudre,
  • 10 g d’amidon ou de Maïzena,
  • 10 g de poudre à crème pâtissière,
  • 4 feuilles de gélatine,
  • 125 g de beurre,
  • 1 gousse de vanille.

Pour la meringue italienne :

  • 150 g de sucre en poudre,
  • 60 g d’eau,
  • 15 g de glucose,
  • 75 g de blanc d’oeuf,
  • 0,4 g de citron iranien séché, en poudre (facultatif).

Pour la gelée neutre :

  • 300 g d’eau,
  • 400 g de sucre en poudre,
  • 13 g de gélatine en feuilles.
  • Pour la pâte sablée, mélanger le sucre et le beurre dans un bol ; ajouter l’oeuf, la poudre de noisettes et le zeste de citron. Incorporer la farine tamisée et la poudre à lever. Étaler, recouper aux dimensions souhaitées et prélever des cercles de 10 cm. Faire cuire au four à 145 °C pendant 15 minutes.
  • Préparer la crème. Fouetter le sucre en poudre et les oeufs jusqu’à obtenir une masse blanche. Ramollir la gélatine dans l’eau pendant 30 minutes. Porter à ébullition le jus de citron, le beurre et le zeste. Verser ce mélange sur le sucre et les oeufs et faire cuire le tout à 83 °C. Incorporer la gélatine essorée et mélanger. Transvaser dans un moule antiadhésif de 40 x 60 cm. Placer au surgélateur. Prélever des cercles de 10 cm de diamètre, réserver au réfrigérateur.
  • Préparer le crémeux citron-mangue. Ramollir la gélatine dans l’eau. Porter la purée de mangue, le jus de citron et le zeste à ébullition dans un poêlon avec la gousse de vanille. Fouetter ensemble les jaunes d’oeufs, le sucre en poudre, la poudre à crème pâtissière et l’amidon jusqu’à ce que le mélange vire au blanc, puis l’ajouter à la purée de mangue. Porter à ébullition, incorporer la gélatine essorée, mélanger. Laisser refroidir jusqu’à 40 °C. Ajouter le beurre et mélanger. Réserver dans une poche à douille.
  • Préparer la meringue. Faire chauffer l’eau, le sucre et le glucose à 118 °C. Fouetter les blancs en neige ferme et y incorporer le sucre brûlant en un mince filet sans cesser de battre. Ajouter le citron séché et continuer à fouetter jusqu’au refroidissement.
  • Pour la gelée : laisser ramollir la gélatine dans l’eau froide 20 minutes. Porter à ébullition le sucre et l’eau, incorporer la gélatine essorée. Utiliser la gélatine fondue à 20 °C.
  • Pour le montage : à l’aide d’une poche à douille, disposer une couche de crème de mangue sur la crème au citron congelée. Replacer au surgélateur. Tartiner la tarte au citron de gelée neutre, puis disposer les tartelettes surgelées sur les bases. Décorer de zestes et de meringue (à la poche à douille). Faire dorer les pointes de meringue à l’aide d’un chalumeau de cuisine.

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