Pleins feux sur ces modes de cuisson alternatifs qui font parler d’eux

L'asado © Getty Images/iStockphoto
Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

C’est un acte fondateur : la cuisson chemine de pair avec notre humanité. A tel point que les chefs d’aujourd’hui se passionnent pour les façons alternatives de marier chaleur et aliments. Attention, sujet brûlant !

Les paléontologues font remonter les premiers foyers à 500 000 ans, c’est dire si le feu est un compagnon fidèle des hommes. Cela dit, la plupart des spécialistes sont convaincus que la flamme était déjà utilisée bien avant cette date. Certains chercheurs, comme l’Américaine Leslie Aiello, émettent par ailleurs l’hypothèse selon laquelle la cuisson a eu un impact crucial sur l’évolution du cerveau humain. Interviewé sur le site La Nutrition (1), le maître de conférences au Laboratoire de paléoanthropologie et préhistoire du Collège de France Pascal Picq retrace la généalogie de cette chaleureuse aventure :  » La digestion fait peser un coût métabolique important sur l’organisme et le cerveau est gourmand en glucose. A partir du moment où les hommes se sont mis à consommer de la viande, dont la digestion est aisée, la charge métabolique qui pesait sur l’intestin a pu être dédiée au développement d’un gros cerveau. Selon une hypothèse récente, la cuisson aurait favorisé l’encéphalisation. La cuisson de la viande ne modifie guère sa digestion par l’organisme. En revanche, elle rend les nutriments des végétaux plus disponibles. En faisant cuire les légumes, les racines, nos ancêtres auraient permis au cerveau d’accéder plus facilement et de manière plus importante à des molécules fondamentales pour son développement.  »

En clair, l’humanité doit beaucoup à la cuisson. Pas ingrate, celle-ci le lui rend bien en essayant de tirer parti de la moindre source de chaleur. Les exemples pullulent, qu’il s’agisse des routiers US qui font blanchir des oeufs sur le capot de leur moteur ou encore d’Hervé This, le célèbre physico-chimiste, qui encourage chacun à faire des économies en préparant certains aliments à basse température par le biais du… lave-vaisselle. Les chefs actuels, eux aussi, sont nombreux à explorer le potentiel d’autres méthodes. Pleins feux sur ces alternatives qui font parler d’elles.

Le tannour

Le tannour
Le tannour© Getty Images/iStockphoto

Il s’agit d’une sorte de four à pain populaire au Moyen-Orient, de la Syrie à la Jordanie et du Liban à l’Egypte. Traditionnellement – son usage remonte à l’âge du bronze -, il est en céramique et inséré dans de la brique ou de la pierre. Et sa base joue le rôle de chambre à combustion. Cousin du fameux tandoor, cette jarre indienne enfouie dans le sol, le tannour est alimenté en braises pendant plusieurs heures, jusqu’à ce que ses parois soient assez chaudes. La galette sans levain est alors introduite et plaquée sur les côtés, une fois le feu éteint. A Bruxelles, Georges Baghdi Sar, un chef d’origine arméno-libanaise, décline la formule dans des  » sandwichs  » revisités avec boulettes de pois chiches, halloumi grillé ou viandes. Le tout pour une version à la hauteur de la street food moyen-orientale que l’on assimile trop souvent au kebab sans âme.

Où l’expérimenter ? My Tannour, 98, rue de la Brasserie, à 1050 Bruxelles. Tél. : 0471 45 16 00.

Le kamado

Le kamado
Le kamado

Assez proche du tannour, le kamado est un four ovoïde en céramique. Ce matériau étant idéal pour la diffusion de la chaleur, ce que l’on appelle parfois, à tort, le  » barbecue japonais  » – il semblerait que son principe ait vu le jour en Chine – permet toutes sortes de cuissons. On peut tant y fumer de grosses pièces au charbon de bois, entre 80 et 100 °C, pendant des heures que faire cuire un rôti à 250 °C durant 30 minutes, ou encore s’en servir pour griller des saucisses ou un steak à 300 °C. Pour différentes préparations, le chef Tanguy De Turck utilise un Big Green Egg, qui est le nom commercial, aux Etats-Unis, d’une version efficace du kamado.

Où l’expérimenter ? Au Vieux Château, 23, rue Docteur Degavre, à 7880 Flobecq. www.levieuxchateau.be

Le four Josper

Le four Josper
Le four Josper

Marque espagnole en vue présente dans nonante pays, Josper existe depuis plus de quarante-cinq ans. Le principe de ses modèles pros qui s’achètent entre 12 000 et 25 000 euros ? La combinaison entre un barbecue et un four, pour des viandes au parfum de braise, juteuses à souhait. Les matériaux utilisés (chambre en fonte d’alu, extérieur tout Inox…) font des miracles : les chefs peuvent travailler en continu à une température constante de l’ordre de 250 °C pendant plusieurs heures… même avec l’ouverture régulière de la porte. Et ce avec un seul chargement de charbon végétal en début de service. Le must consiste à utiliser du  » quebracho blanco « , un bois dur d’Argentine. Le hic ? Pour certains amateurs, le constat d’un marquage gustatif quasi caricatural, lorsque l’on maîtrise approximativement l’outil.

Où l’expérimenter ? Colonel, 24, rue Jean Stas, à 1060 Bruxelles. www.colonelbrussels.com

Le dutch oven

Le dutch oven
Le dutch oven

Le  » dutch oven  » est en réalité une marmite qui sert à mijoter ou à braiser les plats. Aux Etats-Unis, les campeurs ont revisité ce classique de façon à l’adapter à un feu de bois. Pour ce faire, ils en ont réduit la taille et l’ont placé sur un trépied. Le bord du couvercle a été rehaussé pour pouvoir ajouter de la braise afin d’uniformiser la chaleur à la façon d’un vrai four. A Gand, le célèbre chef Kobe Desramaults multiplie les expériences de cuisson dans son restaurant Chambre Séparée :  » dutch oven  » suspendu au-dessus du feu avec lequel il travaille souvent les légumes, mais également fours Josper et à pizza.

Où l’expérimenter ? Chambre Séparée, 1, Keizer Karelstraat, à 9000 Gand. www.chambreseparee.be

L’asado

L'asado
L’asado© Getty Images/iStockphoto

L’asado est le nom véritable du gril argentin. Le principe est quasiment celui de notre barbecue, à quelques  » détails  » près : la taille de la viande (de grosses pièces), la hauteur de la grille (plus éloignée de la source de chaleur) et la cuisson lente (entre 2 et 4 heures). On notera qu’il existe un modèle vertical, pourvu d’une grande pique inclinable sur laquelle la bidoche est empalée, pour préparer des morceaux encore plus imposants (agneau, chevreau ou porcelet entier). Une technique qui fait des merveilles dont, là aussi, le Gantois Kobe Desramaults a un usage intensif.

Où l’expérimenter ? Chambre Séparée, 1, Keizer Karelstraat, à 9000 Gand. www.chambreseparee.be

(1) La Nutrition.fr,  » La cuisson nous a donné un cerveau plus gros « , publié le 26 avril 2006.

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