3 recettes aux senteurs d’ailleurs faites d’ingrédients locaux

La soupe mise aux champignons nameko de Eclo © Anaïs Lesy
Barbara Serulus Journaliste
Estelle Spoto Journaliste

Si nous aimons privilégier les ingrédients du terroir et les circuits courts, nos papilles aspirent aussi à des découvertes des quatre coins du monde. Ce n’est désormais plus incompatible. Trois créateurs de saveurs nous proposent des mets venus d’ailleurs à partir de fruits et légumes d’ici.

Les namekos de Quentin Declerck (Eclo)

© Anaïs Lesy

Après avoir travaillé dans une agence de pub puis pour la Ligue Braille, Quentin Declerck succombe à sa passion pour les problématiques alimentaires et se forme à l’agriculture urbaine à Gembloux et au Québec, où il teste notamment la production de micropousses dans une serre en plein centre-ville de Montréal. Une fois rentré à Bruxelles, il s’associe avec Hadrien Velge et Thibault Fastenakels, fondateurs des Champignons de Bruxelles, pour installer une ferme urbaine, Eclo, aux abattoirs d’Anderlecht.

Dans les splendides caves voûtées de Cureghem, c’est d’abord le shiitaké qui est cultivé, sur de la drêche de bière, dans un principe d’économie circulaire. Mais la gamme se diversifie rapidement, notamment avec le nameko (Pholiota microspora).

Facilement reconnaissable à son chapeau orange luisant, c’est un champignon très utilisé dans la cuisine asiatique, particulièrement au Japon. «Depuis le début, le nameko s’est toujours très bien vendu auprès des chefs, qui nous disent beaucoup apprécier son petit goût de miel quand on le cuit, explique Quentin Declerck, très occupé pour l’instant avec le lancement de l’usine de substrat bio pour champignons d’Eclo, à Liège. Mais le grand public reste encore frileux, sans doute à cause de son aspect un peu gluant. Ici, on a l’habitude de cuisiner les champignons à la française, avec de la crème, du fromage, ce qui ne fonctionne pas avec le nameko. Par contre, c’est un champignon qui se poêle très bien et qui se cuit en quelques minutes dans de l’eau bouillante. C’est parfait dans un bouillon, ou dans une soupe miso, à laquelle il va apporter de la profondeur et de la texture.»

Gros avantage de cette culture: contrairement au shiitaké et à l’eryngii (pleurote du panicaut) que produit aussi Eclo et qui ne donnent qu’une seule récolte, cette espèce peut être récoltée plusieurs fois, pendant une période qui peut aller jusqu’à deux mois. Les nameko sont désormais disponibles en vrac dans les supermarchés Bio-Planet, que l’entreprise anderlechtoise livre tous les deux jours, afin d’assurer une fraîcheur optimale. «C’est un champignon très sensible, et quand il s’ouvre trop, il devient flasque, mou. Notre distribution en circuit court lui permet de garder une chouette fermeté.»

Soupe miso aux nameko
La soupe mise aux champignons nameko de Eclo © Anaïs Lesy

La recette de soupe miso aux nameko, pour 4 personnes

Ingrédients

  • 1 l d’eau
  • 60 g de pâte miso
  • 30 g de champignons nameko
  • 4 échalotes émincées
  • ½ feuille de nori
  • 1 c à s de sauce soja
  • 1 petit ravier de micropousses de radis pourpre, par exemple de chez Eclo
  • 60 g de tofu en dés (facultatif)

Préparation

  1. Faire bouillir 1 litre d’eau dans une casserole.
  2. Découper les champignons, la feuille de nori et éventuellement le tofu, verser le tout dans l’eau bouillante et laisser mijoter 5 minutes.
  3. Dans un autre récipient, mélanger la pâte miso avec un peu d’eau chaude.
  4. Ajouter la pâte miso diluée, les échalotes et la sauce soja dans la casserole et remuer.
  5. Laisser reposer une ou deux minutes et servir avec les micropousses de radis pourpre réparties au-dessus de chaque bol de soupe.

Le miso de Kyle Boland

Kyle Boland
© Anaïs Lesy

Kyle Boland a officié pendant neuf ans chez Kobe Desramaults. «Je viens du Canada, mais lorsque j’ai vu que son restaurant, In De Wulf, recrutait, j’ai tout de suite postulé. Je savais que le chef travaillait beaucoup avec la fermentation et je voulais absolument en apprendre davantage sur le sujet. J’ai pu commencer rapidement. Après la fermeture de l’établissement, j’ai dirigé son deuxième restaurant, Vitrine, puis je l’ai suivi chez Chambre Séparée, sa troisième adresse.» Quand celle-ci s’est arrêtée et que Kyle est devenu papa de jumeaux, il a cherché à continuer la cuisine sans devoir se plier aux horaires compliqués d’une table pro. «Chez Chambre Séparée, j’étais responsable des fermentations. D’autres chefs me demandaient régulièrement conseil sur cet art culinaire. C’était un projet un peu insensé d’en faire mon métier. Juste avant Noël, j’ai lancé mon webshop avec des bocaux de miso et de kimchi.»

Alors que le miso traditionnel est fabriqué en faisant d’abord fermenter du riz avec du koji puis en inoculant des grains de soja, Kyle a choisi de travailler uniquement avec des ingrédients locaux. «Je suis parti six semaines au Japon pour me former au miso. Les pâtes de grains fermentés japonaises sont incroyables. Hélas on ne les trouve que là-bas: les bocaux que l’on peut acheter ici sont souvent de moins bonne qualité. J’y ai vu un créneau commercial.»

En lieu et place du riz, Kyle utilise de l’orge cultivé localement et les grains de soja sont remplacés par des légumes. «Ma première expérimentation a été un miso à partir de patates douces: j’adore leur saveur sucrée quand elles sont caramélisées. Le miso fermente pendant quatre à cinq mois et prend alors un goût très riche, doux et terrien, avec un arrière-goût fruité. Mes miso ne sont pas pasteurisés afin de conserver tous leurs bienfaits pour la santé: c’est un probiotique parfait pour protéger la flore intestinale.»

biscuits au miso
© Anaïs Lesy

La recette des biscuits au beurre de cacahuètes au miso local de Kyle Boland

Ingrédients

  • 225 g de farine fermentante
  • 4 g de bicarbonate
  • 3 g de levure chimique
  • 115 g de beurre à température ambiante
  • 220 g de sucre roux
  • 60 g de beurre de cacahuètes
  • 80 g de miso, par exemple le miso de patates douces de Kyle
  • 1 œuf
  • Une demi-gousse de vanille

Préparation

  1. Préchauffer le four à 175 °C. Mélanger tous les ingrédients secs dans un bol.
  2. Dans un autre récipient, fouetter le beurre et le sucre pour obtenir une masse bien lisse. Y mélanger le miso et le beurre de cacahuètes, puis l’œuf et les graines de vanille préalablement grattées de manière à obtenir une pâte légère et homogène. Ajouter la moitié des ingrédients secs. Quand c’est bien mélangé, ajouter l’autre moitié.
  3. Former des petites boules (environ 4 ou 5 centimètres de diamètre) et les placer sur une plaque recouverte de papier cuisson en gardant assez d’espace entre elles. Les aplatir légèrement avec une fourchette. Faire cuire pendant 10 à 12 minutes à 175 °C

Astuce: La pâte peut se conserver sous la forme d’un grand rouleau au réfrigérateur et même se congeler.

Les sauces piquantes Swet de Thibault Fournal

Thibault Fournal
© Anaïs Lesy

A défaut de trouver la sauce piquante qui le fait vibrer, Thibault Fournal décide de la créer lui-même. Pendant la crise sanitaire, le graphiste lance sa première bouteille, qui rencontre vite un joli succès. «Swet n’est pas seulement piquante: on perçoit aussi des goûts fruités, sucrés, acides ou amers, qui proviennent souvent d’ingrédients locaux comme des poires ou des pommes belges.»

En plus de la gamme fixe de variétés comme la Fumado («fumée») et la Lemon Hard aux agrumes, l’intéressé sort aussi chaque mois une édition limitée où il essaie de suivre les saisons. Ainsi, la sauce de ce mois-ci a été réalisée avec du houblon belge, qu’il travaille de manière à ne pas mettre en avant l’amertume mais les saveurs fruitées des cônes. «Les piments forts que j’utilise viennent à 80% de Bruxelles: ils sont cultivés sur le toit des anciens abattoirs dans un système d’aquaponie. C’est un dispositif dans lequel l’eau des bassins où on élève les poissons sert aussi à nourrir les plants de piments.» D’avril à décembre, Thibault utilise la récolte de cette serre. Pour traverser l’hiver, il utilise des piments en saumure qu’il a fait mariner dans un bain de vinaigre.

Pour utiliser ses produits au mieux, il conseille aux personnes qui ne sont pas habituées aux saveurs relevées de d’abord la mélanger avec une bonne cuillerée de mayonnaise. «La sauce piquante est toujours parfaite pour booster un plat un peu fade: une simple tartine au fromage ou une omelette prend une autre tournure avec cette touche épicée. Je trouve important que nos sauces n’occupent pas toute la place dans le plat mais viennent plutôt souligner les saveurs. C’est pour ça que nous ne mettrons jamais sur le marché nos déclinaisons les plus relevées: il y en a déjà assez.»

Chaque bouteille de Swet s’apparente en prime à une petite œuvre d’art. «Je les conçois le plus souvent moi-même: la bouteille doit être aussi appétissante que son contenu. Nous collaborons parfois avec un illustrateur local qui développe un package spécialement pour nous.»

La recette que Thibault partage ici est celle d’une sauce à dipper bien relevée. «Elle est délicieuse pour tremper des légumes crus à l’apéro, mais elle fonctionne aussi à merveille avec des rouleaux de printemps ou dans un sandwich avec un reste de poulet.»

sauce à dipper swet
© Anaïs Lesy

La recette de la sauce piquante à dipper, pour un petit bol

Ingrédients

  • 100 ml de lait de coco
  • 50 ml de jus d’orange pressée
  • 5 c à s de beurre de cacahuètes
  • 2 c à s de sauce piquante, par exemple la Fumado de Swet
  • 1 pincée de sel

Préparation

  1. Mélangez tous les ingrédients.

Bien couverte, cette sauce se conserve au moins deux jours au réfrigérateur.

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