La bistronomie par ses chefs

Aurélie Wehrlin Journaliste

Santiago Torrijos et Destin Ekibat, de l’Atelier Rodier

Le passeport. Santiago, 38 ans, est colombien, Destin, 37 ans, est congolais. Leurs routes ascensionnelles de la haute cuisine française se sont croisées aux fourneaux de l’hôtel Westminster à Paris. Les deux compères ont fait CV commun sous les ors du Bristol et du Plaza Athénée, avant de se séparer, le premier pour aller chez Guy Martin, le second au Raphaël. Ils fédèrent désormais leurs talents dans un vieux rade rhabillé arty.

Le passe-plat. Une cuisine de bistrot, penchée sur les joues de boeuf mijotées, les veloutés de légumes oubliés et subtilement tropicalisée à coups d’igname, de banane plantain et d’un fruit devenu la mascotte de la maison : le citron vert. « J’adore cet agrume, s’enthousiasme Santiago. Son zeste bouscule la classique tarte au citron et son jus réveille une sauce grand veneur ! »

Le plat signature : le tourteau en ceviche. Dans leurs classes palace, ils en ont vu défiler, du tourteau, ce noble crustacé des côtes françaises. Ici, ils lui font voir du pays à coups d’avocat, de piment, de coriandre et, bien sûr, de citron vert. Et ne dites surtout pas à Santiago que le ceviche est péruvien : « C’est une spécialité de tous les pêcheurs d’Amérique du Sud ! »

Simone Tondo et Michael Greenwold, de Roseval

Le passeport. Ce duo d’expats planque au pied de l’église de Ménilmontant. Michael Greenwold et Simone Tondo, respectivement 24 et 28 ans, un jeune tandem italo-britannique débarqué à Paris parce que « la France est la base de la cuisine », ont fraternisé à la Gazzetta du Suédois Petter Nilsson (Paris XIIe), avant d’ouvrir leur cagibistrot, révélation 2012.

Le passe-plat. Ils revendiquent une cuisine populaire chic, « une cuisine empreinte d’idées plus que de style ». Raviolis de pomme de terre, de la ricotta et un filet de haddock… Une base bistrotière à l’inclination italienne doublée de quelques touches anglo-saxonnes. Origines obligent…

Le plat signature : le foie-gras aux palourdes. Voilà le résultat d’une audacieuse superposition. Un pavé de foie gras poêlé, des palourdes nues, des champignons crus marinés, du pamplemousse qui traîne ses quartiers… C’est avec ce genre de signature que Roseval garde sa patate.

Yosuke Yamaji, de L’Office

Le passeport. Né à Osaka, c’est à Tokyo que le trentenaire, Yosuke Yamaji, a été biberonné à la cuisine française, incontournable dans le pays depuis l’arrivée d’un certain Bocuse dans les années 60. Mais lui rêvait de faire « de la cuisine française en France, l’extase de l’exil culinaire ».

Le passe-plat. « J’ai beaucoup voyagé et échangé sur la cuisine. » Résultat, c’est un tiroir à idées, où la framboise et la betterave escortent les gambas, parfaite agrégation de toutes ces influences. Pour lui, la cuisine n’est pas un art mais une affaire de goût : « Je ne fais pas de peinture dans l’assiette. »

Le plat signature : l’aubergine au miso. Avec un point de départ très japonais pour ce plat, il lui fallait une viande « au goût clair », un filet mignon, cuit doucement et qu’il sauce d’un mélange de yaourt à la grecque, de wasabi, de mayonnaise et de citron. Crémeux, tendre et croquant… L’histoire d’un parfait équilibre.

Hayden Clout et Matt Ong, d’Albion

Le passeport. Hayden Clout, Néo-Zélandais, 36 ans, sommelier de formation, a navigué chez des cavistes de Nouvelle-Zélande et de Grande-Bretagne avant de s’amarrer au bar de Fish (rue de Seine). Le Britannique Matt Ong, 37 ans, a été formé entre Londres et Paris, pour atterrir à son tour chez Fish.  » Nous étions les deux seuls à ne pas parler français, cela rapproche forcément.  » Ce qui les unit, c’est cette envie commune de s’ancrer dans le patrimoine, à leur façon. Ça donne Albion (l’ancien nom de l’Angleterre), une cave à manger moderne tout en murs de pierre, blindés de casiers à bouteilles, tables en bois et parquet grinçant.

Le passe-plat. « Très français avec un petit twist anglais. » Matt dissimule dans sa crème d’héliantis une touche de fromage stilton, propose en dessert une banane caramélisée Eton mess, en référence au collège d’Eton.

Le plat signature : une custard tart. Dessert très populaire outre-Manche, c’est une sorte de flan à la crème anglaise. Le chef y ajoute un zeste de noix de muscade et y apporte sa British touch avec un étonnant chutney rhubarbe gingembre.

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