Indigeste, le foie gras? Allez donc dire ça aux (jeunes) Belges!

Le foie gras a toujours la cote auprès des (jeunes) Belges - Getty Images
Le foie gras a toujours la cote auprès des (jeunes) Belges - Getty Images
Kathleen Wuyard-Jadot
Kathleen Wuyard-Jadot Journaliste

Plaisir (coupable) pour les uns, produit inconcevable pour les autres, le foie gras n’a pas son pareil pour diviser une tablée. Si ces dernières années, il aurait presque pu sembler condamné à disparaître en raison de ses méthodes de fabrication critiquées, surprise: en Belgique, il a encore de beaux jours devant lui. Et les jeunes consommateurs en sont particulièrement friands.

Pour refroidir l’ambiance à une table de fêtes en moins de temps qu’il n’en faut pour réaliser son erreur, nul besoin de parler de l’invasion de l’Ukraine ou de la Palestine ni même, avec une pointe de nostalgie, du (vaccin contre le) COVID: il suffit de regarder dans son assiette. Car qui dit festins de fin d’année dit souvent liste bien précise d’ingrédients festifs en tête de laquelle, bien que contesté, figure le foie gras aux côtés des huitres et du saumon fumé.

Emblème de la cruauté suprême pour l’un, délice ultime pour son voisin, cet organe élevé au rang de mets fin par la gastronomie française n’a pas son pareil pour diviser. Et pas seulement en société, puisqu’en interne aussi c’est tiraillé. Du moins, s’il faut en croire celles et ceux qui jurent qu’ils n’en mangent jamais… « sauf à la Noël ».

Cruel et donc forcément appelé à disparaître de nos tables, le foie gras?

Pas si vite. C’est qu’en Belgique, il reste (très) populaire, notamment auprès d’une jeune génération qu’on accuse facilement d’être woke à l’extrême, et qui ne boude pourtant pas son plaisir au moment de se tartiner le pain brioché.

Le foie gras séduit les jeunes consommateurs

C’est en tout cas ce que laissent supposer les résultats d’une campagne pédagogique menée auprès des jeunes Belges âgés de 18 à 34 ans et co-financée par l’Union Européenne et le Comité Interprofessionnel des Palmipèdes à Foie Gras (CIFOG) en collaboration avec le collège des producteurs.

Une alliance dont certains des membres ont des intérêts (très) concrets à défendre, même s’il en va en réalité… de l’économie nationale. Bien que peu de Belges le sachent, le royaume est en effet le 5e producteur européen (et le 7e au niveau mondial) de foie gras, avec 12 tonnes produites en 2023.

S’il ne dispose pas de chiffres similaires pour les quantités ingurgitées, le CIFOG l’affirme cependant, nous serions également « l’un des principaux pays consommateurs dans le monde » et « le sondage le confirme » puisque selon les données récoltées dans le cadre de la campagne, 60% des Belges et 63% des jeunes affirment apprécier le foie gras.

Réalisé entre juin et juillet 2024 sur un échantillon de 1.000 Belges âgés de plus de 18 ans, le sondage auquel le Comité des Palmipèdes fait référence comporte quelques données (pas si?) surprenantes.

Ainsi, les hommes en seraient plus friands que les femmes, avec 68% d’amateurs de sexe masculin, contre 52% seulement de femmes se disant fan de cette préparation bannie à la table du Roi Charles III pour cause de cruauté animale. Autre contraste: c’est au sud du pays qu’on le préfère, peut-être sous l’influence de la gastronomie française, avec 78% des francophones appréciant le foie gras, contre 47% des néerlandophones.

Et contre toute attente, si on classe les sondés en fonction de leur âge, les plus jeunes (18-34 ans) en sont les deuxièmes consommateurs, avec une proportion de 57.2%. Soit derrière les 64.8% de gourmets âgés de 55 ans et plus qui en consomment, mais devant les 35-54 ans, qui ne seraient « que » 56.54% à apprécier le foie gras.

En outre, 22% des consommateurs les plus jeunes confient même en avoir consommé « davantage sur les douze derniers mois » par rapport aux douze mois précédents.

Graisse Anatomy

Du pain (brioché) bénit pour les producteurs de Belgique et d’ailleurs? Du côté du CIFOG, en tout cas, on dénonce les « fausses idées » qui entachent la réputation du foie gras, et on assure que « le secteur du foie gras belge peut se targuer de se conformer pleinement aux exigences établies en matière de bien-être animal », en « adhérant totalement à la Charte européenne garantissant les 5 droits naturels des canards ».

Soit, en l’occurence:

  1. L’instauration par l’éleveur d’une relation homme-animal rassurante et satisfaisante
  2. L’apport d’une alimentation adaptée et d’eau potable en libre accès permanent
  3. L’installation d’un environnement confortable et sain
  4. Le maintien et le contrôle des bonnes conditions d’hygiène et de santé
  5. La préservation des comportements naturels de l’espèce

Une (trop) maigre consolation pour les détracteurs du foie gras, qui militent pour son interdiction pure et dure, et pas seulement dans les cuisines de Buckingham Palace?

Probablement que oui.

Pour les consommateurs belges, par contre, cela semble suffire. D’ailleurs, assure encore le CIFOG, « il est important de préciser que l’engraissement, aussi appelé le gavage, n’est pas douloureux pour les canards grâce à leur anatomie adaptée ».

Une affirmation à prendre pour argent comptant, car il ne nous a pas été possible de demander son avis à un palmipède. Mais quel que soit votre position sur la question, la lecture de cet article vous aura au moins fourni de nouvelles données à partager lorsque le sujet fera immanquablement son apparition lors des repas de fêtes.

Joyeux Noël?

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