L’architecte américain au look de biker californien a réussi à donner aux concept stores des grandes maisons de couture leurs lettres de noblesse. Il vient de terminer l’aména-gement de la nouvelle boutique Zegna au cour du Faubourg Saint-Honoré.

On vous qualifie souvent de  » gardien de l’identité des marques « . Quelle est pour vous celle de Zegna ?

C’est assez facile à appréhender : Zegna est une marque masculine, premium, avec un ADN dans le textile. Je pars de là pour imaginer un univers qui renforce cette identité de toutes les manières possibles, par le choix des matériaux, des couleurs, des £uvres d’art exposées aussi. Le bois rappelle le chevron des tissus. La photo de Frank Thiel que l’on trouve à l’étage, c’est un zoom sur un détail d’un métier à tisser.

La mode vous a-t-elle toujours passionné ?

Jamais ! Pendant toute ma jeunesse, j’ai traîné en jeans et tee-shirt comme n’importe quel étudiant des beaux-arts. Dans les années 80, lorsque j’ai commencé à travailler pour Armani, croyez-le ou pas, mais je portais des costumes à lui, coupés dans du tissu Zegna d’ailleurs ( rires). À l’époque, je me disais qu’il fallait que j’aie l’air sérieux pour qu’on me prenne au sérieux. J’adoptais le look qui allait avec la posture que l’on attendait de moi. Et j’aimais ça. Aujourd’hui, j’ai assez de succès pour pouvoir faire ce que je veux.

J’ai quand même un peu de mal à croire que vous ne soignez pas du tout votre look…

( Rires). Si je m’habille en cuir des pieds à la tête, ce n’est pas pour attirer l’attention, même si, bien sûr, je sais qu’on me remarque. Je suis arrivé à un stade de ma vie où je ne fais plus rien pour plaire aux autres.

De quoi êtes-vous le plus fier ?

La tour Chanel de Ginza, à Tokyo. Pour ce bâtiment, nous avons travaillé pendant plus de dix-huit mois avec Saint-Gobain pour mettre au point un verre spécial qui, de l’extérieur, ressemble à celui d’un écran de télévision mais qui permet aux gens qui se trouvent à l’intérieur de pouvoir voir dehors. Une véritable prouesse technologique.

Un rêve d’enfant ?

Je voulais être peintre ou sculpteur. J’ai fait mes études à l’université de Cornell où je pouvais prendre l’architecture en option. Un bon architecte, c’est être un artiste fort en maths. Et je suis très, très fort en maths ! Je tiens ça de mon père qui était ingénieur. Très vite, je me suis rendu compte que je ne pourrais jamais égaler des types comme Warhol ou Lichtenstein. À l’inverse, le champ de l’architecture me semblait largement ouvert.

Le talent qui vous fait défaut ?

J’ai joué du piano pendant quatorze ans. Mais j’ai arrêté à l’adolescence. Aujourd’hui, j’en ai un chez moi mais je n’ose le toucher que si je suis sûr qu’il n’y a personne dans un rayon de 20 kilomètres.

Vous ne pourriez pas vivre sans…

Faire du sport. Je deviens dingue sinon. Et mes motos bien sûr. J’en ai une pour chaque jour de la semaine. Enfin, c’est une façon de parler car elles sont éparpillées dans mes différentes maisons. Triumph et Ducati pour la ville, Harley pour mes road trips le long de la côte ouest.

Plutôt piste noire ou piste verte ?

À votre avis ! ( rires). Noire bien sûr, même carrément hors piste, comme pour tout ce que je fais dans la vie. J’ai une maison à Aspen et je skie beaucoup en hiver. J’ai une bande de potes là-bas, des pisteurs qui sont aussi passionnés de moto. On se retrouve deux fois par an pour deux semaines. Ça me remet les idées bien en place.

ISABELLE WILLOT

 » UN BON ARCHITECTE, C’EST UN ARTISTE FORT EN MATHS. « 

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