Dans la campagne du nouveau parfum Wanted, Demi Moore porte au poignet l’un de ses bracelets. Un lien subtil au design du flacon que Hervé Van der Straeten a dessiné. Rencontre avec ce bijoutier d’exception, créateur de meubles et de luminaires précieux.

Qu’il s’agisse d’une console, d’un tube de rouge à lèvres ou d’une bague en laiton recouverte à l’or fin, les objets d’Hervé Van der Straeten sont tous nés d’un coup de crayon. Son carnet de croquis ne le quitte jamais et tout ce qui l’inspire – un tableau aperçu à la Foire de Bâle, une architecture audacieuse croisée au détour d’un voyage – s’y retrouve crayonné, d’une manière ou d’une autre. Le trait est net, précis et la rature absente.  » Vous savez, quand dessiner, c’est votre métier, c’est comme si vous aviez un logiciel 3D intégré dans le cerveau « , sourit-il, comme pour justifier la perfection de ses esquisses. Au fil des pages de l’un de ses carnets, on devine en réduction, sur une page de gauche, l’ombre sensuelle de ce qui deviendra le flacon de Wanted, le nouveau jus de Helena Rubinstein.  » C’était ma première idée, se souvient le créateur parisien. Elle m’est venue très vite. J’ai fait d’autres propositions, bien sûr, qui n’ont servi finalement qu’à valider celle-là. Dès le départ, c’était la bonneà « 

Pour cet amoureux des formes et des matières, l’idée d’opposer un drapé moelleux tout en rondeur à la rigueur des angles d’un carré s’impose comme une évidence.  » Je voulais évoquer un féminin assumé, tout sauf mièvre, à l’image du caractère de Demi Moore qui incarne le parfum mais aussi de la personnalité même de Helena Rubinstein « , détaille le designer parisien. Le ruban de métal qui enserre le verre rappelle le bracelet que porte au poignet l’égérie de la campagne. Lien symbolique à l’homme qu’elle aime, le bijou est signé HVdS, bien sûrà

Le travail du métal pour en faire des parures, c’est un peu ce qui a lancé Hervé Van der Straeten. Alors qu’il est encore étudiant des Beaux-Arts, en section peinture, les bijoux qu’il dessine attirent l’attention des plus grands couturiers. Il crée pour Lacroix, Gaultier, Givenchy, Saint Laurent, s’entoure des meilleurs artisans et ouvre son atelier de production. Tout ce qui sort de chez lui est façonné, martelé, poli à la main. C’est avec une vision d’artisan qu’il choisit en parallèle d’aborder le design.  » D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu envie de créer des objets, rappelle Hervé Van der Straeten. Dans mes cartes de croquis d’adolescent, il y avait plus de lampes que de bijoux.  » Ses meubles – des pièces uniques ou des éditions limitées – séduisent les collectionneurs et les architectes d’intérieur. Sa galerie du Marais qui fête ses dix ans d’existence exposera à partir du 24 novembre prochain ses nouvelles créations. Chez lui, c’est la forme qui prime : viennent ensuite les jeux sur les matières – le métal bien sûr mais aussi le bois, le marbre, le cristal, la fibre de carbone – et les effets d’optique qu’il peut obtenir d’un laquage soigné.

 » Quand je travaille pour ma galerie, je suis égoïste, confesse-t-il. Je me fais plaisir avant tout. C’est l’un des avantages d’avoir toujours été indépendant d’un éditeur. Je ne fais que ce que j’aime et en cela j’ai beaucoup de chance. Ces dernières années, le marché de l’art a tiré celui du design vers le haut.  » Lorsqu’il se frotte à l’industrie, en créant pour le secteur ultra- compétitif de la beauté, il tente de sublimer l’utilitaire. Ses objets sont souvent devenus cultes comme la bouteille  » goutte  » de J’Adore de Dior ou le bâton de rouge à lèvres Kiss Kiss de Guerlain.  » Quand je crée un flacon ou un poudrier, je suis proche du quotidien des femmes, explique-t-il. La sensualité, au toucher, est très importante. Un parfum, c’est une part de rêve, c’est impalpable et je lui donne une identité visuelle. Ce qui fait qu’au final un objet sera raffiné, c’est une succession de petits détails souvent imperceptibles de prime abord. « 

 » Je réfléchis comme un bijoutier, précise Hervé Van der Straeten. Mes pièces, aussi spectaculaires et festives soient-elles, sont conçues pour être portées. Je suis la même démarche pour un flacon de parfum. Je ne cherche pas à proposer un objet bizarre, ostentatoire ou tellement étrange qu’il faille se demander comment le prendre en main pour l’utiliser.  » Tous les (bons) designers vous le diront : la simplicité bien pensée n’a pas de prix. On appelle cela le luxe ultimeà

Carnet d’adresses en page 120.

Par Isabelle Willot

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