Les beaux jours sont là et se racontent à coups de pétales. Les fragrances florales titillent nos sens en jouant, aussi, sur une belle partition émotionnelle… Rose ou muguet ? Iris ou jasmin ? Choisissez votre parfum selon votre fleur fétiche.

Si la pivoine vous chante

Aussi gracieuse mais moins solennelle que la rose, la pivoine est apparue dans la parfumerie plus récemment. Trop subtil pour être extrait de la fleur elle-même, son parfum est un savant travail de reconstitution où l’on croise des nuances de roses sauvages et des arômes secrets de fruits rouges. Son charme aérien s’exprime plus volontiers dans des bouquets composés que dans des apparitions de star, en solo. Très romantique, Love in Paris de Nina Ricci (3) déroule son tapis de roses et de pivoines sur un sillage de velours abricot et de quelques accents de vanille. Impeccablement ficelée, la fragrance renoue avec les codes de la maison, tout en raffinement et en délicatesse, sans excentricité. En version plus glamour, on retrouve la pivoine dans Pivoine Angel de Thierry Mugler(2). Son odeur délicate et aérienne est réchauffée par la chaleur sensuelle et sexy du patchouli. La pivoine la plus trendy ? C’est Burberry qui la cultive et la glisse dans un somptueux bouquet de roses, clémentines, chèvrefeuille, fleurs de tiaré et jasmin. Style britannique, élégance décontractée, Burberry London(1) ne manque pas d’humour. Le flacon se glisse dans le tartan icône et devient ainsi un accessoire de mode.

L’esprit iris

Extrait de son rhizome (racine épaisse et volumineuse) et non de sa fleur, le parfum d’iris est riche de facettes boisées et poudrées. Ingrédient luxueux de la parfumerie traditionnelle, il recrute ses aficionados parmi les connaisseurs et les amateurs de qualité et de sillages de caractère. Blanc ou noir, sec ou poudré, l’iris habille la peau d’une sensualité divine. Iris Nobile d’Acqua di Parma (1) en exploite tous les mystères. Ses accords tendres se mêlent aux essences d’agrumes, aux notes pétillantes de fleur d’oranger et aux arômes puissants des cristaux d’ambrette et de la vanille de Madagascar. Un sillage très classe qui ne passe pas inaperçu. Dans la grande tradition de la parfumerie made in Italy, Cerruti 1881 Collection (3 ) revisite les odeurs authentiquement italiennes. La mandarine de Sicile, la feuille d’olivier Corregiolo, le raisin Sangiovese, le cyprès de Toscane et, en guest star, l’iris de Florence, tissent une matière luxueuse et élégante, mais tout de suite familière, dans laquelle on se blottit avec volupté. L’écriture de Cher Michel Klein (2) est fluide et aérienne comme une soie poudrée tout en légèreté. Farine de rose, sable d’iris noir, talc de santal blanc, trois poudres précieuses et délicates qui se fondent et se confondent à la chaleur de la peau.

Jasmin absolument

Petit arbuste à fleurs blanches, originaire de Perse et importé au xvie siècle en Europe, le jasmin est aujourd’hui cultivé dans le Midi de la France, en Espagne, au Maroc, en Algérie, en Egypte et en Inde. Les fleurs sont récoltées avant le lever du jour pour préserver ses effluves. Son procédé d’extraction ainsi que son très faible rendement expliquent son coût exorbitant. Une odeur suave mais incroyablement intense, la richesse et la complexité de ses différentes facettes lui ont valu depuis l’Antiquité une place de choix dans la création de parfums. Plus récemment, Organza de Givenchy(2) lui est quasi entièrement dédié. Un soupçon de chèvrefeuille, ainsi que quelques accents boisés et cuirés se déploient autour de la facette florale sensuelle du jasmin d’Inde. La récolte 2005 fut exceptionnelle, ce qui a permis une édition millésimée de la fragrance. Le jasmin s’y manifeste en note majeure comme un soliflore, racé, tendre et raffiné. Avec une grâce sublime, il invite aux vertiges de la sensualité. Et puis, il y a  » le  » succès du xxe siècle : le N° 5 de Chanel. Le jasmin de Grasse, unique et inégalable et la Rosa Centifolia, originaire du même endroit, sont au c£ur du secret de la composition de ce chef-d’£uvre olfactif. A découvrir aujourd’hui, une déclinaison tout aussi raffinée : le gel pour le corps Elixir Sensuel N°5 de Chanel (3). Le jasmin dans un parfum masculin ? Le défi a été relevé avec Kouros de Yves Saint Laurent (1). Un envol frais et fusant de coriandre, quelques notes de bergamote, une bouffée de jasmin, la chaleur exquise de clou de girofle, d’ambre gris et de mousse de chêne : c’est derrière cette apparente simplicité que se cache la construction puissante et virile de ce chypré épicé d’exception.

L’important, c’est la rose

Depuis trois millénaires, la rose nous enivre les sens et fait fantasmer tous les parfumeurs. La reine des fleurs sait jouer sur un vaste registre émotionnel. Suave ou poivrée, transparente ou fruitée, joyeuse ou grave, délicate ou sophistiquée, rien ne lui échappe. Dans Roses des Vergers, la nouvelle Eau de printemps Paris d’Yves Saint Laurent(2), les pétales juteux de la rose des vergers se mêlent aux fleurs de poirier et aux feuilles de cassis pour répandre tout autour un halo de senteurs poudrées, délicates et fruitées. Pour fêter l’anniversaire de ses 15 ans, Trésor s’offre Trésor Eau de Printempsde Lancôme (1), une petite s£ur au c£ur tendre et acidulé, gorgé de notes fruitées de clémentine et de groseille. Sur ce c£ur gourmand, la rose Litchi et la rose Otto diffusent une onde sensuelle suave et intense. Stella de Stella McCartney mêle habilement les charmes d’une parfumerie rétro aux codes de la modernité. Un soupçon de nostalgie pour le flacon et une recette ultratendance : deux roses en c£ur, rose de Bulgarie et rose Centifolia, reliées par un fil d’ambre charnel. L’Eau de parfum Intense Stella Rose Absolute (4) est à la fois naturelle et ultrasophistiquée. L’incomparable parfum gourmand Angel écrit, lui, une nouvelle partition olfactive. Dans Rose Angel de Thierry Mugler (3), un cocktail hespéridé pétillant révèle une rose délicieuse. Son sillage voluptueux et rayonnant est rehaussé de notes sensuelles de patchouli.

La transparence du muguet

Aussi étonnant que cela puisse paraître, les parfumeurs n’utilisent pas d’essence naturelle de muguet. Tous les essais effectués se sont avérés infructueux, le rendement étant trop faible et l’odeur manquant de qualité. Paradoxalement, c’est avec un mélange de matières premières synthétiques qu’on a obtenu l’évocation la plus authentique de la plante : une note rosée subtilement capiteuse et une pointe de verdure très nature. Pour retrouver l’élan floral à 100 % du petit brin à clochettes, on se tournera en premier lieu vers Diorissimo de Christian Dior (3). En version plus contemporaine, on le retrouve dans plusieurs compositions où il est joliment accompagné. Dans Lilia Bella de Guerlain (1) dont le nom évoque la délicieuse musicalité d’un aria de Bach, la note principale est bien entendu le muguet. Puis viennent en ch£ur un bouquet de lilas pétillant d’allégresse et une brassée de roses auréolées de jasmin. Entre deux shoppings, Paris Hilton concocte ses propres parfums. Son dernier opus, baptisé Just Me by Paris Hilton (2), est un filtre d’amour, glamoureux à souhait. Les groseilles rouges et la bergamote côtoient la violette, le muguet, le freesia et la rose blanche. Un charme exotique, pour ne pas dire érotique qui ne manquera pas de séduire toutes les jet-setteuses.

Secrets de tubéreuse

Aussi mythique que le jasmin : la troublante tubéreuse. Somptueuse, capricieuse et entêtante, elle est dédiée aux ensorceleuses et se cueille le matin. La tubéreuse est une intrigante imprévisible et peut rendre la composition suave ou si pénétrante qu’elle suscite soit l’amour soit la répulsion. Elle a jadis ébloui dans Fracas de Piguet. Récemment réédité, ce grand classique reste une référence. Plus près de nous, le caractère vénéneux de la fleur a été superbement mis en évidence dans Tubéreuse criminelle de Serge Lutens (4). Carnal Flower, composé par Dominique Ropion pour Frédéric Malle (3), lui, est le jus contenant, sans doute, le plus important dosage d’absolue tubéreuse. Dans les versions plus  » sages « , on citera Carolina Herrera by Carolina Herrera (2), où le duo tubéreuse-jasmin, admirablement dosé, s’assoupit dans les notes chaudes et boisées de bois de santal et d’ambre. Dans Climat de Lancôme (1), ce grand classique créé en 1967, les senteurs des fleurs de tubéreuse flottent en tendres bouffées, sublimées par les notes de muguet, de narcisse, d’héliotrope et de vétiver.

Les trésors de l’oranger

L’oranger, c’est l’arbre à parfum par excellence. Rien ne se perd, tout est utilisé ! De la fleur (néroli) aux fruits en passant par les feuilles et les rameaux (petit-grain bigarade) on extrait toutes les matières olfactives de l’oranger amer. Résultat : une dizaine de matières premières et une palette d’odeurs qui varient des plus délicats effluves de l’essence de néroli à l’amertume acidulée du petit-grain bigarade en passant par la fraîcheur fruitée de l’orange amère. Cette dernière est employée comme note de tête dans Obsession Night de Calvin Klein (2). On se laisse séduire par ses notes pétillantes d’agrumes, on fond de plaisir sur son accord de gardénia, de rose et de jasmin en c£ur, pour s’abandonner sur un lit d’ambre, labdanum, santal, bois de cachemire et fève tonka. Le petit-grain bigarade est incontournable dans les eaux de Cologne. Il est en vedette dans Cologne Bigarade, composée par Jean-Claude Ellena pour Frédéric Malle (3). Ses notes hespéridées s’accompagnent d’un c£ur teinté de rose, sur un fond de foin, légèrement boisé. Une eau très stylée qui développe un sillage tout en nuances. Emblème de la culture méditerranéenne, la fleur d’oranger règne sans partage dans Armani Code de Giorgio Armani (1). Son odeur contrastée, à la fois fraîche et capiteuse, est exacerbée par la sophistication du jasmin Sambac, par la volupté de la vanille de Madagascar, moelleuse et caressante et par un soupçon de miel.

La route de la vanille

Découverte au Mexique et cultivée aujourd’hui à la Réunion, à Madagascar et en Indonésie, cette liane sauvage de la famille des orchidacées est connue depuis l’époque précolombienne. Elle aurait des pouvoirs sur l’humeur et la santé, voire un effet aphrodisiaque. Mais il est quasi impossible de la cultiver et il faut intervenir manuellement pour obtenir les substances olfactives et aromatiques. Résultat ? La vanille est l’une des épices les plus chères du marché. Depuis 1874, on synthétise la vanilline (principe odorant de la vanille naturelle) en laboratoire. On l’a introduite, pour la première fois, en 1889, dans Jicky, puis dans Shalimar de Guerlain. On la retrouve en guest-star dans la plupart des classiques de Guerlain, dans Vanille Exquise d’Annick Goutal (1) (où elle est enveloppée de baumes et de muscs) et comme note de fond dans de nombreux orientaux. Hypnôse de Lancôme (2) mêle admirablement les accords secs et ambrés du vétiver et les notes boisées et animales de la vanille. Résultat ? Un jus moderne et féminin qui agit comme un philtre sensuel et envoûtant. Allure Sensuelle de Chanel (3) est construit comme un diamant olfactif, autour de six facettes. Il y a, bien sûr, des agrumes, des fleurs, des fruits et des bois, mais c’est la facette orientale qui donne le ton, avec un accord inédit de vanille et de patchouli ambré. Must de Cartier (4), créé en 1981, est un grand oriental, élégant comme une brassée de jonquilles et de jasmins et soyeux comme la caresse de santal, de musc et de vanille. Un sillage racé qui fleure bon les mystères de la séduction féminine.

Carnet d’adresses en page 72.

Barbara Witkowska

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