Le langage du corps

Anne-Françoise Moyson, journaliste © KAREL DUERINCKX

En une nouvelle exigence de vérité, on a vu apparaître sur la Toile le mouvement #nofilter qui renverse la vapeur d’une ultraperfection photoshopée. Dans la même veine, le body positive est désormais un mouvement. Et l’inclusion est devenue, au pire, un argument de vente, au mieux, un militantisme partagé. En figure de proue, Rihanna et sa collection de lingerie Savage X Fenty inclusive, du S au XXXL. Car la chanteuse et créatrice accueille en son giron toutes les femmes, même celles qui ne se sentent pas « sexy » au regard des « diktats de la société ». Version lambda, vous et moi. Version people, Bella Hadid, Demi Moore ou Lizzo, qu’elle a conviées à défiler pour son long clip Vol. 2, diffusé il y a peu sur Amazon Prime Video. Elles portent leurs imperfections comme des titres de gloire, à peine vêtues de dentelle et autres colifichets en forme de croix. Tandis que la gamme couleurs avoisine My Little Pony et que les modèles ne transcendent guère les codes du genre (voyez le « Spank me body harness » / « harnais fesse-moi »), la danse sauvage sauve tout. Car comment revendiquer notre corps si nous ne libérons pas notre corps dansant et ne le poussons hors de ses petites limites? Le sait-elle, Rihanna, qu’elle rejoint la pensée de la militante féministe Silvia Federici (Par-delà les frontières du corps, Divergences) prônant « un corps en expansion par-delà les frontières de la peau », un corps « dont le mouvement serait aligné avec le cosmos et qui trouverait sa place dans un monde où la diversité n’est pas une source de divisions et d’antagonismes mais une richesse commune »? Quand viendra le Grand Soir, il ne faudra pas oublier de danser.

Anne-Françoise Moyson, journaliste

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content