Le van l’emportera

Nicolas Balmet © Karel Duerinckx

Posez donc la question à un féru de véhicules mythiques: s’il pouvait choisir entre l’Aston Martin de James Bond, la De Lorean de Retour vers le futur ou la Cadillac de SOS Fantômes, avec laquelle partirait-il en vacances? Vous verrez apparaître une goutte de sueur sur le front de votre interlocuteur, car il y a des chances pour que ce soit plutôt… le combi VW de Little Miss Sunshine qui accapare son esprit à l’évocation du verbe « partir ». Parce que le gaillard a (sans doute) des enfants et qu’il est forcément au courant pour le phénomène « van life » qui est en train d’agiter la planète à coups de « Ouais, le van, c’est vraiment un garant de liberté et un acte écologique hyper-important à l’heure où la planète se meurt ». Attention, une seule partie de cette affirmation est correcte: le Boeing est encore en train de manoeuvrer sur le tarmac (veuillez attacher vos ceintures et refermez vos tablettes) que votre camionnette vintage l’a déjà battu à plate couture en matière d’empreinte carbone rien qu’en faisant le tour du bloc parce que vous avez oublié vos lunettes de soleil. Par contre, côté liberté, on valide. Ce n’est pas pour rien si ces baroudeurs de hippies ont fait du combi VW à la fois leur symbole d’insouciance et leur seconde résidence, avant que l’histoire ne le transforme en icône aux fleurs impérissables.

Non content de faire planer les hippies, il est accueilli u0026#xE0; bras ouverts par les surfeurs californiens.

C’est bien simple: on identifie tellement l’engin au Flower Power qu’on oublie souvent qu’il est né… au début des fifties. Il y a tout juste septante ans, peu après avoir intrigué les visiteurs du salon de Genève, il est présenté aux foules sous le nom de Samba. Avec sa carrosserie bicolore, sa silhouette inspirée de celle de la Coccinelle, ses vingt-trois fenêtres (si si! ) et son toit ouvrant, il ne passe pas inaperçu. Dans un premier temps, Volkswagen vante ses mérites en tant que « véhicule utilitaire ». Mais la légende raconte qu’un jour, un officier britannique se met à rêver d’y aménager un lieu de travail et un espace pour dormir, suppliant l’usine allemande de l’aider à exaucer son voeu. L’équipementier Westfalia – qui façonne aujourd’hui les camping-cars du monde entier – se charge du reste, en dessinant un modèle avec banquette, table rabattable et clic-clac. Le succès est immédiat et intense pour cet hôtel sur roues qui nécessite bientôt la construction d’une usine à Hanovre entièrement dédiée à sa fabrication. Et puis, ça n’a l’air de rien, mais un objet automobile européen qui réussit à s’en aller conquérir le coeur de la vaste Amérique, ce n’est pas si courant. Non content de faire planer les hippies, il est accueilli à bras ouverts par les surfeurs californiens, qui ne cesseront jamais de lui vouer un culte.

Aujourd’hui, près de six décennies après avoir garni la pochette de l’album The Freewheelin’ de Bob Dylan, le van aux yeux ronds reste le roi incontesté du bitume et des road trips. Rien d’étonnant à ce que la horde « van life » soit désormais prête à tout pour s’en procurer un exemplaire d’époque… bien plus onéreux que jadis. Des assoiffés de liberté qui, bientôt, pourront enfin fermer le clapet des médisants affirmant que leur camionnette est un affront aux éco-révoltés du monde entier: la version 100% électrique est prévue d’ici 2022. Mais soyons tout à fait honnêtes: rien ne dit qu’avec le bruit du moteur en moins, ce sera la même histoire…

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