L’auteur imagine un monde du travail angoissant. Son héros, l’Enquêteur, doit élucider le mystère de suicidés, sous l’emprise d’une Entreprise. Le voici propulsé dans un flipper, flippant et déshumanisé, à l’opposé de cet auteur dont nous sommes tombés sous le charme.

Qui est l’Écrivain ?

Celui qui se pose des questions sur la pertinence du roman. La littérature a-t-elle encore quelque chose à dire ? L’écrivain tente de faire avancer les choses en espérant en découvrir d’autres.

Est-ce une façon de résister ?

Les artistes sont des empêcheurs de tourner en rond. En cette ambiance consensuelle et anesthésiante, faire une £uvre d’art consiste à secouer, déranger, perturber et lézarder des murs trop lisses.

Votre plus grand rêve ?

Idéaliste, je rêve d’un accord mondial pour cesser la violence. L’homme est une créature intelligente qui s’épuise dans la haine et l’oppression d’autres hommes. Pourquoi ne pas construire quelque chose ensemble ?

Et votre pire cauchemar ?

Celui de mon roman : un monde sans espérance, dans lequel on évolue seul en ne croyant plus en rien.

De quoi avez-vous peur ?

De voir que l’homme ne retient pas les leçons de l’Histoire et que les erreurs se reproduisent.

De quoi vous enivrez-vous ?

De vin. J’aime cette matière vivante, résultat d’un savoir ancestral. Quel miracle de transmuer un fruit en un liquide, qui procure du plaisir au palais et met l’âme en position de rêve et d’hypersensibilité.

Votre prochain projet ?

Le montage de mon second film, Tous les soleils, une comédie à l’italienne avec Anouk Aimée et Clotilde Courau. Il s’agit d’un registre plus lumineux, avec des gens proches de nous qui connaissent nos petits drames.

La dernière fois que vous avez pleuré de joie ?

Quand je sens ma fille immensément heureuse. Ce roman est une farce qui se veut un électrochoc. J’aimerais que sa jeune génération conserve la vigilance, l’indépendance d’esprit et l’envie d’interroger le monde.

Et de désespoir ?

Face à la mort de ceux que j’aime. Je me sens aussi impuissant quand je ne peux pas aider les autres.

Qu’est-il impossible de nous prendre ?

Cette toute petite forteresse qu’on a en soi et qu’on ne dévoile à personne. À côté du moi affectif, social et mondain, ce domaine intérieur renferme notre vraie personnalité.

Vous ne pourriez pas vivre sansà

Les femmes dont je suis un grand admirateur. Impossible d’imaginer un monde sans elles, tant elles suscitent le désir et l’espoir. Ici, mon héros est balancé dans un labyrinthe dépourvu de fil d’Ariane ou de jeune femme.

Où aimez-vous vous perdre ?

Dans l’écriture, que je n’exerce pas dans la maîtrise, mais dans la perdition. Prendre la plume revient à errer dans une forêt sans boussole.

L’Enquête , par Philippe

Claudel, Stock, 280 pages.

KERENN ELKAÏM

La littérature a-t-elle encore quelque chose à dire ?

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