C’est à Schoten, non loin d’Anvers, que l’architecte Philip Mortelmans a ancré une petite maison contemporaine qui tire son équilibre des contrastes entre formes et matériaux. Effet de surprise garanti dans cet environnement de fermettes typiquement flamandes.

Carnet d’adresses en page 76.

Philip Mortelmans, dont le bureau d’architecture est implanté à Deurne, se contente de dire qu’il a  » interprété les prescriptions urbanistiques « . Visualisons donc cette interprétation : un igloo en bois à gauche, une casemate en Inox à droite. Le tout donne une habitation structurée par ses courbes et ses droites en deux  » blocs  » relativement compacts. Le point de jonction entre les deux est une allée longiligne en pierre bleue qui démarre au ras du trottoir et court jusqu’au jardin. En bref, une sorte d’ovni architectural planté dans un décor de fermettes typiquement flamandes.

Le propriétaire est un ingénieur ayant mené l’essentiel de sa carrière dans le secteur de la construction : il souhaitait un cadre de vie novateur. Son épouse, mère de six enfants et grand-mère de quinze bambins, avait des exigences plus pratiques : elle voulait un espace suffisamment grand pour accueillir les réunions de famille. L’exiguïté du terrain (dix mètres sur dix-sept pour l’espace constructible) ajoutant à la difficulté, Philip Mortelmans imagina cette structure duale qui tire son équilibre des contrastes entre formes et matériaux.

Sorte de cocon protecteur drapé de longues planchettes de bois de cèdre, la partie gauche de l’habitation affiche sans complexe son esprit loft : coin télé, salon, salle à manger composent un espace ouvert. Les chevrons en bois qui soutiennent la construction donnent à l’ensemble l’allure d’une coque de navire, mais l’architecte ne se laisse pas prendre au jeu des comparaisons. Adieu paquebot, £uf, igloo…  » C’est simplement une forme qui symbolise le dynamisme de l’espace.  » Les chevrons, composés de plaquettes en Multiplexe, elles-mêmes recouvertes de cèdre, reposent au sol sur des tronçons de rail de chemin de fer. Avec l’appui du maître d’£uvre, dont les calculs en matière de résistance des matériaux n’ont pas été inutiles, Philip Mortelmans a conjugué originalité et maîtrise des coûts.  » Fabriqués de manière classique, ces chevrons auraient largement dépassé le budget autorisé « , épingle l’architecte.

On sent également poindre ce travail en tandem dans la réalisation de la mezzanine qui surplombe l’espace de séjour. Hébergeant un petit bureau, ce plateau flottant est suspendu à la charpente par des câbles supportant chacun une charge de 400 kilos. Habillé d’un épais tapis de laine rouge vif, il tranche d’un coup sec la verticalité et confère, du même coup, plus d’intimité au petit salon télé qu’il surplombe. De simples idéogrammes tracés par un artiste vietnamien sont accrochés là, comme un rappel écarlate du plafond.

L’espace respire la convivialité. Au salon, deux fauteuils monoplaces du designer belge Gérard van den Berg se font face. Un petit canapé des années 1960 a été rénové en cuir noir. L’élément majeur ? Une table-jeu d’échecs. Ses imposantes pièces en plâtre ont une valeur essentiellement sentimentale : elles ont été modelées par l’architecte lui-même alors qu’il n’avait que 8 ans ! Autre création de Philip Moertelmans, mais plus récente celle-là : la table de la salle à manger composée de panneaux de cèdre modulables, avec un piètement métallique. On y ajoute un, deux ou trois panneaux selon l’importance des tablées familiales.

Les dalles en schiste du Brésil, qui déclinent au sol leur gamme anthracite, prolongent l’espace à la fois vers la terrasse et vers la cuisine. De dimensions plutôt modestes, la terrasse met en valeur la table circulaire Gargantua de la collection Extremis. La cuisine, quant à elle, peut s’offrir à la vue des convives ou s’y dérober grâce à une porte coulissante en verre opaque. Compacte et fonctionnelle, elle s’articule autour d’un îlot de travail central et laisse filtrer la lumière grâce à un long bandeau vitré. Bienvenue ensuite dans l’espace géométrique qui forme la partie droite de l’habitation. Ici, le jeu des courbes cède la place aux lignes verticales et horizontales. Rectangles d’Inox en façade, rectangles de verre au-dessus de la porte d’entrée, pourtour vitré pour rompre la monotonie au niveau du premier étage. La construction portante du toit est tellement légère qu’on finit par l’oublier. Ce  » bloc technique « , comme l’appelle l’architecte, regroupe les espaces fonctionnels.

Au rez-de-chaussée, la cuisine, le vestiaire, la salle de bains (composée d’une simple douche et de deux lavabos De Bacino de Duravit) et la chambre principale. Au premier, deux chambres d’amis, avec une petite salle d’eau commune. C’est la finesse des détails qui contribue à l’harmonie de l’ensemble.  » Nous voulions aller le plus loin possible dans le concept « , résume Philip Mortelmans. La passerelle de verre menant au premier étage est aussi mince que possible, l’escalier qui la précède non moins aérien. La lumière trouve ainsi son chemin sans contraintes, contribuant à la sérénité des lieux.

Chantal Samson

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