Le succès planétaire des bilums, ces sacs fabriqués par les tisserandes de Papouasie

© ADEK BERRY / AFP

Dans un petit atelier de Port Moresby, Betty Nabi, 70 ans, fabrique depuis des décennies des « bilums ». Ces sacs artisanaux très solides connaissent un vrai succès à travers la planète, pour le plus grand bonheur des tisserandes de Papouasie-Nouvelle-Guinée.

Penchée sur son ouvrage, elle entrelace avec dextérité des fibres végétales pour donner vie à ces larges sacs qui supportent aussi bien le poids d’un enfant que de lourdes provisions.

Symbole de la fierté de ce peuple autochtone de l’archipel du Pacifique, « bilum », qui signifie « utérus » dans la langue locale Tok Pisin, est très en vogue en Europe, comme en Amérique du Nord ou en Australie. Les magazines de mode comme Grazia, Harper’s Bazaar et Vogue Australia ont publié des articles sur ces sacs à motifs et sur les différentes techniques utilisées pour leur fabrication. Ils sont teints avec des couleurs propres à chaque atelier.

Face à cet engouement croissant, certains redoutent que ce sac, un des piliers de la culture de Papouasie-Nouvelle-Guinée, ne devienne un simple phénomène de mode et une source de profits pour des exportateurs occidentaux. 

« Cela nous rend fières »

Au contraire, pour les tisserandes, ce succès à l’étranger est une source de fierté et leur permet de faire vivre leur famille. Mme Nabi travaille pour l’atelier « Bilum & Bilas » pour un salaire mensuel de 1.000 kinas (263 euros), soit 50% de plus que le salaire minimum.

La fabrication d’un « bilum » peut nécessiter plusieurs semaines. La septuagénaire et trois autres tisserandes en fabriquent chacune jusqu’à cinq par mois. « Cela nous rend fières. Il y a quelque chose de la Papouasie-Nouvelle-Guinée dedans », se félicite la responsable Maureen Charlie, 34 ans. « Il fait partie de notre identité et de notre culture. Nous le faisons toujours et mes enfants le feront encore ». 

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« Dans les villages, les femmes n’ont aucune source de revenu. Parfois, elles n’ont pas le temps de se rendre sur les marchés, ou n’ont pas accès à une route, alors elles tissent et stockent leurs +bilums+ », explique Mme Charlie. Les femmes les plus défavorisées de Port Moresby apportent le fruit de leur travail sur des étals des bidonvilles, au risque de se faire dépouiller de leur stock. « C’est une bonne source de revenus pour ma famille. je fabrique des +bilums+ et je gagne de quoi assurer ma vie quotidienne », explique Cathy Wariapa, 35 ans, qui vend ses sacs tous les week-ends dans un endroit plus sûr: dans l’enceinte d’un hôtel. « Parfois, nous ne vendons pas. Quand il n’y a pas d’acheteurs, nous les ramenons ». 

Aussi pour les hommes

Les sacs sont généralement fabriqués et portés par des femmes mais les hommes de Papouasie-Nouvelle-Guinée sont de plus en plus nombreux à les porter autour du cou. « Si une femme ne porte pas de +bilum+, on dit que ce n’est pas une femme », explique Mme Charlie. Quand elle en porte un, elle dit avoir « l’impression d’être une femme et de venir de Papouasie-Nouvelle-Guinée ». Les précieux sacs sont souvent offerts aux amis et à la famille ou alors utilisés lors de rituels de bienvenue, parfois déposés au sol devant les invités.

Mais la technique du tissage des sacs – dont elles ont hérité de leurs mères et grands-mères – n’est pas seulement, pour elles, une question d’argent. « Nous pouvons faire du +bilum+ à tout moment, pour toujours », affirme Betty Nabi. « Nous ne nous arrêterons pas ».

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