Un vin n’est pas forcément bon parce qu’il est bio… Mais un bon vin bio est un  » plus  » certain. Voici nos 10 coups de cour.

La viticulture française traverse une crise profonde. Hormis le champagne et les étiquettes vedettes des grands crus bordelais, les caves regorgent de vins. La suprématie hexagonale est menacée par le débarquement des crus du Nouveau Monde. Régulièrement des scandales viennent ternir une viticulture laxiste, qui produit trop et perd son identité. Du coup l’écolo qui sommeille sous les papilles rêve de salut avec les vins biologiques. L’ennui, c’est qu’ils n’existent pas. Seuls, les raisins sont concernés. Certes, il y a bien des normes de production, des règlements européens, des organismes gestionnaires (Ecocert). Ainsi, les producteurs qui boudent pesticides, herbicides et autres produits chimiques de synthèse peuvent mentionner  » vin issu des raisins biologiques  » ou  » de l’agriculture biologique « . Et, depuis le 1er janvier 2005, le ministère de l’Agriculture gère un logo AB, attribué après trois ans de reconversion du vignoble. Mais tout cela ne concerne que la culture des raisins et pas l’élaboration du vin. Dès la cave, plus rien n’est réglementé.

La viticulture bio concerne 1,4 % du vignoble français soit quelque 1 500 producteurs. Selon les statistiques, 10 à 15 % d’entre eux seraient convertis à la biodynamie. Une discipline plus restrictive, tenant compte de la nature des sols, des saisons et des influences cosmiques (cycle lunaire)… On y découvre quelques grands noms : la Romanée Conti, le Domaine Leflaive, Lalou Bize-Leroy (Bourgogne), la Coulée de Serrant (Loire), Emmanuel Cazes (Roussillon)… René Renou (directeur de l’Institut national des Appellations d’Origine) a reconnu, en 2005, que les vignerons opposés aux pesticides et aux engrais chimiques avaient  » raison sur le fond  » et qu’ils étaient  » l’avenir des vins de terroir « . Les vignobles concurrents de la France l’ont compris aussi.

Weekend, lui, a organisé une dégustation à l’aveugle… Et vous invite à découvrir ses 10 coups de c£ur. 1. Alsace, Riesling 2004  » Le Kottabe « , Josmeyer.

Ecologiste dans l’âme, Jean Meyer n’a pas attendu la mode du bio pour peaufiner l’une des plus belles gammes de vins d’Alsace. Issu d’un vignoble de 28 ha, situé à Wintzenheim (près de Colmar), ce riesling  » Kottabe  » affiche une teinte or pâle d’où s’échappe une fraîcheur fruitée (agrumes, citron). Emoustillé par de fines bulles de gaz carbonique et embouteillé avant les chaleurs estivales, il évolue dans les meilleures conditions, avec une petite amertume et un soupçon de douceur qui n’alourdit pas la finale. Pour, à 8 – 10 °C, accompagner fruits de mer, tempura de crustacé, matelote de poissons.

13,50 euros. Claes Fish, tél. : 02 733 55 42.

2. Alsace, Riesling 2003  » Tradition « , Charles et Dominique Frey.

Viticulteur à Dambach, à une quarantaine de kilomètres au sud de Strasbourg, ce domaine familial a pour devise  » Respect du terroir et du vin « . Une formule toujours actuelle deux siècles après la création de ce domaine de 10 ha traités en biodynamie. Relativement discret dans ses parfums de fruits mûrs, avec une touche de guimauve, ce 2003 réplique par une bouche d’une certaine rondeur, souple, un peu lourde et oblitérée par une pointe de sucre résiduel. Ce qui lui permet d’escorter foie gras en terrine, coquilles Saint-Jacques à la citronnelle et au gingembre, crabe farci.

7,89 euros. Delhaize.

3. Loire, Cabernet d’Anjou rosé 2004, Château de Passavant.

Convertie à l’agriculture biologique, en 1999, la famille David-Lecomte proscrit désherbants, engrais, fongicides et autres insecticides et réussit à multiplier les cuvées sans sacrifier la qualité. Cabernet franc et cabernet-sauvignon subissent une courte macération pour obtenir une robe d’un rose soutenu et franc, puis fermentent à basse température contrôlée. Joliment parfumé par des petits fruits rouges, du bonbon à la cerise, tendre, contrasté par une touche de sucre rafraîchi par un zeste de citron, ce rosé demi-sec est parfait avec la cuisine exotique et les plats épicés.

6,05 euros. Tricot, tél. : 071 35 88 00.

4. Bordeaux rouge 2004, Château La Chapelle Maillard, élevé en fût de chêne.

En amont de Saint-Emilion, sur les coteaux qui longent la vallée de la Dordogne, cette propriété a toujours préféré les amendements organiques compostés et les préparations biodynamiques aux engrais chimiques. Les travaux de la vigne sont effectués en harmonie avec les  » influences lunaires et planétaires « . Merlot (40 %), cabernet-sauvignon (30 %) et cabernet franc élevés (sans excès) en fûts de chêne génèrent un bordeaux légèrement grenat, traversé d’effluves de bois fumé et de tabac noir avec une touche balsamique. Fruité et de bonne tenue sur un tanin un peu sec, il est tout indiqué avec viandes froides, carbonnades, fondue bourguignonne.

5,49 euros. Delhaize.

5. Chili, Colchagua Valley 2003, carmenère, cabernet-sauvignon, Novas.

Traité selon l’Organically Grown Grapes, ce vin de la vallée Colchagua fait la part belle au carmenère (63 %), un cépage devenu rare dans le Médoc alors qu’il s’est remarquablement adapté au Chili. Il est, ici, complété par du cabernet-sauvignon (17 %) et de la syrah (20 %). Paré d’un sombre violacé, cet assemblage libère des fruits noirs à l’eau-de-vie, des fragrances de bois exotique, des épices orientales et de l’encens. Porté par des tanins mûrs, il voue son exubérance à une côte de b£uf à la moelle, à du chili con carne ou à de l’osso-buco

4,95 euros. Colruyt.

6. Côtes-du-Rhône 2004, Chapoutier.

En biodynamie depuis 2002, cette importante maison de la vallée du Rhône plante quelque 240 ha de vignes, ce qui en fait le plus grand domaine d’Europe appliquant la biodynamie. Ce qui ne l’empêche pas de prendre pied en Australie. Ce vin générique réunit des cépages grenache (60 %) et syrah cultivés sur les sols caillouteux et argilo-calcaires de la rive droite du Rhône, au nord-ouest d’Orange. Fruits, réglisse, fumé survolent une matière fraîche et équilibrée. Servir, vers 14 °C, avec : terrine de gibier, magret de canard, brochette d’agneau à l’orientale. A l’attention des non-voyants, l’étiquette est traitée en braille.

5,66 euros. Colruyt.

7. Côtes du Roussillon 2004, (d.) de blanes.

A une dizaine de kilomètres de Perpignan et à 25 kilomètres de l’Espagne, cette propriété de 85 ha vagabonde dans la garrigue, parmi le thym et le romarin, sur les coteaux du Roussillon. Syrah, carignan et grenache noir creusent un terroir de galets roulés et de schistes. Les rendements limités, de 3 à 4 grappes par pied de vigne, apportent des fruits rouges rafraîchis par un fond végétal et ponctués par une légère amertume. S’il peut paraître un peu austère, il se civilise à table, vers 14 – 15 °C, en compagnie de tagine de mouton, viandes mijotées, stoemp saucisse.

7,23 euros. Catulle, tél. : 02 426 61 00.

8. Loire, Anjou rouge 2004, Château de Passavant.

Dans la même famille depuis 1900, ce château médiéval a toujours été un ardent défenseur du terroir. En 1999, il se convertit aux bienfaits de l’enherbement et des rendements bridés. Ainsi, cet excellent 2004 issu du seul cabernet franc. D’un beau grenat s’échappent des fruits noirs et une note de réglisse. Caractères qui imprègnent une belle unité de bouche, fraîche et structurée par de bons tanins. Un plaisir à partager, entre 14 et 16 °C, avec poulet fermier rôti, côtes d’agneau grillées, entrecôte marchand de vin.

6,05 euros. Tricot, tél. : 071 35 88 00.

9. Loire, Bourgueil 2003,  » Les Vingt lieux dits « , Domaine du Bel Air, Pierre et Rodolphe Gauthier.

Pour cette cuvée, Pierre et Rodolphe Gauthier assemblent les vins de vingt parcelles de terrains différents (argile, graviers, argilo-calcaire) dans l’appellation Bourgueil et conduits suivant les normes Ecocert de l’agriculture bio. Sous un rubis teinté de grenat, ce 2003 développe un bouquet de petits fruits rouges sur des tanins sensibles. Le séjour d’une année dans des fûts de chêne, ayant connu de une à quatre vendanges, apporte un boisé perceptible. A déguster, dans les 3 – 4 ans, avec pain de viande, pigeon, côtes d’agneau, confit de canard.

9,45 euros. Magasin Rob.

10. Loire, Touraine 2004, cabernet franc, Domaine de la Garrelière, Pascale et François Plouzeau.

Depuis 1985, François Plouzeau succède à son père à la tête de ce domaine de 20 ha qui fut propriété du duc de Richelieu (neveu du célèbre cardinal). C’est en souvenir de ce haut lignage que l’étiquette porte l’indication  » Val de Loire – Richelieu « . En 1993, il adopte la biodynamie. Parée d’un rubis éclatant, cette cuvée de cabernet franc reste marquée par son cépage (poivron vert), les fruits et une touche végétale. Fraîche et nerveuse, elle plaira aux amateurs de vins vifs, un peu mordants pour, légèrement rafraîchi, désaltérer charcuteries et pâtés, repas estival et pique-nique.

6,75 euros. Les Tourinniers, tél. : 010 86 72 15.

Serge Tonneau

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