1.Parce que Nicolas Fargues fait partie des jeunes écrivains qui imposent leur griffe. Qu’il scrute la société ou les failles de l’intime, il fouille les recoins insoupçonnés de l’être. Il estime pourtant  » être inadapté à la brutalité du monde. La seule façon d’y participer est d’écrire, afin de mieux voir et faire voir les choses « . Son nouveau livre s’intitule d’ailleurs Tu verras, ou comment un père envisage la vie autrement après la mort de son fils.  » Mon défi : réaliser un roman viscéralement humain sur une souffrance que je n’ai pas vécue.  » Le public et la critique l’ont couronné avec le Prix Télérama/France Culture 2011.

2.Parce que les romans sur la relation père-fils sont rares. Une forme de pudeur semble figer la plume des auteurs.  » La parentalité est tellement liée à la culpabilité qu’il est nécessaire de se regarder sans complaisance pour l’aborder.  » Le héros du roman s’interroge sur ce lien particulier dépourvu de mode d’emploi. Face à son fils,  » il y a la tentation du miroir et la reconnaissance nécessaire d’un être indépendant de soi « . Nicolas Fargues a 24 ans à la naissance de son premier fils.  » C’est lui qui m’a rattaché à la vie. Être père signifie se soucier de ses enfants et perdre son innocence. « 

3.Parce que l’adolescence anime ce roman, qui décrit parfaitement cet entre-deux tanguant.  » Cette période, agaçante et attendrissante, incarne les premiers élancements vers l’autonomie.  » Ni bébé ni homme, Clément se dépêtre dans une chrysalide, où le réel se mêle au virtuel. Son papa divorcé  » doit assumer le rôle de père et de mère « , avec les maladresses que cela comprend.  » On réalise brusquement qu’on ne peut pas protéger son enfant de tout.  » Voici une déclaration d’amour à son petit devenu grand. Il bouscule les repères du père, qui ne peut plus guère rester un éternel ado.  » Je suis content d’avoir des enfants pour accepter de vieillir. Quel plaisir de voir mes fils grandir ! « 

4.Parce que dès les premières pages, Tu verras prend un virage inattendu avec le décès de Clément.  » L’adolescent est promis à la vie, pas à la mort.  » Nicolas Fargues trouve le ton juste pour affronter ce tabou à travers un père meurtri, étranger parmi les siens.  » Rien n’a plus de sens lorsqu’on survit à quelqu’un de sa chair.  » Le héros ne peut qu’être renvoyé aux rendez-vous manqués. Un électrochoc le secoue.  » Avant, il était si amer qu’il ne mesurait pas le prix des choses.  » Cette mort atroce  » lui fait découvrir qu’il était capable d’aimer « .

5.Parce que loin de sombrer dans le pathos, l’auteur croit en l’espoir. Avec Ghislaine. Elle est la dernière à avoir vu Clément avant son accident.  » Peu de gens compatissent au sort d’autrui. Ghislaine fait partie des êtres qui nous aident à continuer à vivre.  » Le héros  » marche avec des £illères. Perdre l’être qu’il aime le plus lui fait saisir le lien qui le rattache au monde « . Telle est la beauté de ce roman sur la vie.  » Je voulais écrire un livre sensible avec un c£ur qui bat « , affirme Nicolas Fargues. Mission accomplie !

Tu verras, par Nicolas Fargues, P.O. L, 194 pages.

KERENN ELKAÏM

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