Faire du vélo dehors, mais à l’intérieur. Immobile, mais dans un bus qui roule. Ça se passe au Brésil et l’idée est moins folle qu’il n’y paraît.

Retrouvez Frédéric Brébant chaque lundi matin, vers 9 h 45, dans l’émission  » Bonjour quand même  » de Jean-Pierre Hautier sur La Première (RTBF radio).

Trop forts, ces Brésiliens. Non seulement, ils font glisser le ballon rond avec un magnétisme savoureux (rendez-vous dans quelques mois pour la Coupe du monde de Football), mais, en plus, ils ont une vision incroyable de l’effort sportif en ville. Prenez le Bus Bike par exemple. Une invention étonnante qui traîne ses quatre roues sur l’asphalte de Rio de Janeiro ( www.busbike.com). A priori, le concept a autant de poids que le parachutage d’un ours blanc en pleine forêt tropicale. Et pourtant, l’idée est géniale. Je vous explique : le Bus Bike est un club de sport mobile qui renferme seize vélos fixes conçus pour l’effort en salle. Concrètement, cela veut donc dire que le bus en question roule dans la ville pendant que ses passagers pédalent  » dans le vide « . A quoi bon, me direz-vous ? On s’est déjà posé plus ou moins la même question, il y a trente ans déjà, au sujet des vélos d’appartement : pourquoi s’enfermer entre quatre murs pour s’adonner à un sport d’extérieur ? La réponse est précisément dans l’énoncé de la question : pour être à l’intérieur, pardi ! En clair : pour éviter le froid, la pluie et toutes ces autres contrariétés liées à la pratique d’une activité en plein air. Bon, d’accord, mais pourquoi faire bouger la salle, alors ? Mais pour voir du pays, re-pardi ! Soit. Mais dans ce cas, pourquoi ne pas rouler directement dehors sur un vrai vélo muni de vraies roues ? D’autant plus qu’à Rio, il fait généralement beau. Ce serait beaucoup plus simple, non ? Eh bien, justement, non. Et c’est là que le concept se révèle génial car cette fois-ci, les contrariétés  » extérieures  » n’ont plus rien de météorologique. Elles sont sécuritaires. Doublement sécuritaires. Avec le Bus Bike, les mordus de la petite reine se moquent non seulement des chauffards à quatre roues qui, habituellement, méprisent les cyclistes, mais ils se préservent surtout des bandits de grand chemin qui pourraient facilement dérober leur engin (je vous rappelle que nous sommes à Rio, une ville au taux de criminalité plutôt élevé…) Bref, avec ce concept inédit, les accros de la pédale musclée pratiquent leur sport favori d’intérieur à l’extérieur (un autre exemple de cette magnifique fusion des contraires qui caractérise si bien notre société), sans la moindre crainte pour leurs biens ni pour leur intégrité physique. Avec, en plus, le réel plaisir d’apprécier le changement de décor permanent. Car la notion de bien-être se savoure là aussi : finis les clips à la sauce MTV qui inondent les écrans télé des salles de fitness sans fenêtre ; bienvenue dans la ville en panorama avec ses bijoux architecturaux, ses places ombragées, ses plages mythiques et ses passant(e)s plutôt bien roulé(e)s. Et ses embouteillages… Que nenni ! Car le Bus Bike est évidemment muni d’un système GPS qui lui permet d’éviter les pièges du trafic. Pas bête. Malgré son originalité et ses indéniables avantages, l’initiative fera de toute façon sourire pour son côté franchement surréaliste (des cyclistes pédalant comme des forcenés dans un bus en mouvement, vous imaginez ?) Pourtant, au-delà de cette dimension fantaisiste, la trouvaille est bel et bien révélatrice de l’air du temps. Un air du temps imprégné de  » bunkerisation  » (traduisez : une envie d’hyperprotection avec le risque zéro en guise de leitmotiv) et de  » commerces nomades  » (traduisez : des boutiques qui n’attendent plus le client mais qui créent la surprise en allant littéralement vers lui). Le Bus Bike mixe audacieusement les deux courants, avec l’effort sportif et le dépaysement en prime. Pas mal.

Frédéric Brébant

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content