Il pèse entre trois et quatre kilos et est composé de huit à douze grandes plumes, constituées elles-mêmes de 240 à 290 petits duvets d’autruche, le tout monté sur une buse en carton enveloppée d’une toile. C’est en tout cas ce qu’annonce Wikipédia, omettant probablement l’un ou l’autre secret de fabrication local. Le chapeau de Gille de Binche (ou des environs) est l’une de ces curiosités typiques au sujet desquelles on ne peut blasphémer. Pour les initiés, c’est un accessoire sacré, arboré avec fierté à chaque carnaval. Pour le public, il s’agit d’une coiffe exotique venue du sud (de Bruxelles), dans des contrées où les hipsters se font rares et la crise plus hargneuse qu’ailleurs. Cet été toutefois, l’objet du culte prend une signification différente… et entre au musée, rien que ça. Pas à celui du Masque, dans la cité desdites festivités, mais bien à la capitale, dans le cadre d’une expo… de mode ! Et ce n’est pas une première d’ailleurs, le couvre-chef ayant déjà inspiré le créateur belge Jean-Paul Lespagnard pour sa collection printemps 2013. Et là, c’est le regard qui change, cet attribut de guindaille devenant tout à coup  » une mise en abyme de la belgitude « , comme l’explique Didier Vervaeren, commissaire de Les Belges, une histoire de mode inattendue, qui ouvrira, le 4 juin prochain, au Palais des beaux-arts.

Une anecdote certes, dans ce programme richement fourni que nous proposent, dans les semaines à venir, le MAD Brussels et Bozar pour leur Summer of Fashion. Mais ce détail nous souffle une idée qui dépasse de loin le cadre de cette tradition régionale, qui va bien au-delà de ce microcosme hennuyer, de ses cotillons, de son patrimoine… Et si, pour ces mois de vacances, nous modifiions simplement notre vision des choses ? Et si un  » bièsse tchapia « , comme on dit en wallon, était élevé au rang d’oeuvre d’art ? Et si le ciel triste et lourd de nos soirées  » estivales  » était apprécié pour son superbe dégradé de teintes, du gris au rouge en passant par le bleu tempête ? Et si nos congés au plat pays se métamorphosaient en mille occasions de découvrir des trésors ignorés de notre terroir ? Et si nous nous concentrions sur l’instant le plus agréable de notre journée plutôt que sur les contraintes quotidiennes ? Et si finalement le verre était à moitié plein ? Le philosophe Alain (1868-1951) disait :  » le pessimisme est d’humeur, l’optimisme est de volonté « . Il ne tient donc qu’à nous d’envisager les événements autrement, de leur donner de la couleur, de la saveur, de tenter de mettre des paillettes dans nos routines, de faire d’un costume folklorique une pièce fashion et d’un sombre moment les prémices d’un jour meilleur. A quand le prochain Spritz entre collègues ?

Fanny Bouvry

Et si, pour ces mois de vacances, nous modifiions simplement notre vision des choses ?

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