Soumise à l’aridité du désert de l’Arizona, l’architecture de l’Américain Michael P. Johnson fait corps avec l’environnement. S’effaçant avec intelligence, elle réinvente, à l’horizontale, le dialogue intérieur-extérieur à travers de nombreuses parois vitrées.

« Quand on foule le sol ou quand on construit en plein désert, chaque geste s’apparente à celui d’un envahisseur. Aussi, tout bâtiment doit respecter l’environnement et dialoguer avec lui comme s’il venait se poser sur la Terre avec attention « , lance l’architecte américain Michael P. Johnson, au milieu des cactus, en Arizona. Construite pour un jeune et riche collectionneur à Scottsdale, banlieue chic de Phoenix, cette résidence se déploie sur un axe unique, vitré de part et d’autre pour maximiser l’influx lumineux. Protégée du rayonnement extrême par une large chape horizontale, la Bradley Residence s’insère parfaitement dans l’environnement, grâce, notamment, à un plan d’eau-miroir, qui reflète les collines rocheuses alentour.  » Érigée comme une sculpture, l’architecture ne doit pas faire corps avec le sol mais, au contraire, le laisser respirer. C’est sans doute pourquoi j’ai toujours envie de créer des ponts au-dessus des éléments, de suspendre les habitations, de laisser couler la vie sous leur assise, ponctuée de pilotis. Pour éviter le contact avec la poussière sèche, je crée des structures qui enjambent les creux du désert et ses lits asséchés, qui amènent un courant frais sous la maison et protègent le désert « , poursuit-il.

Débarqué du Wisconsin il y a près de trente ans, Michael P. Johnson se souvient de son premier contact avec la sécheresse :  » Quand j’ai décidé de m’installer à Cave Creek, en périphérie de Phoenix, j’ai tout de suite appréhendé le désert comme un élément à part entière. Pour cela, il m’a suffi de voir la manière dont le soleil transperçait la structure et imposait une compréhension optimale de l’orientation, se souvient-il. Depuis, j’ai développé un répertoire où la transparence est primordiale et permet une continuité parfaite avec l’extérieur. Vivre dans le désert c’est faire corps avec lui, pouvoir l’observer à chaque instant, laisser son immensité pénétrer l’espace de vie. Nous serons à jamais des intrus dans cet environnement et si j’y érige une résidence, elle doit donner l’impression à ses occupants de s’effacer pour laisser place à une vue dégagée, à une réflexion pleine et entière de l’aridité qui l’entoure.  » In fine, la Bradley Residence impose sa structure épurée pour laisser libre cours, à l’intérieur, à la vie quotidienne et aux mouvements du soleil. Une porosité intérieur-extérieur bienvenue au pays des grands espaces, où l’on apprivoise les cactus comme autant de présences humaines.

Pour l’architecte, dans cette résidence comme dans les précédentes qu’il a créées, la pureté de la forme prime. Rappelant les préceptes de l’architecture visionnaire de Mies Van der Rohe ou de Le Corbusier, il explique :  » L’utilisation du verre a libéré l’architecte tout comme celle du béton a libéré l’ingénieur de contraintes formelles. Le verre permet à l’architecture de se déployer dans toutes les directions, tout en ramenant l’extérieur à l’intérieur de la maison.  » Puis il fait rapidement référence à l’£uvre du peintre Josef Albers (1888 – 1976), un des initiateurs de l’art optique :  » Si l’on s’intéresse à son travail, on prend conscience que l’ensemble géométrique se divise en formes ou éléments constitutifs, et que tous sont manipulés par l’utilisation précise de la couleur. J’applique ce même principe en architecture en considérant la structure comme la base de toute vibration et de tout dialogue architectural. Ensuite, la difficulté de l’exercice est de parvenir à la faire disparaître, pour que l’architecture devienne un élément parmi d’autres. L’élément architecture « , conclut-il.

Carnet d’adresses en page 72.

PAR MARIE LE FORT

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