A Ischgl, l’Ibiza des Alpes, le jeune chef du restaurant Stüva propose une cuisine innovante mêlant influences autrichiennes traditionnelles et tendances asiatiques modernes.

Perché à 1 377 mètres, sur une colline de la région de Paznaun, le village montagneux d’Ischgl en Autriche arbore d’agréables ruelles entourant une charmante église. Calme en été, c’est le lieu de rendez-vous des randonneurs d’un certain âge et des jeunes vététistes. En hiver, le décor change et l’endroit se transforme en station trendy vivant au rythme de la multitude d’après-skis proposés dans les bars, discothèques et autres clubs, d’où son surnom évocateur d' » Ibiza des Alpes « . Shows spectaculaires et pistes de luge impressionnantes s’y côtoient. Pour se faire plaisir à l’issue d’une intense journée dans la neige, le restaurant Stüva de l’hôtel Yscla (Ischgl en romanche) est un must.

Traditionnellement, la gastronomie autrichienne est une cuisine paysanne comptant de nombreuses spécialités locales et préparations datant de l’époque de l’empire austro-hongrois, parmi lesquelles les knödel(boulettes de viande ou de pâte) et les palatschinken (sorte de crêpes). Les pâtisseries (mehlspeisen) sont également très réputées. On retrouve aussi beaucoup d’influences juives (gefilte fish en beuschel, un ragoût à base de poumons et de coeur de veau) ainsi qu’italiennes et bohèmes. Typiquement autrichiens, les escargots étaient presque une denrée alimentaire primaire au XVIIIe siècle. Ils sont généralement mélangés à des plats à base de nouilles, de pâtés, de salades et d’oeufs.

APPRENTISSAGE DE HAUT NIVEAU

Chef du restaurant gastronomique Stüva, Benjamin Parth a révolutionné le passé culinaire autrichien. Ce jeune homme légèrement distant, au regard fuyant, pèse chacun de ses mots.  » Je ne suis pas le genre de chef à privilégier la cuisine locale. Notre région produit trop peu de choses pour cela. La nature environnante fournit tout au plus des baies, du thym, de la ciboulette, de la truite et du cerf. Cela ne m’intéresse pas de m’imposer des restrictions régionales.  » C’est en partie grâce à son père, Alfons Parth, propriétaire de l’hôtel Yscla, que Benjamin en est là aujourd’hui. Petit déjà, il l’accompagnait lors de ses voyages culinaires à travers l’Europe. Benjamin n’avait que 4 ans le jour où il fut invité chez Alain Ducasse à Juan-les-Pins et les cuisines de l’hôtel parental n’ont très vite plus eu de secret pour lui. A 14 ans, il affirmait vouloir devenir chef. Mais pas n’importe lequel, le meilleur ! Pour atteindre son objectif, il rejoindra les fourneaux de restaurants triplement étoilés parmi lesquels le Residenz Heinz Winkler (Aschau im Chiemgau, en Allemagne), L’Aqua (Wolfsburg, en Allemagne), L’Auberge de l’Ill (Illhaeusern, en France) ou le Can Fabes (Sant Celoni, en Espagne).

IMPOSER SA PATTE

C’est à la demande de son père, et un peu contre son gré, que Benjamin quitte l’Espagne pour devenir le chef de l’hôtel Yscla. Chargé à l’origine de concocter des plats autrichiens classiques, auxquels étaient habitués les convives de toutes générations, le jeune cuistot souhaite néanmoins imposer son style et révolutionne peu à peu le genre culinaire de l’endroit. Ses plats purs et sans chichis, dans lesquels se mêlent influences autrichiennes et tendances asiatiques modernes, sont désormais parfaitement reconnaissables. Une truite en carpaccio ou en tartare accompagnée de crème aigre et de caviar, un consommé puissant et des dim sum à base de langoustines, une lotte en bouillabaisse aux artichauts et haricots, un coeur d’agneau façon grand-mère, une viande kobe japonaise et sa moelle surmontées d’une sauce au vin rouge : au fil du service, le cuisinier propose à ses hôtes une expédition au royaume de l’harmonie des saveurs.

 » J’attache une grande importance aux accompagnements qui ont de la profondeur. C’est pourquoi je prépare mes fonds à partir d’os de bovins, d’arêtes, de volailles, de crustacés et de coquillages. Les sauces de caractère sont essentielles à mes yeux car les hivers sont rudes et longs dans la région « , souligne Benjamin. C’est aussi la raison pour laquelle il ne travaille pas avec des infusions légères et ne donne aux légumes qu’une place relativement modeste.  » C’est ce que souhaitent les Autrichiens, les Allemands et les Suisses qui viennent manger ici. J’ai voyagé en Chine et au Japon et je suis tombé sous le charme des épices chinoises et des préparations japonaises très pures. Ma cuisine est imprégnée de ces influences asiatiques et mes clients en redemandent. Ils trouvent mon style culinaire novateur. Il m’arrive également de revisiter des plats typiquement autrichiens, comme l’agneau façon grand-mère par exemple.  »

Le guide Gault&Millau, qui croit au talent de Benjamin Parth, a récompensé la cuisine qu’il pratique au restaurant Stüva de trois toques et d’une cote de 17/20, pas moins. Ou quand la gastronomie se hisse au sommet.

PAR PIETER VAN DOVEREN / PHOTOS : KRIS VLEGELS

 » Les sauces de caractère à base de fonds préparés par mes soins sont importantes car les hivers sont rudes par ici.  »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content