Confrontée elle aussi au réchauffement climatique, la planète fashion mise sur le look  » montagne « … et sur l’expertise des météorologues pour continuer à souffler le chaud et (surtout) le froid sur nos dressings.

Records absolus de températures en octobre dernier, nature qui bourgeonne en janvier… Certes, il n’y a plus de saison. Mais la mode, qui ne serait rien sans l’alternance des collections d’hiver et d’été, n’a pas dit son dernier mot pour autant. Le climat se fait toujours plus doux ? La neige rechigne à tomber ? Qu’à cela ne tienne : cet hiver, les créateurs semblent s’être donné le mot pour faire la nique à la météo. Tandis que Nicolas Ghesquière, chez Balenciaga, et Christopher Bailey, chez Burberry Prorsum, proposent d’épais anoraks corsettés de larges ceintures, Ralph Lauren et Roberto Cavalli – pour sa deuxième ligne, Just Cavalli -, redorent le blason du bodywarmer en le déclinant dans des nuances métallisées.

Même la bonne vieille doudoune, davantage réputée pour son confort que pour son esthétique, regagne depuis quelques temps les faveurs des fashion victims (lire aussi en pages 26 à 28 ). Il faut dire qu’avec les modèles de l’hiver 2008, coupés ultracourt, comme chez Barbara Bui ou Paule Ka, ou au contraire étirés jusqu’au genou, notamment chez Iceberg, on est loin du look  » bibendum  » des années 1980. Taillée dans des tissus légers, laqués ou satinés, la veste matelassée dessine au contraire une silhouette féminissime.

Andrea della Valle, CEO de Fay, la griffe italienne connue depuis plus de vingt ans pour son style casual chic, apporte un élément d’explication supplémentaire à ce succès :  » Urbaines et élégantes à la fois, ces vestes s’adaptent parfaitement à toutes les situations et donc au style de vie que de plus en plus de gens mènent aujourd’hui : on quitte son domicile à 7 heures du matin pour n’y rentrer qu’à minuit après avoir fait une foule de choses très différentes comme aller au bureau, passer par la salle de sport, sortir au restaurant et éventuellement enchaîner sur un cinéma.  » Ajoutez à cela un zeste de people attitude – George Clooney, Madonna, Katie Holmes ou Teri Hatcher sont régulièrement  » paparazziés  » vêtus de leurs blousons Fay – et voilà tous les ingrédients de la success story commerciale ainsi réunis.

Météo-obsession

Les vestes matelassées ne sont toutefois pas les seules à bénéficier d’un regain d’intérêt. Cet hiver, Stella McCartney et Moschino Cheap & Chic proposent de la grosse maille torsadée et de longs pulls à imprimé jacquard que l’on croirait sortis d’un refuge de haute montagne. Quant à Jean-Charles de Castelbajac, il force carrément le trait en faisant défiler des mannequins en vraies tenues de ski, paire de lattes à l’épaule, façon remontée des pistes. Idem du côté des accessoires, où le look  » montagne  » culmine au sommet de la branchitude : chapkas, cache-oreilles, longs gants, maxi-écharpes, boots  » après-ski « , bonnets et guêtres de laine comptent parmi les incontournables de la saison.

Il suffisait donc d’y penser : si on ne s’emmitoufle pas pour contrer le grand froid, qui ne sévit en moyenne que quelques jours par an, on le fera pour le côté hype. Face au thermomètre totalement imprévisible, le baromètre des tendances devient donc la valeur sûre. Une aubaine que saisissent au passage les marques de sports de glisse, qui n’en finissent pas de subir les conséquences négatives du manque de neige sur les ventes d’équipements de sport. Ainsi, le groupe Quicksilver, leader mondial de l’outdoor – avec entre autres des marques comme Roxy, Rossignol et Dynastar -, a enregistré en 2007 une perte de plus de 100 millions d’euros sur ses ventes de matériel, mais dégage en revanche de belles performances sur les lignes de textile et de chaussures, en progression de 20 %.

Et si cela ne suffisait pas encore ? Si la tendance sport chic s’essoufflait ? L’industrie textile entend ne pas se laisser prendre de court. Ainsi, aux Etats-Unis, Liz Claiborne – qui détient notamment la griffe Juicy Couture – et l’enseigne discount Target ont désormais recours aux services de professeurs de climatologie, relate le New York Times dans son édition du 2 décembre dernier. Ceux-ci sont chargés d’informer leurs employeurs sur les tendances météo à long terme, afin d’anticiper les demandes des clients, évitant de la sorte ruptures de stock ou surplus. Weatherproof, qui fournit en manteaux une large part de la grande distribution US, va même un pas plus loin. Le label a en effet contracté une assurance qui lui garantit 10 millions de dollars (environ 7 millions d’euros) d’indemnité au cas où les températures en décembre dépasseraient les moyennes saisonnières de 2,8° C. Une avalanche de solutions pour palier le manque de neige…

Delphine Kindermans

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