Barbara Witkowska Journaliste

Myriam De Loor est artiste et styliste pour les petits. Pan Gang est créateur de cerfs-volants. A Paris, ce couple belgo-chinois dédie aux enfants un espace poétique aux couleurs chatoyantes de la Chine. Magique.

Carnet d’adresses en page 56.

Impossible de rater Pan, cette boutique sympathique à l’ambiance saturée de couleurs vives et joyeuses. Le rouge dragon domine. D’emblée, le regard est aimanté vers le plafond. De superbes cerfs-volants en soie, peints à la main, flottent dans l’espace. Ils illustrent le monde animal, empreint d’une riche symbolique millénaire. Le poisson, c’est l’abondance. La grenouille et le tigre, la protection. Le papillon apporte l’amour. La chauve-souris, offerte lors de naissances ou de mariages, répand le bonheur. L’éléphant veille à la prospérité. Il y a, enfin, ce spectaculaire dragon, long de 10 mètres, qui traduit le pouvoir et la renaissance. Légères comme une plume, ces petites merveilles volent très bien. En ville, elles ont plutôt une fonction décorative et se contentent d’apporter une touche de rêve et de poésie dans la chambre des petits. On poursuit l’exploration. Sur les étagères et les portants s’empilent d’adorables vêtements. En vedette, la veste traditionnelle chinoise, interprétée aussi en cache-c£ur et en kimono avec une fermeture en biais. Les pantalons sont larges, coupés très simplement. Les petites filles craquent pour des robes aux manches courtes volantées ou pour des tabliers noués dans le dos. Les collections privilégient les tissus traditionnels chinois, redessinés, modifiés ou simplifiés par Myriam De Loor. Les motifs floraux dominent, mais on découvre aussi des petits fouillis géométriques, inspirés des années 1950 et 1960. On accessoirise le look à coups d’adorables chaussons, bonnets et écharpes.

Place à la créativité !

Cet univers extrêmement coloré et exotique, si inhabituel pour les bébés et les petits enfants, est le  » fruit  » d’une histoire d’amour entre une Belge et un Chinois. Originaire de Lessines, Myriam De Loor grandit à Lennick, dans les environs de Bruxelles, à l’époque où la campagne  » était encore très belle et bien dégagée « . Le soir, toute la famille se réunit dans le jardin. Place à la créativité ! On construit des cabanes, on confectionne des objets avec des papiers de couleurs, des bouts de ficelle, des feuilles et des bouts de bois, bref, avec tout ce qu’on trouve dans le jardin.  » J’ai gardé de très bons souvenirs de mon enfance, confie Myriam. Mes parents avaient une grande ouverture d’esprit. Ils nous laissaient libres, ma s£ur et moi, tout en nous guidant avec justesse et intelligence. Toutes mes énergies viennent de cette époque et de la campagne du Pajottenland.  »

Dans sa cabane, Myriam installe une école, avec un tableau noir, des bancs récupérés et une cloche pour annoncer les cours. Ce qui lui donne envie de devenir institutrice. Mais le destin lui réserve d’autres surprises. Après deux ans d’études à l’atelier de peinture à La Cambre, à Bruxelles, Myriam part à Florence, pour s’immerger, pendant un an, dans son ambiance culturelle et artistique. Elle y restera dix ans. Au gré des rencontres, Myriam se lie d’amitié avec des parents d’élèves de l’Ecole française à Florence, puis met en place des ateliers créatifs pour enfants. Les petits se passionnent pour tout : la peinture, la céramique, la mosaïque, la technique de la fresque, le papier marbré… La jeune femme se régale. Elle enseigne, guide et conseille.  » Certains enfants, je les ai suivis pendant dix ans. On avait des relations très profondes et très enrichissantes. C’était une période très gratifiante.  »

De retour à Bruxelles, Myriam enchaîne avec le même type d’activités. En 1997, elle participe doublement au Salon des loisirs créatifs : en animant des ateliers pour enfants et en exposant les £uvres de ses élèves. L’un de ses voisins est Pan Gang, créateur de cerfs-volants. Myriam craque pour ces objets gracieux et précieux et… pour le créateur. Le coup de foudre est réciproque. Pan est établi dans le sud de la France. Souhaitant se rapprocher de Bruxelles, il ouvre, à Paris, une boutique-galerie dédiée aux cerfs-volants. Peu après, Myriam l’y rejoint.

La Ville lumière, tellement stimulante, l’incite à se remettre à la création. En Chine, elle découvre les tissus campagnards aux couleurs flamboyantes et aux motifs picturaux étonnants. Elle imagine, d’abord pour ses propres enfants (Myriam et Pan ont aujourd’hui trois fils) une mini-collection de vêtements, dont les vestes molletonnées très douces, doublées de fleur de coton. En 2002, le couple participe au Salon Maison & Objet. Pan expose ses cerfs-volants, Myriam ses propres collections.

Des collections évolutives

Les petits s’emballent pour le China look, un univers coloré, simple et joyeux. Face à cet enthousiasme, la jeune femme se structure, développe les collections, ajoute des objets, des animaux, des accessoires pour la maison et du petit mobilier.  » Je ne rejette pas la mode, mais je ne suis ni les tendances ni les saisons, souligne Myriam. Mes collections sont évolutives. L’influence de la culture chinoise est prépondérante. Cela dit, je ne la considère pas comme un décor, mais comme un moyen d’expression. Tous les modèles que je crée sont confortables, utiles et emplis de sens. Les vêtements sont terminés à la main. Ils expriment la tradition et le savoir-faire chinois.  »

Dans la boutique que Myriam partage avec Pan, il y a une ambiance d’école, réminiscence de sa passion de petite fille. On y trouve des carnets, des crayons et des tabliers. Les prix sont inscrits à la craie sur un grand tableau noir. Tout est réalisé en Chine. Myriam et Pan ont déniché, dans la campagne chinoise profonde, des artisans formidables qui travaillent à l’ancienne le bois et la laque. Chaque année, il y a quelques nouveautés. A la rentrée, les petits découvriront un camion en bois (réédition d’un camion que le père de Myriam a reçu quand il était petit), ainsi qu’une petite épicerie en bois laqué. Dans le domaine du prêt-à-porter, ils vont adorer cette nouvelle collection en velours côtelé, doublé d’un tissu imprimé aux couleurs très vives, des manteaux longs et bien chauds et des cartables matelassés.

Le  » concept  » a le vent en poupe. Une seconde adresse a vu le jour à Paris. A la rentrée, une boutique ouvrira à Florence. Myriam songe aux pays du nord. Elle est curieuse de voir l’impact de son univers coloré sur les pays scandinaves. Cela dit, il y a pour elle une autre priorité : une boutique à Bruxelles ! Un projet qu’elle souhaite faire aboutir très rapidement.

Barbara Witkowska

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