COS, la ligne premium de H&M, ouvre sa première boutique, ce 30 mars, à Bruxelles. Weekend a pu découvrir, en primeur, une collection minimaliste et raffinée. Défilé.

Toutes les fashionistas du monde vous le diront : la mode est comme un coach sans pitié que seules les pros du style arrivent à suivre sans s’épuiser. En particulier cet été où la déferlante des imprimés flashy et des accessoires lamés a de quoi donner le tournis même aux plus entraînées.  » Je n’arrive plus à m’habiller, gémissait une journaliste de mode à peine revenue des défilés milanais. J’ai envie de choses simples, sans chichi. De passer une robe bien coupée. Et de me dire : « ouaw », en me regardant dans le miroir.  » Comme si l’excès de couleurs et de bling-bling de la saison conjugué au discours ambiant encourageant la  » consommation responsable  » nous poussait à revoir nos classiques, à préférer le durable portable au dernier look hype.

 » De plus en plus de gens sont prêts à payer plus cher pour un vêtement qui va durer plus longtemps, insiste Rebekka Bay, styliste de la collection pour femme de COS, la toute nouvelle ligne premium d’H&M, présentée à Londres le 14 mars dernier. Mais ils veulent payer pour la qualité, pas pour un nom sur une étiquette. C’est ce que COS veut offrir. Derrière chaque pièce, il y a des heures de travail, d’essayages, d’attention apportée aux détails. Notre manière de travailler est totalement différente de celle de H&M. Notre marché n’est pas non plus le même. Nous visons un client moins  » high fashion « , plutôt intéressé par une recherche de style que par la mode pure.  »

Pour la jeune Danoise qui travaillait auparavant dans un bureau de tendance, il s’agit là d’une lame de fond qui risque de bouleverser l’industrie du textile. COS – pour collection of style – ambitionne donc de proposer une garde-robe sans défauts qui traversera les années.  » Nous avons créé des looks contemporains, sans être obnubilés par les dernières tendances du jour « , ajoute Michael Kristensen, styliste de la collection pour homme. Le tout dans une palette de couleurs raffinées (blancs éclatants, gris clairs, marron foncé, noirs intenses, beiges crémeux…), rehaussée de bleus électrique et de jaunes moutarde –  » les  » couleurs de l’hiver prochain… – faisant la part belle à l’uni plutôt qu’aux imprimés.

 » Tout va avec tout, insiste Rebekka Bay. C’est étudié pour. Vous pouvez entrer dans la boutique et combiner tout ce que vous voulez sans risque de vous tromper.  » Côté modèles, l’esthétique pure et sobre des pantalons noirs souples, des cardigans droits et des chemises à manches courtes à la Forrest Gump, n’est pas sans rappeler l’univers minimaliste des années 1990.  » Nous sommes tous les deux Danois, nous privilégions une certaine esthétique scandinave, ajoute Rebekka Bay. La simplicité, la fonctionnalité, cela fait partie de notre culture du design. Dans le Nord, nous avons même parfois du mal à nous libérer de cet héritage. L’essentiel se trouve dans la coupe et le fitting. Tout est net, élégant. Moderne et strict à la fois. Ce n’est pas provocuant et pourtant c’est sexy. D’une nouvelle manière. Plus portable, sans devoir pour autant montrer trop de chair.  »

Une expérience shopping soignée

Dans la boutique aussi, l’expérience shopping se veut nettement plus  » couture « . Cabines spacieuses à l’éclairage doux, petits salons cosy où il fera bon s’asseoir pour feuilleter des magazines : William Russell, l’architecte des flagship stores des créateurs Margaret Howell et Alexander McQueen, a voulu susciter une impression de luxe et d’espace dès l’entrée de la boutique.  » Le lieu est divisé en petits modules, séparés par des portants métalliques, comme autant de mini-boutiques à l’intérieur d’une grande, détaille William Russel. Il n’y a pas de coupure nette non plus entre les zones hommes et femmes.  » Pas question ici de couvrir de vêtements chaque cm2 de surface. Entre les meubles de chêne clair, on déambule à l’aise, pour mieux s’approprier le vêtement que l’on vient d’essayer.

Comme cela se fait chez H&M, de nouvelles pièces de la collection feront leur apparition dans les rayons chaque semaine, mais l’allure générale du magasin n’en sera pas bousculée pour autant.  » Tout restera dans l’esprit de la collection, insiste Rebekka Bay. Les nouvelles pièces pourront compléter harmonieusement la garde-robe existante. Certains modèles basiques pourront même persister d’une saison à l’autre, dans une autre couleur ou un autre tissu.  »

Si l’on admet à la tête du groupe que COS pourrait grignoter quelques parts du marché de son grand frère H&M, l’idée est bien ici de toucher, en priorité, une tout autre clientèle.  » Dans le  » high street  » ( NDLR : les chaînes de vêtements ultra-mode bon marché), la compétition est énorme, reconnaît Rolf Eriksen, CEO de H&M. Il y a plusieurs moyens de se développer. En attaquant de nouveaux marchés, comme la Chine où nous venons d’ouvrir notre premier flagship store à Hong-Kong. Ou en explorant de nouveaux segments en Europe. Et c’est ce que nous sommes en train de faire. En proposant une manière plus exclusive de faire du shopping.  »

La philosophie derrière la ligne COS reste pourtant résolument la même que chez H&M.  » Nous nous engageons à proposer le meilleur prix pour un article de qualité comparable, insiste Karl- Johan Persson, CEO de COS et petit-fils du fondateur de H&M. Nous n’avons pas peur d’être associés à l’image  » low prize  » de H&M. Au contraire, nous en sommes très fiers. Nous pensons que le design n’est pas une question de prix.  » Un mantra énoncé par Karl Lagerfeld lui-même lors du lancement de sa collection… pour H&M en 2004 déjà. Soit quelques mois à peine avant que le projet COS, encore tenu secret, ne commence à germer.

Suivant ainsi le mouvement initié par son concurrent Inditex (qui regroupe Zara et la marque plus chic Massimo Dutti) et par le groupe Gap aux Etats-Unis dont le label premium Banana Republic reste la seule filiale en croissance de l’entreprise américaine, le géant suédois qui compte ouvrir une dizaine de boutiques en Europe d’ici à la fin de l’année, s’aventure à son tour dans ce segment  » moyen de gamme  » que bon nombre d’experts assurait pourtant saturé.  » C’est un discours que tiennent les gens qui n’ont pas d’idées, réfute Rolf Eriksen. Mais qu’on ne s’y trompe pas. Nous ne lançons pas COS pour le fun. Nous comptons bien influencer le marché.  » Un coup d’£il à la ligne sobrissime signée Madonna pour H&M suffit pour s’en convaincre. La tendance upper class chic s’installe pour durer…

Carnet d’adresses en page 102.

Isabelle Willot

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