Make-up artist de renommée internationale, Linda Cantello conseille désormais Giorgio Armani pour sa ligne Cosmetics. Rencontre avec une star du backstage.

Elle a illuminé le sourire des plus jolies filles du monde. Pourtant elle dit, sans avoir peur du cliché, que ce qui fait la beauté c’est le petit défaut –  » Vous savez, les dents juste un peu de travers de Kate Moss  » – qui ajoute un supplément d’âme. A quelques jours de faire son entrée officielle dans l’univers de Giorgio Armani Cosmetics par la porte glam du défilé haute couture Armani Privé, à Paris, – au final, elle signera un look épuré à l’extrême, un regard graphite et graphique sur un teint ultranude -, Linda Cantello se définit comme un outsider d’un milieu qu’elle défend pourtant bec et ongles.  » Mon sens de la couleur et ma vision du maquillage sont très différents de ceux de mes collègues, insiste-t-elle. Sûrement parce que personne ne m’a jamais appris à mettre du blush ou du mascara ! « 

Sans la crise qui frappe de plein fouet le Royaume-Uni à la fin des années 1970, Linda Cantello travaillerait peut-être toujoursà chez Sotheby’s, à Londres. Diplômée de la Harrow Art School, rien ne la destinait, a priori, à assister un jour Tom Ford, backstage, lors des défilés Gucci et Yves Saint Laurent Rive Gauche, ni à accompagner Peter Lindbergh au Groenland pour y shooter une campagne de pub pour Donna Karan.  » C’est sans doute la chose la plus dingue que j’ai faite à ce jour, se souvient-t-elle. Vous savez, moi j’aime la lecture, regarder quatre épisodes d’affilée de ma série préférée. Et là, je me suis retrouvée au beau milieu de l’océan Arctique, sur un iceberg, accompagnée d’un guide inuit prêt à intervenir en cas d’attaque d’un ours polaire ! « 

Sous des dehors posés, so british, la make-up artist ne cherche pas à dissimuler la passion qu’elle voue à  » cette industrie que personne n’a jamais vraiment comprise. Dieu sait si j’aime Robert Altman, mais, même lui, quand il s’y est frotté dans le film Prêt-à-Porter (1994), il n’est pas parvenu à capturer notre monde. La mode, c’est une étrange famille dont les membres s’entraident et se protègent à n’importe quel prix. Ce n’est pas aussi cruel qu’on le prétend. Ou alors seulement vis-à-vis de ceux qui n’en font pas partie « .

Ce qu’elle aime plus que tout dans cet univers que l’on juge superficiel ?  » La créativité qui y règne en maître, la liberté aussi que j’ai d’y faire des rencontres avec des gens exceptionnels « , précise Linda Cantello qui, en marge de son travail de consultance pour Giorgio Armani Cosmetics – les premières palettes qui porteront sa patte sortiront en 2010 – poursuivra par ailleurs ses collaborations pour d’autres marques en accompagnant leurs campagnes de pub. Travailler dans l’ombre d’un autre ne la dérange pas.  » Je sais que je n’ai pas mon nom sur la boîte, reconnaît-elle. L’exercice, c’est d’arriver à comprendre un univers, en l’occurrence celui d’Armani, de lui présenter la vision que j’en ai. C’est un bon guide pour moi. « 

Si elle s’éclate toujours backstage, Linda Cantello regrette pourtant l’ambiance si particulière qui pouvait régner dans les coulisses quand on y croisait Kate (Moss), Claudia (Schiffer), Linda (Evangelista) ou Naomie (Campbell).  » Ces filles-là avaient de la trempe, même lorsqu’elles ont débuté. Regardez les podiums aujourd’hui : on n’y trouve plus que des petites blondes fades, sans personnalité, qui se ressemblent toutes. Personne ne sait qui elles sont, ce qu’elles ont dans le ventre. D’ailleurs elles disparaissent souvent aussi vite qu’elles sont apparues.  » Rien d’étonnant finalement à ce que l’attention du grand public, toujours en quête d’icônes, se soit reportée sur les stars de cinéma.  » Et demain, pourquoi pas, sur les superpolitiques ?  » plaisante-t-elle. La veille, soir de l’investiture du président américain Barack Obama, Linda Cantello est d’ailleurs restée scotchée devant le petit écran jusqu’à 2 heures du matin. Même si – déformation professionnelle, sans doute – elle ne peut s’empêcher de détailler les tenues portées par Michelle, elle se dit agacée de la voir réduite à ce rôle de portemanteau de luxe qu’on lui fait désormais jouer.  » C’est une femme bien plus sérieuse, bien plus profonde que cela. C’est étrange, vous ne trouvez pas ? « 

Isabelle Willot

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