Dans le secret des dieux du luxe

DELPHINE KINDERMANS, RÉDACTRICE EN CHEF © FRÉDÉRIC RAEVENS

Certains secrets n’ont rien d’indiscret. Au contraire, ils ne demandent qu’à être partagés… pour peu que l’on sache à qui s’adresser pour les révéler. Saviez-vous, par exemple, que c’est au Japonais Kokichi Mikimoto que l’on doit les premières perles de culture, lui qui dans les années 1890 eut l’idée simplissime mais géniale de singer la nature en introduisant dans une huître un minuscule corps étranger en guise de  » nucleus  » autour duquel se construit la précieuse bille de nacre ? Ou que Napoléon Bonaparte fit réaliser sa tiare impériale par Chaumet avec les joyaux des Bourbon déchus, et notamment un fabuleux diamant de 140 carats subtilisé à la couronne de Louis xv ? Et l’on pourrait continuer longtemps à égrener les anecdotes recelées derrière les vitrines de la place Vendôme, tant ce haut lieu de l’élégance a, en deux siècles, lié son destin aux grands de ce monde. Ainsi de celui de la Belge Jeanne Toussaint qui mit Paris à ses pieds, et plus particulièrement Louis Cartier. Conquis, son amant lui confia les rênes de la création au sein de la griffe familiale, faisant de celle-ci un des fleurons de l’excellence à la française. Entre tradition et innovation, les ateliers de la maison nous ont ouvert leurs portes.

La Place Vendôme a, en deux siècles, lié son destin aux grands de ce monde.

Coco Chanel, amie intime de celle que l’on surnommait La Panthère, tomba elle aussi sous le charme de la célèbre place. Depuis sa suite attitrée au Ritz, elle pouvait en admirer la géométrie inspirante, que l’on retrouve encore en filigrane dans l’un ou l’autre modèle emblématique de sa marque. Après avoir bousculé les conventions sociales et la garde-robe féminine à coups de partis pris radicaux, comme le choix de (re)faire du noir la couleur de la mode et non plus celle du deuil, Mademoiselle se lance en effet à son tour dans les accessoires, la haute joaillerie et la beauté. Autant de secteurs dans lesquels elle impose son esthétique radicale, dont le minimalisme rend de facto obsolètes les codes en vigueur –  » je veux être ce qui va arriver « , déclarait-elle sans complexe. Son fameux N°5, imaginé par Ernest Beaux, envoie aux oubliettes les sages accords fleuris alors en vogue. De sa composition à partir d’aldéhydes, molécules de synthèse révolutionnaires, à son flacon épuré en passant par son étiquette calquée sur les tracts du mouvement dada, son jus à elle – à l’instar des parfums de niche aujourd’hui – ne fait rien comme les autres. Et pourtant, il deviendra un classique.

Comment une fragrance ou un bijou destiné à être unique a pu séduire le plus grand nombre et traverser les époques sans pâlir, c’est là un autre secret. Celui des dieux du luxe, sans doute.

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