A 27 ans, elle a déjà douze ans de carrière derrière elle. De son enfance au prochain film de Raoul Ruiz, le top-modèle devenu comédienne se raconte… avant de prendre la pose, en exclusivité pour Weekend.

En ces temps où les reconversions de mannequins accaparent les pages politiques, Audrey Marnay avance à pas de velours et c’est tant mieux. Ces jours-ci, elle est au générique du Paris de Cédric Klapisch et on peut la voir sur les affiches du joaillier Fred au côté de l’acteur Melvil Poupaud. Propulsée en 1995 à 15 ans comme la petite Française des podiums, elle provoque un vrai choc esthétique au milieu des grandes tiges standardisées, avec ses taches de rousseur, ses grands yeux et sa silhouette fragile pas si hors norme. Maman de deux garçons, dont l’aîné, Amaël, est né avant ses 20 ans, elle a amorcé une carrière de comédienne, avec un premier rôle en 2006 dans Bunker Paradise, de notre compatriote Stefan Liberski. On la retrouvera d’ici quelques mois en vampire dans le prochain film de Raoul Ruiz.

Mes débuts

En face du bureau de mon père, à Paris, il y avait une agence de mannequins et ses collègues m’ont conseillé de m’y présenter quand j’avais 14 ans et demi. On m’a demandé si j’avais des photos et j’ai sorti ma carte de bus… Ils m’ont trouvée trop jeune et trop petite (je mesurais 1,70 m), mais une jeune femme m’a donné les coordonnées de l’agence Viva et c’est devenu la mienne. Je faisais des castings le mercredi après-midi et, à 16 ans, à la fin de la seconde, j’ai arrêté l’école. J’ai quitté mes parents et mon village quelques mois plus tard pour m’installer à New York.

Mon premier défilé

C’était pour Yohji Yamamoto, le jour de mes 15 ans. Le défilé était à 20 heures, on m’a demandé de venir à midi et, quand je suis arrivée, il n’y avait personne. Vers 19 heures, j’ai vu passer les tops de l’époque, Linda Evangelista, Naomi Campbell, Kristen McMenamy.

Ma première couverture

Brice Compagnon est le premier à m’avoir repérée pour une campagne Benetton photographiée par Toscani. J’ai fait ma première couverture en mai 1997 pour Vogue Italie avec Steven Meisel. Je respecte infiniment Irving Penn avec qui j’ai souvent travaillé. J’ai eu aussi l’occasion de faire des photos avec Richard Avedon ou Helmut Newton. Ces contrastes d’univers sont passionnants.

Le métier de mannequin

Il y a des gens qui ont toujours été là pour moi dans ce milieu et à qui je suis restée fidèle. Aujourd’hui, je n’ai pas envie de tourner le dos à la mode, j’y ai commencé ma vie professionnelle et je respecte cet univers qui fait rêver. Pendant presque deux ans j’ai été  » la  » nouvelle fille et puis après d’autres sont arrivées. Je me suis rendu compte que les gens ne m’aimaient pas pour moi, mais pour mon image. Vous devez correspondre aux critères de la saison. Il faut juste en prendre conscience pour ne pas en souffrir. J’ai eu la chance d’être bien entourée pour garder les pieds sur terre.

Ma famille et mes amis

A New York, j’ai dû me créer une autre famille, que je n’ai jamais vraiment trouvée dans la mode, mais j’ai rencontré le père de mes enfants. Fonder une famille vers 19 ans peut paraître jeune, mais j’en avais envie depuis longtemps. Vers 18 ans, je devais avoir 35 ans dans ma tête. En voyant mes amis d’enfance, je me rendais compte qu’on n’avait pas avancé de la même façon. Maintenant, je rajeunis à mesure que mes enfants grandissent.

Le dernier défilé d’Yves Saint Laurent

Je n’avais jamais travaillé avec M. Saint Laurent et la maison m’a demandé d’ouvrir le dernier défilé à Beaubourg, en 2002. C’était un moment magique et très émouvant. J’ai porté la robe de mariée Poupée russe de 1965. Enfant, j’ai été marquée par le spectacle incroyable et la gaieté des défilés de Gaultier. Pour son premier défilé de haute couture en 1997, j’avais aussi la robe de mariée. J’étais tellement émue que je pleurais sous le voile…

Ma reconversion

Avant d’être enceinte de mon deuxième fils, je me suis dit qu’il fallait que je passe à autre chose. Vers 16 ou 17 ans, on m’avait proposé des films, mais ça ne m’intéressait pas. A l’époque, j’étais une gamine et je voyais ça comme des devoirs d’école ! Vers 21 ans, j’ai commencé à lire des pièces de théâtre et à prendre des cours à New York. J’ai vite ressenti le besoin de le faire en français. A 23 ans, je suis rentrée à Paris et je me suis inscrite aux Ateliers de l’Ouest, avec Steve Kalfa. Un jour, en jouant Comédie des séductions d’Arthur Schnitzler, j’ai eu des frissons et ça a été une révélation. J’annulais mes boulots de mode pour suivre les cours.

Mon premier film

J’ai tourné mon premier long-métrage, Bunker Paradise, à 25 ans. Comme j’y ai le premier rôle féminin, je suis allée voir le réalisateur, Stefan Liberski, pour lui demander s’il ne voulait pas commencer par un court-métrage parce que je n’avais jamais joué ! Finalement, je suis arrivée sur le tournage sans appréhension et tout s’est bien passé.

Paris, de Cédric Klapisch

C’est magique d’être dans un film de Cédric, on s’attache aux personnages, c’est une expérience qui vient du c£ur. J’y joue une bourge du xvie arrondissement de Paris plutôt rock’n’roll. Klapisch, c’est le cinéma de mon enfance, Le Péril jeune, Chacun cherche son chat, et il a tourné avec Belmondo, mon héros d’alors… A Chartres, il y avait deux cinémas. Mon premier choc a été Le Grand Bleu à 8 ans.

Mon tournage avec Raoul Ruiz

Dans le prochain Raoul Ruiz, je joue un vampire. Pour mon personnage, il s’est inspiré des vampires d’Amérique du Sud, avec des manifestations par des insectes, des apparitions-disparitions. Chaque jour, c’était la surprise, il ajoutait des choses, un peu comme un peintre sur une toile. Mon rêve, c’est de jouer une Gypsie ou une folle dans un film de Kusturica…

Propos recueillis par Anne-Laure Quilleriet

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