Le virtuel se joue du réel, et l’avant-garde est démodée.

Mais qu’est-ce que le démodé ? Une caricature, une robe fin de race, l’extrême parti d’un mouvement.

Le démodé, c’est l’art de mal porter les vêtements.

La mode, aujourd’hui, c’est la dégaine, c’est l’allure.

Le faux, c’est le  » bien-porter « , le  » prêt à porter « , le  » juste à porter « .

Le créateur revendique ses codes. Courant dans sa tête comme l’amoureux de Barthes, parfois déjanté, souvent décalé, mais toujours dans le temps, dans l’art du temps. Artificiel, frivole, délirant aux moindres vibrations, interactif, attentif aux informations, il trie, il entasse, il décape, il respire, il vole, il meurt, il crée.

Il est ainsi fait qu’il se nourrit du hasard, du silence.

Mémoire infidèle qui se sert de tout. Ni Dieu, ni prophète, il se doit d’être lisible, de raconter son histoire, de la jouer à corps perdu.

Fantasque, le créateur dévasté, dramatique, délirant, déconneur, culotté, mais précis, qui sait absolument où il va, qui sait absolument ce qu’il fait, qui sait qu’il n’a pas le droit à l’erreur.

La pression est très forte, il tient la marque à bout de bras, conforte le nom, le souligne, l’inscrit en lettres d’or dans l’univers de la mondialisation.

Aujourd’hui, le marché a changé. Il est totalement tributaire d’images publicitaires répétées, provocantes. On sait que la répétition est une incitation à la vente. Peu de femmes résistent à la multiplication d’un nom, d’un objet. C’est un fait récent et nouveau dans notre société.

Le créateur se doit d’être créatissime.

Il n’a plus le choix, il doit plonger, être ouvert, lire, se cultiver, voyager, être au courant de toutes ces mutations politiques, métaphysiques, sociales. Multiforme, agrégé de Science-Fiction, docteur en Cybernétique, navigant dans le cyberespace, pluricréatif, ni psychiatre ni moraliste, pourtant il doit frapper fort, rapidement et inventer son roman comme un auteur à succès.

Tout cela, ce ne sont que des mots, et, pourtant, comme le dit Italo Calvino : » En même temps que le livre à écrire, je dois m’inventer l’auteur qui l’écrit . »

En même temps qu’il fait la mode, le créateur s’invente sa vie. Aujourd’hui, il se passionne pour les magazines  » alternatifs « , ponts graphiques entre l’art et la mode, où il est question de style, design, cinéma, sexualité, culture, de tout, de rien, mais dont on ne peut ignorer l’existence, pas plus que le déferlement de ces modes, à l’affût de toutes les nouveautés  » trop classe « ,  » trop bien « ,  » trop cool « .

Le créateur est un personnage fragile qui a la vie dure.

Sonia Rykiel

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