Des clics (et des claques)

© INGRID OTTO

 » Nous ne sommes pas d’accord « , conclut un inconnu sur Twitter, après un échange sur les dringuelles qu’ont touchées certains politiciens pour ne rien faire. Le genre de conversation dans laquelle il ne faut pas se lancer, mais quand on tient à respecter sa moyenne de 12 heures de discussions numériques stériles par jour, il faut un peu y mettre du sien.

Comment, ça, nous ne sommes pas d’accord. C’est tout ? Mais mon petit bonhomme, on ne peut pas venir comme ça sur Internet et décider qu’il y a de nouvelles règles. Si, dans la vraie vie, il semble inconcevable d’aller trouver la femme du Premier ministre pour lui dire que sa fausse couche, c’est bien fait pour elle, sur Internet, ça a l’air acceptable. Ils étaient des dizaines à se réjouir, à l’époque où la presse avait relaté ce drame qui touchait la famille Michel. De même qu’on serait gêné aux entournures en allant raconter aux familles des réfugiés morts dans un camion frigorifique que, ce qui serait drôle, c’est que le camion ait contenu du porc avant. C’est délicat, également, d’aller trouver le père d’une jeune fille assassinée en lui déclarant que s’il avait mieux éduqué sa fille, elle n’en serait pas là. Vraiment délicat, dans la vraie vie.

Mais là c’est Internet. Quand on n’est pas d’accord, on y met les formes. L’insulte, c’est le baise-main numérique. Le  » salutations distinguées  » 2.0. C’est l’huile sociale du haut débit. Par exemple ? Quelqu’un qui estime que répandre du napalm sur Molenbeek n’est pas la solution à tous nos problèmes ? Un islamo-gauchiste. Les gens qui réfléchissent à la manière dont ils consomment ? Des sales bobos déconnectés. Ceux qui plaident pour plus d’amour et d’écoute entre les personnes ? Des Bisounours qui sont dignes d’être tués dans un attentat. C’est simple, pourtant. Les personnes qui ne pensent pas comme nous sur Internet sont des triples buses qui méritent de souffrir. Alors, j’admets que  » beaucoup d’amour « , ça semble un peu ric-rac comme solution pour venir à bout de l’Etat Islamique ou sauver la planète. Cela étant dit,  » beaucoup de haine  » n’a pas encore prouvé toute son efficacité.

PAR FLORENCE HAINAUT

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