Deux brunes au sommet !
La première s’illustre dans un one-woman-show sur la scène du Palace, à Paris. La seconde est directrice artistique d’Azzaro, marque chérie des élégantes sur red carpet. Amies dans la vie, les deux jeunes femmes se sont prêtées au jeu d’une interview très exclusive… où Vanessa tient le rôle de l’agitatrice de la boîte à questions.
Qui mieux que Valérie Lemercier pouvait inaugurer le Palace, ancien club culte, à Paris, redevenu théâtre, où la comédienne se produit dans un spectacle » parlant d’amour plus que jamais » (*)… Après six ans d’absence sur scène, elle renoue avec le rire, en attendant d’être Agathe Cléry dans la comédie musicale d’Etienne Chatiliez, en décembre prochain. Sur son amie intervieweuse, elle raconte : » J’ai rencontré Vanessa il y a cinq ans, après avoir flashé sur un fourreau rouge Azzaro, idéal pour ma scène de danse endiablée à la fin de Palais royal ! » » On s’est vite découvert des amis communs, dont Bertrand Burgalat (époux de Vanessa Seward) « , commente encore la comédienne de sa voix rauque et chaude où pointe facilement une exquise ironie. Instants volés entre deux brunettes ultrachics.
Vanessa Seward : Pourquoi as-tu choisi le Palace ? Y allais-tu quand c’était une boîte ?
Valérie Lemercier : J’y suis allée danser une seule fois. Je n’ai jamais fait partie de la fameuse » bande du Palace « . Peut-être était-ce une époque où je ne sortais pas trop… Ce qui m’amuse, c’est l’idée de ce lieu classé rouvert après plus de dix ans de fermeture, qui redevient le théâtre qu’il était dans les années 1930.
Faire rire, ça te procure quelle sensation ?
Un génial plaisir d’auteur, et non d’actrice. Au cinéma, il y a un tel décalage entre le temps de l’écriture et la sortie du film ! C’est au théâtre que je vibre le plus, que j’ai l’impression d’avoir ma vraie place.
De quels personnages vas-tu brosser le portrait ?
J’en ai 16 en tout ! Comme toujours, il y a une petite fille. Elle a 8 ans, une mère psychanalyste, et elle passe son temps à écouter ce que racontent les patients. Elle en déduit que personne ne s’aime jamais en même temps, donc elle décide de ne jamais être amoureuse… Il y a aussi l’étudiante en urbanisme toujours planquée dans le local à ordures pour vérifier que les gens font le tri sélectif. C’est un peu l’écolo fanatique contemporaine, très moralisatrice, obsédée par le trop-plein de lumière, le trop-plein de bruit, les piles… On retrouvera évidemment la bourgeoise et ses huit gosses, Enguérand, Quitterie, etc., à qui elle dit : » C’est pas en bouffant du Galak devant YouTube que vous allez vous retrouver sur un billet de 50 francs ! « , tout en éructant » Porcherie ! « , » Merde ! « , » Dégueulasse ! « . Elle est atroce… J’ai aussi une femme soûle dans les tribunes de Roland-Garros qui se jette au cou de Jean d’Ormesson, PPDA, tous ces gens de la vieille France, en hurlant » Mon amour ! » D’ailleurs, je parle davantage d’amour dans ce spectacle, même s’il est désenchanté.
Tes idées naissent-elles souvent de rencontres ?
Toujours. La femme soûle m’est tombée dans les bras un jour au café Marly : » Mon amour, t’es magnifique ! Qu’est-ce qu’on va faire de toi ? » J’ai aussi eu l’idée de croquer la fille adoptive des Chirac, Anh-Dao Traxel, après l’avoir croisée dans une émission de télé. ( Elle prend un accent asiatique. ) Anh-Dao adore Jacques Chirac : » Grandes mains, grand nez, grands pieds, il n’a pas dit son dernier mot, c’est ma famille de c£urrrr ! » La télé me donne quelques idées aussi. J’ai un personnage fou de déco, inspiré par l’émission Du côté de chez vous. La sienne s’appelle Côté bastide ; il y parle d’archi, de déco et des partouzes qu’il fait avec sa femme…
A tes débuts, l’inspiration te venait des Galeries Lafayette, où tu as travaillé. Fréquentes-tu toujours les grands magasins ?
Oui, je n’ai aucun problème à aller au Printemps le samedi après-midi ! Les passants me confient leurs histoires, j’adore. Si vous êtes trop épaulée par des gens qui font les choses à votre place, vous ne voyez plus le monde. C’est en sortant, en vous laissant porter par le hasard, que vous tombez sur des scènes incroyables. Comme en amour : c’est quand on ne cherche pas qu’on trouve.
Comment travailles-tu tes personnages ?
La voix d’abord, puis le corps, et enfin les textes. Une fois que j’ai commencé à jouer, il n’y a aucune improvisation. Je passe des jours et des jours sur chaque personnage avec ma coauteur, Brigitte Buc. Parfois je me mets debout. Sur scène, j’ai un costume noir androgyne, et chaque personnage a un accessoire rouge, écharpe, mouchoir, maillot de bain… Pour savoir où je vais le placer, je dessine. D’ailleurs, le mot anglais » sketch » veut aussi dire croquis… Je fais des croquis sur scène !
J’adore tes dessins, et j’ai entendu dire que tu allais créer un papier peint…
Oui, pour la Maison Darré, le laboratoire design de Vincent Darré, où il présente une sélection d’objets à tirage limité. Ce sera après mon spectacle.
Qui a déjà eu la chance d’entendre tes nouveaux sketchs ?
Uniquement Bertrand, ton mari ( NDLR : Burgalat, patron du label de musique Tricatel, qui avait produit son album Valérie Lemercier chante, en 1996). Je lui fais tout lire, il a un très bon £il. Après le spectacle, on va refaire un disque de chansons ensemble.
Tu répètes avec un miroir ?
Surtout pas ! Il n’y a que sans miroir que je peux croire que j’ai 8 ans ou que je suis un homme. Et, si j’y crois, les gens vont y croire aussi. Le vrai miroir, ce sont ceux qui vous regardent. A la maison, il n’y a pas de photos de moi, juste des miroirs purement utilitaires, pour vérifier mon allure avant de sortir.
J’ai toujours admiré ton style, très affirmé. Plus jeune, as-tu eu des dérapages honteux ?
Oh, oui ! J’ai toujours porté beaucoup de bleu marine, du Liberty, des carreaux, mais j’ai simplifié et architecturé mon allure. Avant, je mettais des choses qui me cachaient, des pièces moins près du corps. Comme pour mes personnages, je me dessine pour savoir si un vêtement me va, pour me voir avec du recul.
Je t’ai invitée à imaginer une ligne d’accessoires pour Azzaro. Qu’est-ce qui t’a plu dans cette expérience ?
J’ai dessiné ce qui me manquait : des pochettes, de jolis boots… Et j’adore Azzaro. Ta mode est une évidence pour le soir. Dès que j’ai un événement comme les Césars, je viens pour la subtilité des robes, des décolletés, des plissés. C’est sexy sans que je me sente déguisée. Plutôt protégée. Tes créations sont très flatteuses. C’est vraiment une mode faite par une femme.
Toi aussi, tu crées ! Je t’avais vue dans une djellaba en éponge que tu t’étais fabriquée et tu m’as donné l’idée de minirobes en éponge strassée pour l’été prochain…
J’adore me coudre des trucs. Quand j’avais 20 ans, j’achetais du tissu et je me faisais des tailleurs. Aujourd’hui encore, je trafique ce que j’achète, je raccourcis, j’arrange…
Tu embellis avec le temps. Quel est ton secret ?
Je rajeunis peut-être… A force de faire des photos avec de grands maquilleurs, je suis assez calée. Je suis une inconditionnelle des faux cils, j’en mets presque pour aller chez l’épicier ! J’accorde aussi beaucoup d’importance à mon teint pâle et à mes sourcils structurés.
Tu m’as appris une supertechnique pour les cheveux…
Plus c’est décoiffé, mieux c’est ! Mon grand truc, c’est de faire une mise en plis chez le coiffeur puis d’enfiler mon casque de scooter le temps de parcourir le trajet Palais-Royal (chez moi) – Montparnasse aller-retour. Les boucles sont un peu défaites mais pas trop : c’est idéal !
Ton spectacle a débuté le 5 novembre. As-tu le trac ?
C’est terrible. Pour tenir le choc quand je joue, j’écoute les Spice Girls dans ma loge, je mange des pâtes bio à l’épeautre vers 17 heures, je bois du jus de citron, je fais un peu d’exercice. Bon, après, ça se gâte : je suis dingue des nounours en guimauve, que je congèle pour faire un peu comme une glace… Juste avant de monter sur scène, j’ai un rituel : glisser quelques gouttes d’Heure exquise d’Annick Goutal dans mes oreilles. Ça me fait un petit peu de frais…
(*) Valérie Lemercier au Palace !, jusqu’au 3 janvier prochain. Carnet d’adresses en page 116.
Propos recueillis par Katell Pouliquen
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