Créé par le styliste catalan Antonio Miro, le small design hôtel qui porte son nom, dans la capitale du pays basque, est un écrin au design régénérant. Cool et novateur, à l’image de Bilbao.

(*)  » The Design Hotels Yearbook 2005 « , 360 pages. Sur commande sur www.designhotels.com

Carnet d’adresses en page 94.

Créé en 1993, le label design hôtels regroupe une sélection ultrapointue des adresses les plus hype de la planète. Recensés annuellement dans un ouvrage homonyme, ces hôtels sont au nombre de 137 pour l’édition 2005 (*). Une liste hypersélective donc qui ne compte, par exemple, que quatre hôtels pour toute la France, moins de dix pour l’Allemagne… et pas une seule pour la Belgique. Quand on pense au Julien à Anvers, on se dit que ce best of comporte quelques lacunes. Mais force est de constater la pertinence des établissements retenus, dont le point commun est de cultiver une approche  » down tempo  » et ouvertement contemporaine du luxe.

Le Miro fait partie des élus. Un choix particulièrement judicieux puisque c’est le seul design hôtel situé à Bilbao, la capitale du pays basque qui connaît une véritable movida depuis l’inauguration du musée Guggenheim, en 1997. Le chef-d’£uvre de Frank O. Gehry est d’ailleurs visible depuis certaines chambres de l’hôtel, non loin des  » muelles « , les quais de l’estuaire, aménagés par l’architecte César Pelli. Entourés d’un paysage en plein bouleversement qui verra l’édification d’un immeuble de Zaha Hadid û le chantier reste relativement peu gênant pour le client û, les lieux marquent l’apparition du premier boutique hôtel d’Euskadi (le Pays basque). Boutique hôtel ? Tel est le nom donné aux établissements de taille modeste (50 chambres, guère plus), généralement soucieux de design et de services performants, qui se développent partout dans le monde depuis plusieurs années. L’hôtel Miro, plébiscité par le cultissime magazine  » Wallpaper  » qui n’a pas hésité à le désigner comme l’un des plus cool de sa catégorie, ne doit pas son nom au célèbre peintre espagnol mais bien au styliste catalan Antonio Miro.

Originaire de Barcelone, Antonio Miro a débarqué sur la planète mode dans les années 1970. Il est le créateur d’une griffe de prêt-à-porter qui porte son nom depuis 1986. En 1992, il est sélectionné pour dessiner tous les costumes des Jeux olympiques de Barcelone. Depuis, il n’a pas cessé d’être sur le devant de la scène. En 1997, il est choisi pour dessiner le nouveau rideau du grand théâtre Del Liceu dans la capitale catalane. En 2002, il inaugure l’hôtel Miro à Bilbao. Et, en 2004, il signe une partie de la décoration de l’hôtel Arts à Barcelone. Chef de file des créateurs de mode catalans, Antonio Miro crée des vêtements pour l’homme et la femme : d’une belle sobriété pour lui, sensuels et féminins pour elle… sans oublier la ligne plus sportswear et trendy développée sous le label Miro Jeans. Chaque saison, Antonio Miro reçoit un accueil triomphal à la Pasarela Gaudi lors de la semaine de la mode de Barcelone, où il est le chouchou des journalistes de mode. Depuis 2004, il est aussi distribué au Japon. Une eau de toilette et des accessoires complètent les produits de la marque.

Habitué des collections et défilés internationaux, pour lesquels ses amis û l’acteur-compositeur Ryuchi Sakamato, qui tenait la vedette avec Bowie dans  » Furyo  » (1983) ou le comédien John Malkovich û ont prêté leurs silhouettes de stars, Antonio Miro s’est aussi offert les talents du photographe de mode le plus courtisé au monde, David Lachapelle, pour ses campagnes de pub. Ses impeccables concept stores, implantés en Espagne mais aussi au Japon devaient tout naturellement le conduire vers l’architecture hôtelière de pointe.

Largement vitré sur deux niveaux, structuré par des colonnes quadrangulaires blanches, l’hôtel Miro offre un confort ouaté, aéré et paisible, en phase avec son temps. Sol en pierre anthracite au sol, blancheur et transparence pour le volume. Les espaces publics (lobby, accueil, hall), de taille modeste ne s’encombrent que du strict minimum, jouant parfois sur le décalage et la rupture avec le cadre contemporain (un meuble ouvragé en bois trône dans l’entrée, un salon anglais avec fauteuils club à l’étage). On ne sait si Antonio Miro a dû se faire violence pour ne pas saturer les murs de couleurs extraverties comme l’aurait fait un Javier Mariscal, designer espagnol plein d’humour. Toujours est-il que le bar, avec ses sièges modernistes, s’adonne à c£ur joie dans le jaune soleil.

Le concepteur ne manque pas de fantaisie comme l’atteste le choix des photographies qui jalonnent le rez-de-chaussée et les huit étages. A la réception, c’est un tirage grand format en noir et blanc de Ruud Van Hempel, qui figure un réceptionniste devant un papier peint kitschissime, qui accueille les clients. Dans la salle des petits déjeuners, des gerbes lactées  » shootées  » sur fond noir se dressent au-dessus des tables immaculées. Ailleurs, des £uvres de grande qualité ponctuent les passages et les couloirs maintenus dans une semi-obscurité. Des agrandissements de Ana Laura Alaez, l’une des artistes de la nouvelle scène espagnole les plus en vue, exposée au Palais de Tokyo à Paris ou au MoMA à New York, mais aussi des images nocturnes de Juan de Sande, envoûtantes comme des films de David Lynch.

Cet accrochage distille d’emblée une atmosphère d’intimité, un plaisir chuchoté, en résonance avec le mini mais impeccable spa (sauna, jacuzzi) du sous-sol, un calme préservé une fois la porte de la chambre refermée. Chacune d’entre elles est peinte dans une douce teinte mastic et pourvue d’un lit king size surmonté d’un assemblage horizontal de lattes de bois. Toutes sont conçues selon le même principe de communication maximale, réduisant au minimum le nombre de parois. A l’instar de la salle de sport, un peu réduite, en revanche, les lieux offrent tout ce que l’on est en droit d’attendre d’un boutique hôtel digne de ce nom. Dans chaque chambre, c’est écran plat LCD en bout de lit (choix entre une centaine de DVD), lecteur de CD et bien entendu Wifi, l’Internet sans fil. De quoi rassurer l’urban voyageur qui, plus que jamais, se réjouit d’être loin de chez lui mais à condition d’être relié au monde.

Antoine Moreno

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