Hype le golf ? Les grands noms de la mode et du streetwear prennent les fairways d’assaut. Entre classic revival et punkitude, ça va swinguer sur les parcours.

Le constat est sans appel : ces dernières années ont été florissantes pour le golf qui a vu ainsi monter en flèche le nombre de ses sympathisants. En revanche, côté style, c’était plutôt le désastre sur le green. Il n’en a pourtant pas toujours été ainsi. Dans les années 1950-1960 – marquées par les heures de gloire de grands joueurs comme Arnold Palmer et Gary Player, côté pro, d’acteurs américains comme Bob Hope et Bing Crosby côté people – , les pantalons à carreaux, les chemises souples à manches courtes et les cardigans n’avaient peut-être pas leur place sur les catwalks, mais au moins, ils avaient un certain panache. Rien à voir en tout cas avec les chinos informes et les polos trop larges qui pullulaient sur les driving ranges jusqu’il y a peu encore.

Les choses pourtant sont en train de changer : les géants du sport comme Nike ou Puma ont ainsi pris le marché d’assaut, rejoints par les griffes fashion comme Boss – avec son label Green -, Zegna Sport, Pringle, Tommy Hilfiger et Dior. Sans oublier le label de luxe britannique Dunhill qui vient de lancer une collection de vêtements techniques : des chemises qui conservent leur fraîcheur, des pantalons qui s’étirent lorsque l’on swingue, des vestes qui respirent et qui vous tiennent au secà  » C’est un vrai challenge, souligne Carlos de Freitas, directeur artistique de l’homme chez Dunhill. De plus en plus de marques s’intéressent aux vêtements techniques, qu’il s’agisse d’ailleurs de golf ou non. L’enjeu, c’est bien sûr d’arriver à créer des produits qui dans ce cas précis remplissent une fonction spécifique mais qui ont aussi de l’allure. Et avec le golf, on atteint ce point d’équilibre où les vêtements techniques que l’on crée peuvent aussi bien être portés sur le green que pour sortir ou aller travailler. « 

Les codes fashion du golf eux aussi se sont assouplis. Les clubs se sont rendus plus accessibles au public, d’un point de vue financier. Quand il fallait se saigner à blanc pour s’offrir une carte de membre, il ne restait plus grand-chose à dépenser pour s’éclater côté vestiaire. Sans parler des interdits – tee-shirts et shorts – édictés par les fédérations qui ont longtemps prôné un look plutôt conservateur.

La tradition a longtemps poussé les golfeurs à  » s’habiller chic « , ce qui est plutôt une bonne chose si l’on se range du côté des marques de mode. Le tout étant d’arriver à séduire à la fois une jeune génération de golfeurs, tombés sous le charme des performances du champion Tiger Woods tout en poussant les responsables des clubs à s’adapter.  » Contrairement à ce que certains en disent, le golf n’est pas un sport de retraités qui ont le temps de jouer « , ajoute, un brin sur la défensive Carlos de Freitas qui vient lui aussi de découvrir les joies du swingà

Et il n’est pas le seul. Le golf est le sport récréatif qui a connu le développement le plus rapide au monde : plus de 10 millions de personnes ont commencé à jouer ces 15 dernières années et ceci rien qu’aux Etats-Unis. L’image de ce sport a changé radicalement : elle est aujourd’hui particulièrement jeune et edgy. Les Beastie Boys, le rocker Alice Cooper et l’acteur Samuel L. Jackson proclament haut et fort leur passion pour la petite balle blanche. En version  » urbaine  » – joué dans les parcs et les petites rues, en utilisant des balles molles – il est devenu un véritable phénomène, et de nombreux magazines, comme Bogey ou Putt, s’adressent clairement à un public pour qui le look compte tout autant que de réussir son parcours en dessous du par.

Pas étonnant donc que l’offre d’équipements hype ne cesse d’augmenter au point même, si l’on en croit Ian McCloud, le patron du site trendygolf.com spécialisé dans la vente de lignes golfwear pour les soucieux de la fashion, le marché friserait même la saturation.  » Les marques qui dureront sont celles qui seront capables de mêler fonctionnalité, versatilité et coolitude « , analyse-t-il.

Le marché est d’autant plus solide aujourd’hui que l’on retrouve dans les lignes golf ce petit côté rétro parfaitement en phase avec la fascination actuelle, chez l’homme, pour tout ce qui touche à l’héritage, à l’authenticité et aux années 1960. Ainsi, chez Tommy Hilfiger, on n’a pas hésité à proposer une cape à carreaux dans le plus pur style Sherlock Holmes. Le fabriquant de maille écossais Lyle & Scott vient de relancer une ligne golf, remettant à l’honneur les coupes classiques de l’époque, comme le pull-over en V porté par Sean Connery dans Goldfinger. De même le label Original Penguin, créé en 1955, vient aussi de se relancer, proposant une ligne plus formelle baptisée Penguin Black et distribuée par les concept-stores les plus pointus.  » Nous sommes bien conscients que le golf est un loisir. Et donc qu’il n’y a pas de raison de s’habiller pour y jouer comme si on allait au boulot, souligne Chris Colby, le président d’Original Penguin. Toutefois, je pense que les tenues de golf avaient perdu beaucoup de leur classe ces trente dernières années.  »

Parallèlement à ce classic revival, la nouvelle culture golf a conduit à la création d’une foultitude de marques uniquement dédiées au green, au style résolument subversif et rebelle – l’influence streetwear est passée par làà Ainsi, la marque américaine Tattoo Golf propose un dress code plutôt agressif, ses polos, tee-shirts à manches longues et à capuche, casquettesà arborant tous un logo – un crâne et des os croisés – digne de la flibuste. Dans le même esprit, Tattoo Golf propose aussi une ligne  » chick gear  » destinée aux filles. Rien de tout cela ne serait bien sûr dans le ton des fairways de St Andrews – cette petite ville d’Ecosse qui se veut la mère patrie du golf. Mais sied davantage aux adolescents de plus en plus nombreux à pratiquer une discipline qu’ils croyaient, jusqu’il y a peu encore, réservée à leurs grands-parents.

Les marques britanniques, comme Williams Golfwear – qui ressuscite les couleurs vives et les petits carreaux serrés des années 1950 -, Bunker Mentality ou Refugees, ne sont pas en reste. Cette dernière, en particulier, n’hésite pas à jouer la carte de l’ironie en imprimant sur ses tee-shirts de pseudo-armoiries de clubhouse quand elle ne prévoit pas dans ses pantalons des  » poches à triche  » – libérant si nécessaire une balle secrète qui apparaît miraculeusement sur le parcours en glissant le long de la jambe du pantalon – ainsi que des tops  » eco-friendly  » censés rappeler aux joueurs que les greens, malgré leur nom, ne sont pas les lieux les plus verts de la planète au sens écologique du termeà Refugees propose aussi des sacs de golf jetables, des balles noires et des chauffeuses de balle en tissu high-tech thermo-absorbant, le tout suggérant que la nouvelle golf attitude est bel et bien en train de s’offrir un solide makeover créatif et pourquoi pas punky sur les bords.

Josh Sims, avec Isabelle Willot

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