A l’ombre des sombreros, les aficionados des fourneaux mitonnent tortillas, tacos et quesadillas, mais aussi une flopée d’autres spécialités, parfois inconnues dans nos contrées. Une véritable bible, éditée chez Phaidon, rend hommage à ce feu d’artifice de saveurs.

Quand elle était enfant, Margarita Carrillo Arronte passait ses après-midis près de sa grand-mère, à la regarder concocter des douceurs debout devant son plan de travail.  » Lorsque j’étais sage, elle me faisait « nettoyer » les pales du batteur avec les doigts, que je m’empressais ensuite de lécher, jusqu’à ce que mon visage soit constellé de pâte sucrée délicieuse ou de chocolat « , se souvient la Mexicaine qui a aujourd’hui fait du hobby de sa mamy son métier, enseignant la discipline à l’université, dirigeant deux restaurants et étant également initiatrice d’un mouvement de slow food. Avec son aïeule, la passionnée de bonne chère a surtout appris que  » cuisiner pour sa famille et ses amis est une joie et que l’apprentissage est plus facile lorsqu’il est dispensé avec amour et patience « . Aujourd’hui, après avoir consacré vingt-cinq ans de sa vie aux mets de sa patrie, elle transmet à son tour son savoir, et celui de quelques chefs invités, dans un bouquin publié chez Phaidon qui ambitionne de dresser, au travers de plus de 600 recettes, un portrait de l’art culinaire du cru, région par région. Car s’il est une caractéristique de cette nation d’Amérique du Sud, quand il s’agit de manger, c’est bien sa diversité. Une variété de saveurs qui s’explique par les influences multiples qu’a connues le pays au cours de l’histoire – on pense aux Mayas, aux Aztèques ou aux Espagnols. Cette palette polyphonique de goûts se justifie aussi par la situation géographique du territoire :  » Au nord, depuis la frontière qui le sépare des Etats-Unis, le Mexique commence par des étendues de désert aride ponctuées de cactus géants – ici, le blé règne en maître au détriment du maïs et le boeuf est bien plus souvent consommé que la chèvre, décrit l’auteure. Vers le sud, en direction du Guatemala, une fois le tropique du Cancer passé, le paysage devient vert, tropical et luxuriant ; il regorge d’ingrédients déjà familiers aux premiers habitants de la Méso-Amérique.  »

Le corollaire de cette disparité gustative : une gastronomie très bigarrée qui n’a rien à voir avec les snacks tex-mex de chez nous… Et inspire même les plus grands ! Ainsi, le maître incontesté René Redzepi a confié l’an passé, dans T, le magazine lifestyle du New York Times, son attachement à ce terroir sud-américain. Au départ, le Danois, qui possède  » le meilleur restaurant du monde  » à Copenhague, imaginait que tout ce qu’on pouvait ingurgiter au Mexique était  » gras, riche et proposé en énormes portions « . Lorsque l’un de ses anciens collaborateurs, Roberto Solis, aujourd’hui à la tête d’un restaurant prisé dans la péninsule du Yucatan, Nectar, l’invita à visiter sa terre de coeur et lui fit découvrir les mets locaux, ce fut la révélation… Pour le chef scandinave, le Mexique est désormais la prochaine place-to-be en matière de gastronomie, après l’époque moléculaire du Catalan Ferran Adrià et la mouvance scandinave. Voilà une raison supplémentaire pour se plonger dans le recueil de Margarita Carrillo Arronte, que ce soit pour y trouver une basique recette de guacamole ou de fajitas, voire un mets plus mystérieux et exotique. Buen provecho.

Mexique, le livre de cuisine, par Margarita Carrillo Arronte, Phaidon, 668 pages.

PAR FANNY BOUVRY / PHOTOS : FIAMMA PIACENTINI-HUFF

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