Vieux comme le monde, le lin, fibre-fierté de la Belgique,

étend sa fraîche mais forte emprise à tous les secteurs

de la mode et du lifestyle.

 » M on amour pour le lin vient du fait que cette matière vit avec le corps qui l’arbore : à la raideur, elle oppose une mobilité, un vécu exceptionnel. J’aime employer le coton qui est également un matériau naturel, mais jamais je n’obtiendrai le même rendu dans mes habits. La structure même du lin offre une infinité de possibilités : écologie, économie, anallergie, élégance, évanescence, aisance d’entretien, exceptionnelle solidité, énorme confort, emploi polyvalent… « , explique Kaat Tilley, une  » linophile  » convaincue. Les termes de la belle créatrice baroque servent d’ambassadeur à la plupart de nos compatriotes férus de créativité vestimentaire : peu importe leur âge, style, sensibilité et structure professionnelle, ils/elles communient û souvent depuis belle lurette û , sous le signe de  » l’or blanc belge « . En rafale et hors de toute volonté exhaustive, citons José Enrique Oña Selfa, Stijn Helsen, Annemie Verbeke, Martin Margiela, Olivier Strelli û nommé Maître du Lin en 1999 û , Sarah Paccini, Chris Janssens, Sofie D’Hoore, Archie Pell by Bruphils, Lena Lena… et, il y a plus longtemps, l’une des princesses du lin, la Namuroise Françoise Dury, qui rafla plusieurs récompenses internationales directement liées à cette matière. Dès le début du slogan  » Mode c’est Belge « , le lin occupe d’ailleurs un rôle fondamental dans la construction d’une allure belgo-belge.

Notons également que (quasi tous) les acteurs de la mode enfantine trouvent, dans cette fibre magique, des ressources toujours plus riches pour vêtir, avec confort mais classe, nos chères têtes blondes. Last but not least, de la jolie petite fleur bleue qui décore la plante de lin durant 24 heures seulement, naîtront notamment la toile chérie par les artistes peintres, le pain aux graines de lin, l’huile de lin, les cosmétiques à base dudit produit… Quant au Musée du lin à Courtrai (http :/regio. kortrijk. be), il développe, tant pour les amateurs que les avertis, toute l’histoire et les capacités de cette plante dont le nom, en langage botanique, signifie, à juste titre,  » bienfaiteur « .

Finalement, en bénéficiant des techniques révolutionnaires typiques à la recherche textile û dans les années 1980, il chiffonnait pas mal de consommateurs avec son aspect froissé/froufrou/fané û, le lin est devenu un  » classique-moderne  » capable d’assumer, par ses qualités intrinsèques, une position de leader en toute saison. Diplômé de La Cambre (section textile) en 2001, Daniel Henry, par exemple, s’attache à réfléchir, pour la production textile, à de nouveaux types de lin retravaillés grâce aux processus de l’enduction, du brossage, etc. Ainsi qu’à du lin dont l’aspect (façon fourrure, façon feutre…) permet d’affronter chaque caprice du baromètre.  » Le lin contemporain arrive à très bien jouer les trompe-l’£il, confirme Kaat Tilley. Tenez, j’ai déjà employé du lin qui, à l’extérieur du vêtement, possédait l’aspect du daim mais qui, à l’intérieur, conservait toutes ses propriétés.  »

Fierté du terroir belge où, question de microclimat, sa culture prospère dès le XIIIe siècle au nord comme au sud du pays. Le lin s’est aussi doté, il y a une quarantaine d’années, d’une association siglée Confédération européenne du lin et du chanvre. Voici près de douze ans, une appellation d’origine contrôlée,  » Masters of Linen  » (www.mastersoflinen.com) venait renforcer le statut et l’intégrité des producteurs de lin, Belges en majorité.  » Ce label, apposé dans les vêtements en lin ou en majorité composés de cette fibre, confirme que le produit (vêtement, accessoire, linge de table, linge de lit, etc.) a bien été réalisé et peaufiné sur le territoire européen selon des critères de qualité extrêmement précis « , souligne Catherine De Vestele, responsable communication et produits des Masters of Linen.

N’oublions pas que le lin rassemble énormément d’acteurs, depuis les cultivateurs jusqu’aux responsables du produit fini en passant par les préparateurs de la fibre et les filateurs. C’est dû notamment à la multiplication des traitements du lin (mécaniques, chimiques, à base de résine…) La Belgique regroupe tous les savoir-faire concernés par la mise en route du lin, ce qui sert d’exemple à l’échelle européenne et mondiale.  » Dans ce secteur, notre pays fait vraiment figure de battant (NDLR : dans les années 1980 et 1990, la Belgique a aussi défendu avec acharnement les intérêts du coton et de la laine mais, faute de budgets suffisamment étoffés ou reconduits, ces initiatives ont rendu l’âme), il y a pour le lin en particulier et la mode en général, un esprit d’entreprise que beaucoup nous envient.  » Le lin, comme le blé, le houblon ou la vigne, a de bonnes et de mauvaises récoltes.  » C’est le revers de ces matières de type naturel ; il faut prier les dieux des moissons. Mais cette année-ci, comme la cuvée 2002 d’ailleurs, sera excellente « , confirme Catherine De Vestele.

Dans une économie mondiale plutôt flagada, le lin  » made in Belgium  » est chouchou à l’export û aux Etats-Unis et dans la majorité des pays de l’Union européenne û et très respecté en ses frontières.  » Il s’agit d’un produit de proximité, concept cher à nos compatriotes : en matière de traitement du lin, nous possédons des entreprises comme Libeco-Lagae en Flandre occidentale, qui savent conjuguer longévité et inventivité. Mais le lin fleurit et se façonne avec brio aussi dans le Namurois, sur les bords de l’Escaut, en Hainaut, dans le Limbourg et même en Brabant wallon « , conclut Catherine De Vestele.

Marianne Hublet

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